32: lâcher prise

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J'espère que discuter avec Zélie l'a aidée, même s'il ne s'agit que quelques gouttes de bonheur

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J'espère que discuter avec Zélie l'a aidée, même s'il ne s'agit que quelques gouttes de bonheur. Manger dans un silence assourdissant et essayer de combler le vide est quelque chose de compliqué. Et je ne m'en étais jamais réellement rendue compte. J'ai toujours été dans sa situation, à ne prononcer aucun mot et à ignorer tout ce qui m'entoure. Elle a besoin de temps, tellement de temps que je ne sais pas quoi faire ni quoi lui dire, ni quand agir. 

- Zélie, tu veux aller au yoga ce soir ? demande Rheanna.

Les animations du soir sont optionnelles et je n'y suis jamais allée. Je me demande même s'il y a du monde. Mais peut-être que cette activité pourra détendre son corps stressé.

- Pourquoi pas, j'espère que mes bourrelets ne vont pas déranger la vue de certaines personnes.

- T'inquiète pas, tu es très bien comme ça, lui dis-je.

Lorsque Zélie marche jusqu'à la salle de jeu du lycée, elle ne peut pas s'empêcher de regarder autour d'elle. Des milliers de questions doivent rebondir dans sa tête et ne jamais en sortir. Elle doit se demander si tout le monde a bien vu la photographie mais surtout s'ils se moquent. Zélie n'est pas naïve. Elle sait qu'il y a des gens assez cons sur terre pour se moquer de sa photographie alors qu'ils ont aussi des complexes. Elle sait que la vie est dure, et que ce n'est qu'une mauvaise passe. Mais elle sait surtout que ces prochaines heures vont être les plus dures, parce que les autres aiment les drames. Et le drame actuel, ce sont les photos de Zélie.

- Essaye de te détendre et marche sur les rageux avec tes bottines, je chuchote à l'oreille de la fille du lycée. 

- J'aimerais bien avoir mes escarpins, ça fait plus mal que mes docs, me répond-elle en arrêtant d'observer tout le monde autour d'elle. 

Le harcèlement est quelque chose que je ne comprends pas. Se faire détruire mentalement ou physiquement sans raison, même s'il y en a une, n'est pas normal. Certains en viennent au suicide car les harceleurs n'ont pas été assez intelligents pour se rendre compte que tout cela blesse profondément. Peut-être que Zélie mérite tout ça : l'harceleuse harcelée. Peut-être que ce n'est que le fruit du karma se vengeant. 

C'est toujours difficile de se mettre à la place des autres. On ne sait jamais ce qu'ils ressentent. Et parfois une blague n'est pas prise comme telle. Si le principal concerné ne rit pas, ce n'est pas une blague. J'ai l'impression que, la plupart du temps, les gens ne se rendent pas compte du mal qu'ils font. Toujours à dire "mais c'était une blague" ou "on pensait pas qu'elle allait se suicider pour ça". Ne diminuez pas un harcèlement au mot "ça" comme si c'est inoffensif et petit. À partir du moment où ça blesse quelqu'un, ce n'est pas à prendre à la légère.

Rheanna et moi marchons, accompagnant Zélie. À plusieurs reprises, elle décide de faire demi-tour, puis elle change d'avis et retourne sur ses pas. À quelques mètres de la salle, je vois Abel qui se rapproche de nous. Qu'est-ce qu'il nous veut ? Je prie juste pour qu'il ne fasse pas de remarque à Zélie.

DÉTOXWhere stories live. Discover now