Chapitre 57 - Camille

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Hello :)

Pas de blabla, je vous laisse lire :) 

Bonne lecture !


Camille

Jared et moi venons de traverser le village, main dans la main. Depuis que nous avons quitté la maison de son père, il n'a pas prononcé un seul mot. Ses yeux sont restés braqués dans le vide. Pour l'instant, je n'ai pas osé entamer la discussion.

Sa mère et Tom ne seraient pas morts ? Cette question ne cesse de me hanter. Comment est-ce possible ? Pour le peu qu'il m'ait confié sur son enfance, j'étais certaine d'avoir compris qu'ils étaient décédés dans des circonstances tragiques. Toutes les hypothèses m'avaient alors traversé l'esprit : accident de voiture, assassinat de Tom puis suicide, attentat... Tout y était passé. Mais pas une disparition... Comment une mère pourrait-elle délibérément disparaître autant de temps ? Comment parviendrait-elle à se passer de ses autres enfants ? Comment son frère a-t-il pu accepter cette situation ? À l'heure actuelle, si mes calculs sont exacts, il devrait avoir vingt-six ans. Il a forcément des souvenirs et doit éprouver un manque réel de sa famille. Comment est-ce possible que depuis ses dix-huit ans, il n'ait jamais refait surface ?

J'ai l'impression que chacun de nos pas pèse une tonne. Mes pensées virevoltent sans cesse vers l'enfance de Jared. Plus j'en apprends, plus je m'interroge sur la façon dont il est parvenu à se construire. Ses frasques et ses abus ne sont peut-être finalement qu'un moyen de pallier à sa douleur. Faire le deuil de personnes qui sont encore vivantes, quelque part sur cette Terre, doit être juste impossible.

Tandis que nous arrivons à l'entrée d'un agréable parc, Jared s'arrête net. Je l'observe regarder les quelques bancs positionnés entre d'imposants chênes. Au milieu, se trouve un petit étang, bordé de nénuphars. Tout à coup, Jared me paraît si petit, si frêle au milieu de cet environnement immense.

– On s'assoit ?

J'ai posé la question très calmement, refusant intérieurement de le pousser à faire quelque chose qui le déstabiliserait davantage.

– Pourquoi pas...

Ne sachant que dire, je ne lui réponds pas immédiatement. Je le suis, m'attendant à nous arrêter sur le premier banc. Mais, contre toute attente, il poursuit son chemin. En arrivant à hauteur du troisième, il s'arrête enfin.

– C'est là que je trouve toujours mon père quand j'arrive ici et qu'il n'est pas à la maison.

En prononçant ces quelques mots, je le vois se crisper. Mais, je ne relève pas. Je commence à connaître Jared. Il ne s'ouvre pas facilement. C'est lui qui choisira le moment où il me dira ce qu'il a sur le cœur. Le presser ne ferait rien d'autre que le braquer. Nous nous asseyons en silence, fixant les quelques canards qui nagent à la surface de l'eau.

– Mon vieux n'a pas l'air comme ça, mais il déguste grave depuis des années.

J'éprouve la désagréable sensation de marcher sur des œufs.

– Pour Mélanie, j'ai merdé. J'aurais dû tout t'avouer bien plus tôt. J'ai vraiment merdé. J'espère, qu'un jour, tu réussiras nouveau à me faire confiance, même si je ne t'ai pas tout dit en ce qui concerne ma mère.

Il suspend sa phrase en plein vol, les yeux toujours perdus dans le vide. Sa main, posée sur la mienne, me rassure. Même s'il paraît ailleurs, il est avec moi. La sensation de sa peau chaude me conforte dans l'idée que nous ne sommes plus seuls. Désormais, nous formons deux parties, l'une ne pouvant exister sans l'autre. Je veux qu'il le comprenne, qu'il le saisisse de tout son être afin de s'autoriser à se laisser aller et s'ouvrir en totalité.

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