Chapitre 26 - Jared

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Jared

- Mélanie te sera reconnaissante.

Je suis à deux doigts de mettre mon poing dans la gueule à Alex. Pourquoi dois-je payer mes erreurs maintenant ? Maintenant ? Il faudrait un peu qu'il arrête de penser à ma place. Même s'il a été aux premières loges de mon malheur, il n'a pas vécu les choses. Il ne les a pas ressenties, et certainement pas subies.

- Je n'attends rien de sa part, je m'entends lui répondre. Par contre, nous, on se casse.

Camille est toujours assise, stoïque. J'aimerais beaucoup connaître le fond de ses pensées. Depuis qu'Alex a exposé clairement la situation, elle s'est enfoncée dans un étrange mutisme. Bien qu'elle soit restée calme, je vois une gêne latente dans le fond de son regard. Se pourrait-il qu'elle soit... jalouse ? N'importe quoi. Je ris intérieurement de ma bêtise. Cette fille m'a suffisamment fait comprendre que je ne suis rien de plus pour elle qu'un passe-temps agréable dont le bail sera résilié dans moins de deux mois. Le sentiment d'appartenance n'a pas de place dans notre accord. On ne va pas se pourrir la vie avec des émotions qui ne nous sont pas destinées. Nous sommes censés faire dans le trash, pas dans l'eau de rose.

- On bouge ?

Je me suis levé et la regarde, surpris. Malgré mon désir de me barrer d'ici au plus vite, elle reste assise à fixer nerveusement la pointe de ses sandales. Elle ne semble visiblement pas dans son état normal. Je ne sais pas quoi faire. Je ne suis pas habitué à parler de ce genre de débilités avec les nanas. Encore moins devant Alex. Il faut vraiment que l'on se barre. Je lui attrape la main et la pousse à enfin bouger ses fesses.

Maintenant qu'elle est debout, elle paraît presque gênée. Je ne supporte pas cette merde. Cinq jours sans baise. Alex. Mélanie. La tronche de Camille. Je les déteste tous pour ce qu'ils me font endurer. Fait chier.

En quittant cette terrasse pour de bon, je lance un regard mauvais à Alex avant de lui faire un magnifique doigt d'honneur. Qu'il aille se faire foutre. Quel connard. Moi et Mélanie sur scène. Il a fumé quoi ? Ça se compte en dizaine de pétards, là. A-t-il oublié tout ce qu'elle a subi à cause de moi ? Que compte-t-il réparer ? N'a-t-il pas encore compris qu'il y a une chose dont je ne pourrai jamais m'amender ? Celle-ci en fait malheureusement partie. Relancer Mélanie sur scène ne lui rapportera pas ce qu'elle a perdu. Ce que nous avons perdu. Jamais.

Je marche vite. Trop vite. Je tiens la main moite de Camille et l'entraîne dans les ruelles étroites du centre-ville. Elle me suit sans broncher. Sentir sa peau contre la mienne apaise légèrement ma colère, pourtant cela ne suffit pas à la calmer totalement. La réalité me frappe de plein fouet lorsque je remarque une inconnue nous fixer avec insistance. Putain, elle m'a repéré. Si je n'agis pas, dans moins de trente secondes, elle viendra me demander un truc ridicule. J'en ai ras-le-bol. J'essaie de me contenir, mais ça me prend d'un coup. Cette petite emmerdeuse veut du spectacle ? Elle va en avoir ! Moins de deux secondes plus tard, sous mon assaut soudain, Camille est bloquée contre le mur. Mes deux mains calent son visage de part et d'autre. Une sensation d'enivrement total s'empare de moi lorsque je plaque mes lèvres contre les siennes. Je me délecte de cette impression de la posséder. Mon corps, qui s'affaisse contre le sien, amplifie ce sentiment de toute-puissance. Le baiser paraît si profond et langoureux que j'en oublie tout le reste. L'inconnue, Alex et Mélanie ne sont plus que des points insignifiants dans mon horizon. Aux gémissements saccadés qui s'échappent de la bouche de ma nana, je comprends qu'elle partage tout à fait mon point de vue. Ses mains s'accrochent frénétiquement à mon dos, m'indiquant ainsi qu'elle ne veut surtout pas que je lui échappe. Tant mieux. Je compte bien rependre là où nous nous sommes arrêtés ce matin.

Je rassemble mes forces restantes afin d'écarter ma bouche de la sienne.

- On rentre ?

Elle me fixe un moment, les lèvres gonflées. Ses mains jouent avec mes cheveux avant de les tirer vers elle et de m'attirer contre elle. Je prends ça pour un oui. Je me délecte encore quelques instants de sa langue chaude. C'est si bon, si doux, si parfait. J'aimerais que ce moment ne s'arrête jamais. Enfin, non. Je veux plus. Je la veux, elle, toute entière.

Up and downWhere stories live. Discover now