Attrapés ( Adolf )

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14 mai 1944, Munich, Bavière, Allemagne ( ou Grand Reich Allemand ).

Il y a quelques jours, je suis tombé sur la lettre de Maxence quand je me promenais le long de la frontière germano Suisse. J'ai vite compris oui, je l'ai compris.
Je savais que ses projets étaient déjà planifiés depuis longtemps, qu'il avait déjà mis la petite Stella en sécurité et j'en passe. Mon ami français est le genre de gars à tout planifier et à s'organiser à la lettre, sans qu'il n'y ait la moindre erreur. Alors quand je suis allé me promener et que j'ai appris le sinistre sort de mon amie Freya, j'ai vite compris ce qu'il allait venir à l'esprit de mon ami. J'ai couru, je crois n'avoir jamais couru aussi vite de ma vie. Je me rappelle encore sentir chacune des fibres de mes muscles, la sensation de brûlure purifiant dans les poumons, le corps léger. J'ai eu peur de ne pas le retrouver à temps, mais le hasard où comme Max dit si bien, son Dieu était avec moi va savoir.

Je veux faire le voyage avec lui, à présent nous sommes aussi seuls l'un que l'autre. Lui n'a plus Freya, je n'ai plus mon frère. Alors je sais que nous serions capables de braver toute la SS ensemble, deux pauvres âmes égarées en territoire ennemi. Deux âmes perdues mais liées, seules, cherchant inévitablement à se venger de la perte des êtres chers. Deux âmes devenues fortes, indestructibles face à la force mentale de détruire cette immonde dictature qui emprisonne l'Europe depuis bien trop longtemps. Alors je ferai le voyage avec lui, du point A jusqu'au dernier point, je serai là jusqu'au bout.

Nous marchons depuis je ne sais combien de temps, je dirai trois heures environ. La météo joue en notre avantage, le temps ne se fait pas trop lourd. Il serait assez léger pour marcher ainsi pendant deux grosses heures de plus. J'observe les alentours. Il n'y a strictement rien à part des conifères, des monticule de verdures commençant à sortir leurs feuilles estivales, avec des lacs qui chauffent sous le petit soleil de cette fin de printemps. On déambule actuellement dans le Sud de la Bavière, pas très loin du Berchtesgaden. Je sais que mon ami veut que nous nous rendons à Munich, la plus grande ville du Land et aussi sa capitale. C'est stratégique, j'ai fortement approuvé son choix. Munich sera une des premières étapes avant sa vengeance. Notre vengeance.

Maxence est de marbre. Je l'observe marcher avec attention, le dos courbé par son dur travail de bûcheron, les épaules bien taillées, la démarche assurée mais pourtant... Je sais très bien qu'il aurait voulu s'arrêter et pleurer à chaudes larmes sans se soucier de l'instant suivant, juste pleurer et se vider une fois et repartir plus fort.

《Hey Max.
- Quoi ?
- La petite Stella, tu l'as envoyé où par simple curiosité ?
- Dans un foyer pour jeunes à Saint Gall pas très loin d'ici, me répond-il la moue se décomposant.
- Tu l'aimais bien cette gamine ?
- C'est pas tellement la question là Adolf.
- Ah si si ça l'est ! Je vais pas faire le voyage avec un petit gamin qui ose pas dire ce qu'il pense !
- Oui je l'aimais beaucoup, ces quelques jours passés ensemble c'était particulièrement étrange. C'était pas comme avec les autres réfugiés. J'ai tissé un petit lien avec Stella je pense.
- Alors prie ton Dieu pour retrouver cette gamine après la guerre d'accord ? Et arrête de te faire du soucis on traversera cette merde ensemble et jusqu'au bout, ensemble.
- Merci, me dit-il avec une petite tape dans l'épaule.
- Ouais mais c'est quand même du délire mais je te suis dans ton délire si ça peut me permettre de ramener mon frère à la raison ! 》

Max s'est intéressé à mon petit frère, se demandant bien comment deux frères peuvent être aussi différents et séparés par des idées opposées.
Alors tant qu'à faire, je lui ai tout raconté depuis le début. Mon père violent avec toute la fratrie et avec ma mère. Mon absence prolongée due au travail, la relation très forte d'Hans et Herman, le début de la guerre, le départ de mon autre petit frère pour la France. Je lui ai aussi parlé de ma fuite car je n'étais qu'un paria à Berlin face aux farouches serviteurs d'Hitler, que ma mère a voulu rester avec mon père malgré toutes les atrocités qu'il lui a fait subir, la difficulté d'Herman à se refaire une vie au chalet du Berchtesgaden... J'ai raconté en détail quand celui-ci a appris que j'aidais des Juifs, son regard empli de haine et de dégoût... Je m'en rappellerais toute ma vie... C'est la relation a commencé à devenir de plus en plus tendue jusqu'à ce qu'un soir en rentrant de nos missions, j'ai trouvé la maison vide avec ce fameux mot.

Programmés pour tuerWhere stories live. Discover now