Chère Allemagne ( Marinus )

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7 juillet 1944, Berlin, Brandenburg, Allemagne (ou Grand Reich Allemand).

《Il était une fois, deux hommes. L'un était jeune, encore innocent du monde dans lequel il vivait, il était rempli d'espoir, désireux de se faire un nom dans une nouvelle société. L'autre avait déjà plongé depuis longtemps dans une vieillesse sans pareille, aigri, ravagé par la soif de vengeance, se laissant aller à la froideur du deuil infernal et éternel. Ces deux hommes se sont rencontrés un jour, l'un est devenu l'élève l'autre est devenu le maître. Sans même le voir, tous deux se sont appris les plus belles valeurs de la vie. L'un a rendu l'autre plus serein, en paix avec lui-même, l'autre lui a enseigné comment vivre dans une nouvelle société tumultueuse sans se faire avaler. Ces deux hommes se sont ouverts l'un à l'autre, ils se sont aimés d'un amour quasi paternel, même pendant cette guerre. Le vieil homme qui a commencé à rajeunir grâce à l'aide de son élève, a juré de protéger l'autre jusqu'à ce que la mort vienne le chercher.
- Qu'est-il arrivé au vieil homme ?
- Le vieil homme, un jour a compris que pour les gens comme lui, il n'y avait plus aucun espoir. Il l'a compris, c'est là qu'il s'est jeté dans la gueule du loup sans plus réfléchir. Il s'est jeté à l'intérieur en souriant car il n'avait pas d'autre choix. Mais ce sourire était un sourire de victoire, une victoire divine. Le vieil homme avait vécu comme il l'avait voulu et destiné à le faire, en protégeant son élève face au monde entier.
- Et l'élève il est devenu quoi ??
- L'élève ? Oh et bien, lorsqu'il a appris le sacrifice de son mentor, après avoir fait son deuil, l'élève a promis qu'il rendrait toujours hommage à son mentor, peu importe comment et combien de temps ça lui prendrait. L'élève vivra jusqu'à la fin de la vieillesse, en la mémoire de ce père qu'il n'a jamais eu biologiquement. 》

J'ai écouté légèrement ému le récit de cette maman à sa fille d'une dizaine d'années, me reconnaissant avec Leyers.
Il dort à côté de moi contre la fenêtre du train, ne se souciant de rien. J'espère qu'il fait de beaux rêves, qu'il profite de ce peu de moment d'insouciance avant de revenir à la réalité.
J'observe le paysage allemand revenir moi. J'ai fermé les yeux, me laissant submerger par les souvenirs. Les bons comme les mauvais qui me relieront à jamais à ce pays, pas le Grand Reich Allemand, mais à l'Allemagne. Ma rencontre avec Maria, mon apogée, mon mariage avec elle, l'annonce d'une grossesse miraculeuse, l'arrivée de Nikolaus dans nos vies. Mais j'ai aussi revu cette fameuse nuit sur la colline aux confins de Berlin, ma femme ensanglantée dans mes bras, mon fils et sa haine héréditaire, sa pseudo mort, le début de la guerre...

《Marinus ? Marinus ???
- Leyers que se passe-t-il ?
- Vous êtes devenu bien pâle tout à coup.
- Oh c'est rien, ai-je légèrement souri. C'est sûrement le mal de revenir au pays pour de telles raisons !
- Vous avez raison.
- Allez. On est à Berlin petit.
- Comment allons-nous être accueilli ?
- Soit nous serons acclamé comme des héros, soit on ne nous remarquera même pas.
- Et si les gens savaient pourquoi nous sommes ici ?
- C'est impossible. Personne n'oserait s'approcher si tu restes avec moi.
- D'accord, a-t-il soupiré légèrement soulagé.
- Bon allez. On y va. 》

Nous sommes sortis. J'ai posé ma main sur l'épaule à Leyers, percevant son stress à des kilomètres à la ronde. Rien n'a changé depuis que nous sommes partis.
Toujours les mêmes jeunes SS, les plus vieux en pacha dans les bars, les petits des jeunesses hitlériennes arborant fièrement leur drapeau ne sachant même pas que nous allons perdre, les filles rient en jolies tenues tout en lisant Mein Kampf... J'ai levé les yeux au ciel, constatant qu'aucun allemand sur le sol allemand n'a encore compris que le Grand Reich Allemand est voué à l'échec. À partir d'une moment où un gouvernement favorise la destruction entre les communautés, ce n'est pas un gouvernement mais une tyrannie dont le Chef ne règne juste pour assouvir un manque de confiance en lui.
J'ai regardé Leyers, ses grands yeux verts écarquillés.

《Marinus je ne sais pas si j'y arriverai.
- Ils ne te regardent pas. Souviens toi que nous sommes que deux petits généraux mutés dans un petit village au sud de la France.
- Mais vous Marinus vous êtes littéralement la personne la plus puissante après Himmler.
- Cela n'importe peu. Je suis ici en tant que Marinus Strauss-Kahn, pas en tant qu'Oberstgruppenfürher.
- D'accord je vois.
- Alors tu viens avec moi, on va prendre un taxi sur la grande place. Il nous emmènera devant la Chancellerie berlinoise. Tu vas garder ta tête haute Leyers, les épaules en arrière et ça ira. Personne ne te reconnaîtra, ai-je ajouté un sourire aux lèvres. Tu es parti avec la bouille d'un gamin et tu reviens en homme !
- D'accord je vous remercie.
- En route champion. 》

J'ai ouvert la marche, essayant de ne pas flancher face à cette immense vague de souvenir qui remue actuellement en moi. À mesure que nous nous dirigeons sur la grande place pour prendre le taxi, j'ai été content de voir Leyers reprendre confiance en lui, renouer petit à petit avec le sol allemand qui lui avait tant manqué.

《Guten Tag Herren*, nous salue le chauffeur. Où est-ce que je vous amène ?
- À la chancellerie de Herrn Hitler.
- C'est entendu. 》

Nous avons claqué la portière, plus que quelques kilomètres avant de laisser place aux négociations. J'ai observé Leyers, la mâchoire serrée, ses grands yeux verts perdus dans un monde parallèle, ses ongles râpant la peau de ses doigts.

《Leyers !
- Ja ?
- Tu vas arrêter avec tes mains oui ?
- Excusez-moi Général.
- Excuse moi plutôt... ai-je soupiré d'une voix plus douce. Tu n'as pas à stresser, c'est moi qui m'occuperait de tout une fois là-bas. Tu feras acte de présence avec moi.
- En quoi ma présence vous sera nécessaire ?
- Tu seras plus en sécurité avec moi en Allemagne, que seul en France.
- D'accord. 》

Je l'ai laissé rêvasser contre la vitre, le temps j'ai observé les jeunes SS. Eux, ils le savent. Ils savent que leur Grand Reich Allemand ne resplendit plus, ils savent que leur empire ne durera jamais un millénaire comme il l'était écrit. Je me souviens en 1942 quand mes troupes et moi partions dans les tanks sous les cris, les applaudissements, les chansons patriotes. C'était un empire de fierté, les gamins en uniforme que je vois n'ont plus cette étincelle d'arrogance et de puissance. C'était certain, ce genre de gouvernent ne peut pas durer éternellement tant que la stupidité humaine ne se réveille pas.

《Nous sommes arrivés Herren.
- Danke**, ai-je répondu en lui tendant une pièce. 》

Je suis sorti avec Leyers. Il est resté impressionné face à ce grand bâtiment, bâtiment de luxe, bien sculpté, construit, immense, tout en longueur. J'ai fait un pas en avant pour l'inciter à avancer. Plusieurs des gardes nous ont regardé, totalement incrédules. De moins en moins de gens osent venir à la Chancellerie, la haine commence à se développer entre les allemands, contre les chefs de l'empire, certains ont peur, d'autres s'enterrent chez eux jusqu'à la fin de la guerre.
Ils nous ont ouvert la porte pour que nous allions nous présenter à la secrétaire à l'entrée de l'accueil.

《Ça va Leyers ?
- Tant que vous êtes avec moi ça ira. 》

Petite vue d'ensemble sur ce qu'étaient les troupes gardiennes du Reichstag :)

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Petite vue d'ensemble sur ce qu'étaient les troupes gardiennes du Reichstag :)

Programmés pour tuerWhere stories live. Discover now