Chapitre 23

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Nathaniel venait de sonner une cloche dans nos têtes en nous rappelant que les auditions pour le spectacle d'hiver était lundi prochain et que je n'avais toujours pas de chanson pour mon solo, que je n'avais toujours pas pratiqué avec Castiel et que j'allais devoir apprendre une nouvelle chanson au piano en moins d'une semaine. En gros, j'étais dans la merde.
Il annonçait aussi qu'il y aurait une invitée surprise. Cela suscitait beaucoup de questionnement dans la classe et une autre dose de stress pour moi.
J'étais tellement ennuyée par le cour de français. Je ne savais pas ce qu'il se passait avec l'enseignante, mais celle-ci s'absentait presque toujours ces temps-ci. Son remplaçant ne faisait que nous donnez des tas de pages à remplir dans le cahier d'exercices seule et en silence. En gros, c'était trippant, écoute !
Comme j'avais fini une bonne partie du cahier au début de l'année (vieille habitude d'enfance), je n'avais rien à faire pendant toute la période. Je me mis à observer la classe. N'importe qui dans cette classe pouvait être notre harceleur. N'importe qui dans cette école d'un millier d'élèves pouvait être notre harceleur et ça me frustrait énormément. Je me mis à décortiquer les cliques. Il y avait les «intellos» comme Castiel les appelait si bien ; les gens banals, ceux que tu croises à tous les coins de rue, mais qui peuvent changer ta vie ; les populaires qui regroupaient mes nouveaux amis, Castiel ainsi qu'Ambre et substituts ; les sportifs, soit les chouchous de la prof d'éducation physique qu'elle ne se donne pas la peine de bitchslapper ; les faux sportifs, en gros ceux qui croyaient pouvoir devenir populaire même s'ils sont nuls ; les rejets rejets, ceux que tout le monde ignorait sans vraiment savoir pourquoi, pourtant ça avait toujours été mes préférés ; les rejets asociales, les incompris, les artistes de l'âme, ceux qui nous intriguent, les ténébreux mystères, appelez-les comme vous voulez, mais moi je dis les criss de bêtes qui ont pas d'allure... bon ok, un criss de bête qui a pas d'allure et qui fait de l'attitude ; puis les outsiders, ceux qui ne rentraient dans aucune catégorie donc moi.
Je me retournai vers Alexy qui remplissait les pages en ayant discrètement un écouteur dans son oreille droite ce qui me fit rire. J'aimais son audace. Mon regard tomba sur Castiel. Il avait un casque d'écoute sur la tête et il griffonnait sur une feuille mobile ce que j'imaginais être des paroles de chansons. Il avait sûrement du sortir sa menace habituelle : « Si vous avez un problème avec moi, vous en avez un avec la direction aussi. La famille avant tout. »
Le nombre de fois dont il s'était sortie du pétrin avec ces deux phrases-là était inimaginable. Moi, c'était plutôt la technique «sort de la classe et ne regarde pas en arrière pour voir qui te suit».
L'avantage d'être comme moi, une outsider, était de pouvoir remarquer tous les détails que les «insiders», comme je les appelais, ne voyaient pas. Par exemple, les lacets détachés du garçon à la deuxième rangée, les graffitis faits au surligneur bleu fluo sur le pupitre par le gars à côté de moi, la fierté de cette fille en avant à montrer son nouveau ombré du brun foncé au blond ou encore ce garçon au fond de la classe qui me fixait.
Je fronçai les sourcils puisque je n'en avais pas l'habitude. La première chose que je vis fit ses yeux. Des yeux extrêmement noisettes remplies secrets. Les mêmes yeux que le garçon des melons d'eau, les mêmes qu'Anonyme et les mêmes que le danseur du party. Quand il remarqua que mes yeux s'écarquillèrent, il baissa la tête avec un sourire sadique imprégné sur le visage. Il me faisait peur. Je voulais partir.
J'essayai d'envoyer des signaux à Castiel à l'aide de mes yeux, mais celui-ci était trop concentré sur son morceau. Je finis par lever la main et demander si je pouvais aller aux toilettes. J'avais besoin de changer d'air et de me rafraîchir les idées. Bien sur, le remplaçant refusa. Castiel, semblant avoir été sorti de son monde, me regarda comme s'il se moquait de moi alors que je lui tirai la langue.
Il leva sa main et posa exactement la même question que moi.
« Reviens vite. »
C'est ce qu'avait répondu le monsieur. Et qu'on me redise qu'il n'y a aucun favoritisme dans cette école. Castiel se leva de sa chaise et quitta la classe très lentement sachant que je fulminai de l'intérieur.

The bad boy who stole my roomWhere stories live. Discover now