Up and down

Chapitre 31 - Jared

Jared

Pourquoi ne réagit-elle pas ?

Il s'est bien passé une minute depuis ma déclaration et rien. Nada. En lieu et place, un silence pesant s'est, une nouvelle fois, installé entre nous. Au bout de quelques secondes supplémentaires qui me paraissent durer une foutue éternité, elle déclare enfin :

- Tu te fous de ma gueule ?

Je n'ai jamais été aussi sincère de toute ma vie et elle ne me croit pas.

- Non.

Ses mains s'agitent nerveusement sur la table avant de continuer leur folle sarabande dans une lévitation plutôt étrange.

- Donc, ce que tu es en train de me dire, droit dans les yeux, c'est que tu acceptes de poser collé-serré contre Mélanie comme si le temps s'était arrêté et, qu'une heure après, tu m'annonces qu'on va faire l'amour ensemble. L'amour, putain !

Depuis quand s'exprime-t-elle avec ma joute verbale ? Je la regarde droit dans les yeux. J'essaie de la sonder. En vain. Vu sous cet angle, c'est plutôt mal parti. Mais, même dans les cas désespérés, j'ai toujours appris que l'honnêteté restait le meilleur atout.

- Oui.

Ou pas.

Ses yeux lancent de tels éclairs que ses envies de meurtre paraissent évidentes.

- Tu pars dans de beaux discours alors que tu ne sais même pas ce que ça veut dire, faire l'amour ! De tout donner à l'autre ! Sans aucune condition !

Ses joues sont devenues écarlates. Ses paroles me percutent en plein vol pour une raison qu'elle ne peut pas entendre. Et encore moins comprendre. Elle est vraiment hors d'elle. Rien à voir avec le début du repas où, en comparaison, elle paraissait calme.

- Si, je sais.

Ma voix n'est qu'un murmure et mes yeux fixent le vague de la nappe. Je me suis rarement senti aussi mal à l'aise.

- Mon cul, oui !

Malgré les insultes, j'essaie de garder la tête haute et de lui expliquer ce qui me traverse l'esprit. Et le cœur.

- Avec toi, je saurai, je déclare, d'un ton étrangement calme et mal assuré.

J'imagine un semblant de sourire dans son cœur, son organe se contractant sous la douceur de mes mots. Mais, ce n'est qu'un fantasme. Ses yeux me fusillent sans aucun remord.

- Ok, soit. Alors dis-moi comment tu t'y prendrais ?

- Euh...

Mon manque de répartie semble l'amuser. Elle sourit. Ou se moque. Peu m'importe. Voir son visage se détendre représente, ce soir, tout l'or du monde.

- Allez, j'attends.

Merde. Elle pense vraiment que je vais définir ce terme. Faire l'amour. Comment expliquer quelque chose dont on est inculte ? Contrairement à la baise, la pénétration vient à la fin mais avant ?Bordel-de-merde.

Pourquoi est-ce que je suis aussi effrayé de lui avouer ce dont à quoi j'ai déjà pensé un millier de fois depuis Barcelone ? J'agrémente toujours ce moment de langoureux préliminaires. Mais, là, devant elle, je me trouve être le dernier des cons.

- Tu vois, tu n'en sais fichtrement rien. On ne peut pas parler de quelque chose que l'on ne connaît absolument pas. Imagine que l'on te demande de pondre un article sur... (elle est encore plus belle quand elle se demande ce que je vais bien pouvoir lui sortir comme nouvelle idiotie)... je ne sais pas... (je ne me lasse pas de la dévorer du regard)... de la reproduction des saumons de Norvège ! Tu ne saurais absolument pas quoi dire dessus.