Partition 5

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Alors que Julian me saisit les cuisses, je me sens vulnérable. Lorsqu'il se plaque contre moi et que je sens son membre m'effleurer, une peur glacée s'abat sur moi. L'air se raréfie subitement.

– Ça va ?

Je hoche la tête parce que je suis incapable de parler. Julian s'appuie sur ses coudes pour désolidariser nos corps.

– Non, ça ne va pas du tout, répond-il à ma place. Tu respires super fort.

Je n'ai pas la sensation de respirer super fort. Au contraire, j'ai plutôt l'impression de ne plus respirer du tout. Mais le bruit saccadé de ma propre respiration parvient à mes oreilles. On dirait un chiot qui halète. Je ferme la bouche et déglutis.

– Fais comme avant.

– Comment veux-tu que je fasse comme avant alors que tu ne réagis pas comme avant ?

Je soulève mon bas-ventre pour l'appuyer contre son sexe :

– Allez, vas-y, qu'est-ce que t'attends pour me baiser ?

– Non, m'oppose-t-il fermement.

Il bascule sur le côté. Et je me mets à pleurer. L'oxygène affleure en même temps que mes larmes. Julian me prend dans ses bras tandis que ma gratitude salée ruisselle le long de son torse. Je pleure pour ce « non » qu'il a eu le courage de prononcer à ma place. Ce « non » dont j'avais besoin. Je pensais en être capable, mais non je ne suis pas prête.

– C'est pas grave, tente-t-il de me consoler. On essayera une autre fois.

– Je suis désolée. T'as rompu avec Carly pour moi et moi...

– Ce n'est pas grave, répète-t-il calmement.

Je lève le menton vers lui et, même à travers un rideau de larmes, je n'arrive plus à lui trouver de ressemblance avec Sebastian. Je ne vois plus les reflets verts de ses yeux, mais la couleur des sentiments qui les animent. Leurs expressions sont tellement différentes que je n'arrive pas à comprendre comment j'ai pu les assimiler l'un à l'autre. Jamais personne d'autre que Julian ne m'a regardée ainsi.

Je dépose un bref baiser sur ses lèvres, puis je remets mes sous-vêtements et mon tee-shirt. Nous restons blottis l'un conte l'autre comme deux amants qui auraient fait l'amour, repus, délivrés. L'illusion est parfaite.

Pourtant cette situation n'a rien de normal. Avant, nous serions déjà en train de discuter devant la télé en mangeant des chips.

Jamais nous ne serions restés au lit.

Jamais il ne m'aurait tenue dans ses bras comme si j'étais sur le point de me briser.

Je suis encore blottie contre son épaule lorsque j'entends la porte d'entrée claquer. Ce doit être Evalyne. Je reconnais sa façon de signifier que sa journée a été harassante. J'enfile mon jeans, mes chaussettes et mon sweat ; je ne veux pas qu'elle s'imagine quoi que ce soit.

Julian se retourne et grommelle :

– On était bien. Reste.

Cette phrase se plante dans mon cœur comme un petit rayon de soleil. J'aimerais lui dire que je reste toujours près de lui. Même quand je suis chez moi, je suis avec lui en pensée. Mais ça ne servirait à rien de lui sortir une tirade pareille.

Il me rend service.

Il va se remettre avec Carly.

Je tatoue ces phrases dans mon cerveau pour recouvrir ce On était bien. Reste. Le petit rayon de soleil s'éclipse.

Forget the Night - Autumn & JulianOù les histoires vivent. Découvrez maintenant