L'Héritage du Chasseur : Le Loup parmi nous.

Chapitre 34 - Lottie Lovelace

Birmingham

03 Août.

Lottie était installée à une table du Coffee Tales situé à Warston Lane à Birmingham. Ses ongles manucurés et teintés d'un noir mat pianotaient nerveusement sur le bois de la table ronde. La joue enveloppée dans sa main avec nonchalance, elle attendait avec impatience son cappuccino et son cheesecake, végan, au tofu, myrtille et sans gluten. Ses yeux admiraient la peinture décorative sur le mur blanc du fond : « Once upon a coffee tale ». La faïence métro blanche et noire dans son dos apportait un petit quelque chose à l'ambiance qu'elle ne savait qualifier.

Elle aimait cet endroit. Pour le calme, pour le bon café, pour l'ambiance et... pour les pâtisseries faites maison. L'employé lui apporta sa commande et la louve le remercia distraitement.

Un soupir lui échappa alors qu'elle trempait les lèvres dans sa boisson réconfortante. La rondeur du lait puis l'amertume du café ravirent ses papilles. Sa langue se débarrassa de la moustache de mousse de lait qui s'était dessinée au-dessus de sa lèvre supérieure.

Le calme avant la tempête. Ce n'était pas pour rien qu'elle avait donné rendez-vous à Lafayette dans un café du centre d'une grande ville. Il n'oserait pas venir, armé jusqu'aux dents, pour lui arracher les yeux — ou tout ce qui lui aurait passé par la tête — devant témoin... pas vrai ?

La jeune femme se mit à gratter la pliure de son coude. Avait-elle bien pris son sérum, ce matin ? Il se pourrait bien que non. Il se pourrait bien d'ailleurs qu'elle l'ait fait un poil exprès. Juste au cas où ça dégénérerait.

Cela faisait presque deux mois qu'elle avait été mise au placard et qu'elle avait contacté Lafayette. Son installation à Combe Martin qui avait nécessité de nombreux aller-retour. Ceux entre le manoir Lovelace et la maison de village pour y déposer ses affaires personnelles, puis ceux entre Londres et le camp pour y apporter le matériel du labo... L'arrivée de Levi, puis celle d'Archie... La mise au clair des lycans sur place qui devaient s'assurer que le rouquin reste bien en vie... L'horreur de découvrir que des enfants étaient également exploités sur place... Et que son père comptait sur elle pour faire des tests sur eux.

Le problème étant qu'ils s'imaginaient tous qu'elle avait exigé ça de sa propre initiative. Son père agissait si bizarrement ces derniers temps... Les informations n'étaient pas distillées. De fait, aucun de ses hommes n'irait croire que l'ordre de préserver, coûte que coûte, la vie d'un chasseur, et de négliger celles d'enfants, viendrait directement de lui.

Comme si elle n'avait que ça à gérer.

Toutefois, Lottie devait reconnaître que vivre seule lui permettait de pouvoir se balader et de faire ses affaires, sous réserve de bien choisir l'heure et d'organiser son coup aux petits oignons. Comme aujourd'hui, par exemple, où elle « visitait » la Librairie de Birmingham. Pour ses recherches. Parce que les livres qu'elle cherchait ne seraient disponibles de suite que dans la plus grande librairie publique du pays.

La louve se mordit l'intérieur de la joue quand elle aperçut la silhouette de Lafe. Elle l'aurait reconnue entre mille. Ce jeune homme avait une aura particulière, et une démarche à la fois discrète, mais assurée. Le mélange était suffisamment étonnant pour avoir marqué la conscience de la jeune femme. Il se faufilait à l'intérieur du café et ses yeux vairons fatigués balayèrent la salle. Une grimace de dégoût non dissimulé parcourut le beau visage de Lafe quand son regard se posa sur elle. Lottie ne put retenir un rire étouffé et elle but une nouvelle gorgée, ses iris charbonneux plongés dans ceux de son potentiel allié de circonstance.

Le grand blond commanda un café noir serré qu'il attendit au comptoir. Une fois servi, il s'installa face à la blonde qui masquait sa nervosité derrière un sourire de façade un peu trop exagéré.