Chapitre XI

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                                                                  Prélude immaculé

Lash venait de m'indiquer le lieu de mon entraînement.

Les plaines de Raves.

Je le suivais sans un mot, n'osant pas exprimer à voix haute mon trouble. Je n'arrivais pas à réprimer la peur qui m'assaillait à la simple évocation des plaines de Raves. Des sueurs froides dégoulinaient le long de ma nuque et dévalaient mon dos. Je ne parvenais pas à réprimer les tremblements qui m'assaillaient. Mon souffle devenait plus haletant au fur à mesure que nous avancions et, à mon front perlaient de nombreuses gouttes de sueur. Ma vue s'embrumait à tel point que le dos de mon tuteur me semblait trouble et les battements de mon palpitant s'accéléraient de plus en plus.

J'avais été attaquée par un monstre à leur orée toutefois cela restait stupide. J'étais désormais accompagnée d'un redoutable bretteur et, je doutais de recroiser deux fois le même monstre sinon ce n'était plus de la malchance à ce niveau là mais mon destin que d'être mangée par une affreuse bête, ironisai-je sans tromper ma peur.

Tentant tant bien que mal de rester discrète, je chancelais à chacun de mes pas et m'agrippais contre les murs de pierre des bâtiments. Je n'arrivais pas à me calmer, songeant sans arrêt aux crocs acérés de la bête qui s'échappaient de sa bouche béante ressemblant davantage à l'antre d'un démon qu'à la mâchoire d'une créature.

- " T'as fini de nous faire remarquer, Crevette ?" me réprimanda Lash, insistant sur le terme de "crevette", qui, sans jeter un regard vers moi avait remarqué mon comportement des plus étranges.

Mon camarade m'avait affublé à notre rencontre du surnom de "Crevette", justifiant cela par sa ressemblance avec mon nom de famille, à savoir Eulet. Que l'on m'associe à un crustacé me mettait hors de moi mais je me sentais bien trop épuisée pour répondre convenablement à sa provocation, préférant ne pas relever.

- " Je ne veux pas y aller. Je ne me sens pas prête à me rendre sur ces plaines." annonçais-je d'une petite voix.

Il me toisa, l'un air agacé par mon comportement puérile. Tout à coup, il m'agrippa le bras et tira de force vers notre direction. J'essayais de me débattre mais sa poigne était évidemment trop puissante pour moi. Des regards alarmés se dirigèrent vers nous mais, les rumeurs pour cause, personne ne réagit et, au contraire semblèrent même plutôt amusés.

Lash semblait lui aussi s'en soucier puisqu'il fusillait du regard chaque passant qui émettait un jugement trop hâtif. Je voulais me contenir mais ce fut difficile et même plus que ça ; éprouvant.

Quand nous sommes arrivés devant le lieu de mon attaque, je fus prise de hoquet. La peur reprenant toujours plus de place dans mon esprit. J'étais parvenue à chasser cette histoire de mes rêves mais, devoir y faire face aussitôt me semblait un peu trop prématuré. Sasha avait raison ; je ne savais pas encore me battre. Avoir des muscles du à un entraînement et en avoir grâce à des combats acharnés représentent deux choses différentes.

Le lieu était identique, à un détail près. La trace d'un corps affalé au sol ; le mien. Je fus embarrassée mais ce songe fut vite remplacé par l'effroi provoqué par l'ombre du muret.

Brusquement, mon corps fut mu en avant ; Lash me tirait toujours :

- " Tu ne vas pas t'échauffer indéfiniment, il faut bien qu'un jour tu affrontes un véritable monstre, non ? C'est le coin où se retrouvent les monstres les plus faibles. La Virace reste une exception, ici." m'informa mon collègue qui scrutait l'horizon.

Je savais que ses paroles, mêmes mauvaises, avaient un semblant de réconfort. Il n'est pas une gentille personne avec le cœur sur la main ; il fait ça parce que je vis avec sa supérieure hiérarchique. Toutefois, cela devait représenter un effort incroyable pour quelqu'un comme lui alors je ne pouvais me montrer si puérile. Il en allait aussi de ma promesse.

J'avançais doucement, constatant que je marchais Lash retira sa poigne. Je posai un pied sur la clairière, là où la terre laissait place à l'herbe verte.

Après une grande inspiration, j'eus finalement commencé à m'entraîner. Bien que je fus hésitante, mes muscles se détendirent progressivement, oubliant mon agression passée. Nous nous étions dirigés vers un coin plus éloigné où vivaient des bêtes appelés mufles laineux.

Il s'agissait de monstre particulièrement calme ; ils ressemblaient à un mouton mais leurs poils bruns ou blanchâtres, bien plus longs, balayaient le sol, remuant ainsi la poussière. Ils n'étaient pas bien rapide mais pouvaient représenter une certaine menace à cause de leur taille assez imposante leur conférant une bonne force, ils arboraient aussi deux cornes. Elles restaient épaisses et solides mais n'étaient pas acérés, ne suffisant pas à infliger des blessures similaires aux armes d'estoc. Mon professeur m'avait appris qu'il vivait près de la rivière qui traversait les plaines.

A l'origine, je n'avais pas aperçu cette dernière car elle se trouve en aval des montagnes situées à l'ouest et s'écoule dans un renfoncement de la plaine, indistinguable à une certaine distance. C'est de ce fleuve que provienne les canaux traversant la ville, m'avait-il expliqué. Au nord- ouest de la ville se trouve une installation similaire à un barrage et à un moulin qui sépare le courant en une multitude de canaux s'éparpillant dans les moindres recoins de Rosran. Ils se retrouvent par la suite dans le sud-est de la petite cité pour reprendre la forme d'un rivière s'en allant par les plaines où vivent les monstres en question.

Celui que je m'apprêtais à affronter, le troisième, foulait la terre grâce à ses énormes sabots noirs pour prendre de l'élan. Malheureusement pour lui, malgré mon arme toujours un peu trop lourde pour moi, je fus la plus rapide. Ses cornes et mon s'entrechoquèrent dans un bruit sourd puis après avoir été repoussée en arrière, je repris appui sur la terre et m'élança vers la bête, abattant mon arme dans un coup horizontal qui lui entailla les flancs. Après quoi, il affaissa ses antérieurs, me laissant champ libre pour attaquer.

- " Abats-le !" clama mon tuteur.

Ignorant son ordre, je rengainais ma lame dans son fourreau. Je ne tuais pas mes adversaires. Lash avait beau me dire que blessé aux pattes, un monstre ne peux plus faire grand chose et mourra seul cela ne suffisait pas à me faire changer d'avis. Je refusais d'occire une bête innocente, c'était d'ailleurs l'une des raisons qui me poussait à ne pas infliger de blessure trop profonde, en plus de mon manque de force.

La bête nous toisait l'air mauvais, cherchant à riposter toutefois, après avoir croisé le regard encore plus féroce de Lash, elle s'enfuit, chancelante. Mon professeur soupira d'un air las avant de se figer net en observant devant lui. Étonnée, je suivais la direction dans laquelle Lash regardait. Ma réaction fut la même que lui.

Nous observions tous les deux, le souffle coupé, la créature qui se distinguait dans ce lieu de quiétude.

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