[PARTIE 4 : DÉESSES] Chapitre 44 : Les limites de la Cloche

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Après la disparition de la déesse, Åna était restée quelques secondes à contempler la paroi de verre, abasourdie. Le murmure de la forêt remonta progressivement à ses oreilles. Elle remit ses idées en place.

Bon, sa mère l'avait aidée plus d'une fois à se sortir d'une mauvaise passe. Après Arachné et la cabane encerclée de monstres, il n'était pas question qu'Åna se fasse prendre une nouvelle fois. Elle n'était jamais arrivée aussi loin dans la Cloche jusqu'ici, il fallait en profiter.

Dire que la Cloche était fermée par une paroi de verre peut induire en erreur. C'était bien du verre, mais il était loin d'être transparent. Une épaisse buée le recouvrait, et à travers, on ne voyait rien si ce n'est un peu de bleu (du ciel ou de la mer?) et un peu de vert (la végétation extérieure, ou le reflet des arbres de la Cloche ?) Au moins, Åna était sûre qu'il n'y avait pas d'immeubles, c'était déjà ça.

En levant les yeux sur sa cage de verre, elle remarqua que celle-ci était soutenue par des piliers réguliers en pierre blanche, sur lesquels les plantes grimpantes venaient s'enrouler, et contre lesquelles pendaient les feuilles de bananier. Elle ne les avait jamais aperçus avant, tant ils étaient recouverts de végétation, et écartés les uns des autres, mais sur l'échelle de la Cloche, ça devait former une sorte de coupole. Et, tout en haut, entre les feuillages, Åna était presque sûre de distinguer le ciel.

Une idée stupide lui vint alors - elle avait déjà, plusieurs fois, essayé de grimper aux arbres de la Cloche pour essayer de voir plus clairement l'endroit où elle se trouvait. Mais demi-déesse ou pas, l'ascension était quand même ardue au bout d'un moment, surtout quand on n'a qu'un tronc auquel se raccrocher et qu'il rétrécit au fur et à mesure, comme celui des palmiers. Sans compter la faim, la fatigue, et les oiseaux qui venaient lui picorer la tête à mesure qu'elle grimpait... Bref, elle avait peu à peu, par flemme sûrement aussi (parce qu'elle s'était habituée à vivre dans la Cloche), abandonné cette piste. Aujourd'hui, elle allait recommencer. C'était une idée stupide, non pas parce qu'elle était dangereuse (dans ce cas, Åna n'avait jamais eu de sa vie une idée qui ne soit pas stupide), mais parce que tout simplement, elle n'avait plus de corde, celle-ci étant tombée quelque part dans la jungle, il lui restait son couteau et ses flèches, mais elle n'avait ni gourde, ni nourriture, et l'ascension allait vite devenir éprouvante. Mais sur le moment, elle n'y pensa pas le moins du monde. Le pouvoir de Tyché l'animait encore un peu et elle se sentait presque pousser des ailes. Alors, elle commença l'ascension.

Notre Åna a beau être stupide, elle n'en est pas moins l'une des demi-déesses les plus entraînées de la Colonie ; et, s'aidant de son couteau, les bras engourdis et la tête un peu embrouillée à cause de la soif et de la faim, elle se hissa tout en haut de l'arbre. De là, elle put observer tranquillement la forêt.

Sur le moment, la première chose qu'elle se dit, c'est qu'elle avait bien fait d'arrêter de grimper à l'arbre. La vue qu'elle avait ne lui permettait absolument pas d'en savoir plus sur l'intérieur de la Cloche, étant donné que tout était recouvert par la cime des arbres, qui faisait comme un long tapis vert. Par contre, de là, elle avait une vue imprenable sur le toit de la Cloche... à une dizaine de mètres de là.

Comme elle l'avait présumé, les piliers de marbre se réunissaient au centre, où ils soutenaient une voûte en verre, à travers laquelle on voyait, aussi trouble que sur les « murs », un fragment de ciel blanc, avec ce qui semblait être des nuages. Poursuivant sur sa lancée d'idées stupides, Åna entreprit alors de passer d'arbre en arbre pour rejoindre l'un des piliers. De là, si elle s'accrochait bien, elle pourrait peut-être rejoindre le centre de la Cloche. Et après...? Elle avait la vague intuition qu'au centre, tout en haut, une trappe s'ouvrirait pour la laisser passer. C'était probablement un rêve impossible à réaliser, mais on réfléchit de manière illogique quand on est fatigué. Et là était le paradoxe : Åna se sentait en pleine forme, parce qu'elle avait dormi plusieurs heures. Elle se fichait d'avoir à courir d'arbre en arbre pendant toute l'après-midi et même la nuit, ça la détendait presque. Mais quelques heures de sommeil n'effaçaient pas des semaines de sommeil manquant, et sa logique en était un peu déréglée.

Nemesis Hogwarts Project [HP-PJ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant