Aimer sans en avoir l'air ( Eve )

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17 novembre 1943, Saint Nazaire de Ladarez, Hérault, Languedoc-Roussillon, France.

Je me suis rapprochée du colonel résistant Leyers, je me suis rapprochée de lui plus que nous nous sommes rapprochés ces derniers mois. Peut-être que notre âme Résistante face à l'oppression de son pays nous relie.
Cette relation que nous entretenons, elle est bien plus douce, romantique et sincère que la première fois. Je ne suis pas allée vers lui pour en savoir plus sur les missions allemandes, je suis allée vers lui pour lui, pour ce merveilleux homme qu'il y a sous cet uniforme. Je sens qu'Hans ne me regarde plus comme une sainte ni touche française, je ne suis plus sa proie que l'on a envoyé traquer. Cela fait beaucoup de bien, je sais qu'il est allemand et moi française, que notre histoire mènera sûrement à rien, mais je ne peux pas imaginer la guerre où il ne serait plus. Je suis devenue son réconfort, il est devenu le mien.

J'ai repris du service depuis quelques jours, je vais souvent rejoindre le grand groupe de FFI à Lyon. Nous avons distribué des tracts, et brûlé des entrepôts d'armes allemandes. C'était bien, j'adore être avec des français qui ont les mêmes volontés que moi, grâce à cette minorité, Maxence et Hans ; je me sens moins seule. C'est grâce à nous, sans arrogance aucune, c'est grâce à nous que la pureté de la France est préservée.
Hans a un rôle essentiel maintenant, il est très impliqué pour libérer mon pays et le sien du totalitarisme d'Hitler.

Aujourd'hui, je ne ferai rien. C'est un dimanche, le jour du Seigneur. Honnêtement j'en ai assez en ce moment de courir partout, de causer la détresse et la violence à chacune de nos interventions. Oui, souvent, je pense à ces soldats qui se font tués ou blessés, ou à la souffrance infligée aux familles. Mais après, je me souviens des morts innombrables qu'ils ont sûrement sur la conscience et je vais mieux. Les nazis sont une race infâme qu'il faut éradiquer, sinon, ils seront toujours prêts à l'affût, à dévorer la société.

Je suis restée seule toute la matinée, j'en ai profité pour me recueillir à la chapelle à l'extérieur du village. Un des seuls lieux de cultes qui n'a pas été pillé et reconverti par les nazis.
La religion a nourri la vaillance et la patience de ma famille, ils ont tous trouvé leur refuge dans le catholicisme. Ce serait vraiment décevant pour eux d'apprendre que j'ai offert ma pureté au Colonel Leyers. Cela fait trop de bien d'être aimée et aimer, ces temps sont trop durs pour lutter. Honnêtement, je ne veux pas lutter face à Hans.

Je me demande souvent ce que devient ma famille en Angleterre. Peut-être que ma mère serait toujours aussi à cheval sur la religion et ses principes, peut-être que mes sœurs seraient toujours irréprochables, peut-être que mon père serait encore lui-même avec ses habitudes de bon français qui boit du vin... Certaines fois, ils me manquent beaucoup je ne vais pas mentir. J'ai pensé à tout abandonner pour les rejoindre au début de la guerre. Ma vocation, ma destinée est ici. Elle est là en France, dans ce petit village de rien du tout. Jamais je ne laisserai tout ce que j'ai ici, Hans, ma maison, la tombe symbolique de mon grand-père, la résistance, Mme Dubois. J'aurai bien plus à perdre en fuyant comme ma famille l'a fait.
Alors je resterai ici, je l'ai promis à Maxence et à moi-même, je serai là pour assister à la fin de la guerre comme j'ai assisté à ses débuts. Personne ne m'en empêchera.

J'ai dévalé le sentier de randonnée menant jusqu'à la place de l'église, où bien évidemment, comme à son habitude, le même garde SS a contrôlé mes papiers. Ces monstres ont installé une routine tellement affreuse, il n'y a plus la même ambiance. Les gens sont froids, distants, ils s'occupent d'eux, ils deviennent méchants et vicieux pour ne serait-ce que quelques centimètres de pain en plus... C'est pour cela que je me bats, pour revoir ce village que j'ai appris à aimer, à chérir et à respecter. Je veux revoir ce village, un village français.

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