Up and down

Chapitre 23 - Camille

Camille

- Vous êtes certaine ?

A l'autre bout du fil, la voix de Brigitte André semble empreinte de doutes. Je la rassure immédiatement.

- J'ai profité de mes quelques jours de vacances pour élaborer la base de mon troisième article. Je devrais pouvoir vous l'envoyer dès demain.

Je suis parfaitement sûre de moi.

- Vous ne craignez pas que ça fasse redite avec votre précédent papier ?

Je soupire, exténuée par ces derniers jours.

- Je vous ai promis que j'y serai. J'y suis. Comme indiqué dans mon contrat, j'assisterai au spectacle et vous propose même un bonus. N'ayez aucune inquiétude à ce sujet. Vous ne serez pas déçue.

Je ne peux pas lui expliquer les raisons de ce revirement. Ni de mon besoin de congés. Elle me croit toujours fiancée. C'est mieux ainsi. Je refuse d'avoir à m'expliquer sur ce qu'il s'est passé l'autre soir. Jared. Ses bras, sa bouche, sa main, ses doigts. Mon orgasme infini. De ma vie entière, je n'avais rien connu de tel. Le sol se dérobait sous mes pieds. Je ne savais plus où j'étais, qui j'étais. Seul lui comptait. Et l'effet qu'il me faisait. Inattendu, brûlant, torride. Une drogue. Une vraie. Une de celle dont l'on ne peut plus se passer. Je ne suis pas partie car je ne voulais rien lui donner en échange. Au contraire. Rien qu'en y repensant, je suffoque et je sens mon sexe se liquéfier. Il fallait que je me sauve, sous peine de me perdre avec un homme qui ne pourra jamais rien m'apporter.

Il fallait que je rende ce second article plus tôt que prévu. Que je l'échange. Barcelone contre Londres. C'était indispensable. Sinon, je n'aurais jamais pu reprendre les forces nécessaires pour continuer, l'affronter à nouveau, prendre une décision et lui faire une proposition. Ma proposition.

Ne flanche pas.

Les dernières paroles de Justine me reviennent en mémoire. Celles qu'elle a prononcées pas plus tard que la veille lorsqu'elle m'a appelée. Je ne me laisserai pas happer. Non. Certainement pas. Je vais juste... profiter de ce que la vie a à m'offrir.

C'est étrange de voir combien j'arrive à garder mon sang-froid. Au départ, rien ne paraissait facile ou évident. Marc, la rupture, le stage, Jared. J'aurais pu couler, mais je suis parvenue à flotter à la surface. Je ne sais toujours pas comment j'ai réussi à rester maîtresse de mes émotions ; mais je suis là, prête à affronter le monde. Et Jared.

- Très bien. Comme vous voulez. Je vous fais confiance. Envoyez-moi votre article au plus vite.

Je salue poliment Brigitte et allume mon ordinateur portable. En moins de deux minutes, je relis la base de mon futur papier. Ça passera. Satisfaite, j'ouvre un document vierge dans mon traitement de texte. J'y suis. Le moment que je redoutais depuis quarante-huit heures est arrivé. Bien que j'aie ressassé le pour et le contre pendant deux jours et deux nuits, je suis bien décidée à aller au bout de mon projet. Après avoir pris une profonde inspiration, je me lance. A cet instant, je sens que toute remise en cause semble désormais révolue. Une fois que je commence à taper, je ne m'arrête plus. Je sais ce que je veux, ce dont j'ai besoin et il s'agit de la seule façon de l'obtenir.

Jared Tom est ma ligne rouge. Celle que j'ai franchie. Je ne pourrai plus jamais revenir en arrière. Il m'a possédée, enivrée, fait découvrir une part de moi que j'ignorais totalement. Et que je veux retrouver. En toute discrétion.

A dix-huit heures pétantes, je suis prête. Je me passe une dernière fois le visage sous l'eau du robinet. Même si je pense que mes idées sont parfaitement claires, j'éprouve ce besoin étrange de me rafraîchir. Et la lourde température extérieure ne paraît de loin pas être la seule cause à mon malaise.