Chapitre 4

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Après être rentrée du pub, je prends un livre dans la bibliothèque du salon avant de m'allonger sur le canapé. C'est Don Juan, de Molière. Quelle ironie. En lisant ce livre, je fais le lien avec James. Il semble être du genre à se ficher de tout, à aller de filles en filles sans jamais se soucier du regard des autres. Ni même des filles en question. C'est un manipulateur.
Je lis page après page fascinée puis finis par m'endormir. Dans mes songes, fait son apparition un petit garçon perdu sans sa mère essayant tant bien que mal d'être quelqu'un de bien.
⎯Emy.
Je me remue en grognant, voulant dormir encore un peu.
⎯Emylia, réveilles-toi.
Had se tient debout devant moi, Justin à ses côtés, un air inquiet dessiné sur leur visage.
⎯Qu'est-ce qu'il y a ? je demande d'une voix endormie. Je me suis assoupie. Cet enfant...
⎯James a des problèmes.
⎯Laissez-moi dormir et occupez-vous de lui. Vous êtes adultes.
⎯Emylia, aides-nous.
La voix suppliante de Justin me réveille davantage, je crois n'avoir jamais vu ce garçon dans cet état.
⎯Écoutes le message que Taylor a laissé à Justin, s'il te plait.
Je prends le téléphone des mains d'Hadley sans grande conviction et écoute le fameux message vocal.
⎯ « Justin, putain ! T'es où, bordel ? James a débarqué à la villa et il ne va pas bien ! Il a commencé à boire du whisky sans s'arrêter ! Il casse tout dans la baraque, putain de merde ! Dépêche-toi de rappliquer ! Et rappelle Amy ! Euh... Emy. Oui, c'est ça. Il a parlé d'elle en commençant à boire. Il détruit tout ! Venez vite ! »
Ça à l'air plutôt grave. Pas que je ne sois pas émotive ou quoi, juste, je ne sais pas trop quoi en penser.
⎯Tu vois, quand je te disais que c'était grave ! s'énerve Hadley.
⎯Je n'ai pas très envie d'y aller. Il mentionne mon nom et casse des trucs ? Désolé, mais je n'ai pas envie de m'en prendre une.
⎯Arrête, Emy, s'énerve Justin. Je ne l'ai plus vu ainsi depuis que sa mère est décédée. Depuis ce jour, lorsqu'il lui arrive quelque chose dans le genre il pète un plomb. S'il te plait, je t'en supplie, fais quelque chose.
Justin me fait de la peine, et comme il connaît son cousin mieux que moi, je me laisse convaincre.
⎯C'est bon, j'y vais. Je lui rendrais ses affaires, par la même occasion. Au fait, quel truc « dans le genre » ? dis-je en mimant des guillemets.
Justin ne prend pas la peine de répondre, ce qui m'agace. Tout autant que James, d'ailleurs. Ça doit être dans leurs gènes ce n'est pas possible. Il est vingt heures et je dois aller chez lui. Il me tape vraiment sur les nerfs.
En arrivant devant la villa, je toque et c'est Taylor qui m'ouvre.
⎯Emy ! Vas le voir, s'il te plaît. Il a complètement déraillé.
J'entends du verre se briser et sursaute. Je rentre sans perdre une seconde. En montant les escaliers, les bruits se rapprochent se faisant de plus en plus forts. Dans le couloirs comme devant sa porte, des bières sont éparpillées sur le sol. J'hésite. Je dois prendre mon courage à deux mains et aider James. Si je le peux. Je toque doucement, mais aucune réponse. Lorsque j'entends de nouveaux bruits de verres, j'ouvre la porte et James fait volte-face, son ballon de rugby à l'effigie de UW dans une main. Je remarque ses poings ensanglantés immédiatement. En voyant l'état dans lequel il a mis sa chambre, je comprends qu'il était urgent que quelqu'un intervienne. La bibliothèque est renversée, la fenêtre cassée, des affaires trainent de partout... Et tout ça pour quoi ? L'odeur d'alcool est si forte qu'elle est insoutenable. J'ai presque la nausée.
⎯Qu'est-ce que tu fous ici ?
⎯Et toi, que fais-tu ?
Il éclate de rire, et je comprends rapidement qu'il est saoul.
⎯Qu'est-ce que t'es drôle, toi, dans ton genre.
⎯Dans mon genre ?
⎯Ouais. Tu pars sauter n'importe qui quand tu le souhaites. Pas vrai Emylia ?
Je manque de m'étouffer.
⎯De quoi tu parles ? Tu te trompes de personne je crois.
⎯Fais pas l'idiote.
Je réfléchis un peu et la seule présence masculine avec qui j'ai été vu récemment est mon ami de l'université. Fait-il vraiment référence à lui ? Qu'est-ce que ça peut lui faire que je sois partie du pub avec Jack ? S'il avait été un peu plus à l'écoute, il saurait que ce dernier a une copine.
⎯Tu me fais un scandale parce que je suis partie avec lui ?
James ne dit rien et continue de taper sur tout ce qui se trouve sur son chemin. J'ai même peur qu'il s'en prenne à moi.
⎯Arrêtes !
⎯Casses-toi, Emy ! Putain, barres-toi !
⎯Ne me parles pas comme ça ! Tu commences sérieusement à me prendre la tête !
⎯Mais j'en ai rien à foutre de toi et de tes états d'âme ! Tu penses pouvoir débarquer dans ma vie comme ça et tout baiser en un claquement de doigt ?
À ces mots, je sens mes larmes monter. C'est difficile à croire et insupportable de savoir que je peux causer de la peine à quelqu'un. Ça me fait mal.
⎯James, arrêtes !
⎯Tais-toi, Emy !
⎯Tu crois vraiment que j'avais envie d'être ici ? Parler à un mec bourré qui se fout de tout à part baiser à droite à gauche, qui se bourre la gueule et qui défonce tout ?
⎯Alors dégages !
Je lui balance à la figure ses affaires que je gardais de la veille, et sors de sa chambre en courant. James m'appelle, me crie après mais je continue d'avancer dans le couloir. Toutefois, avant même que je n'atteigne les escaliers, il me rattrape et me tient fermement par le bras ce qui me stoppe net.
⎯Lâches-moi, tu me fais mal !
⎯Merde ! s'exclame-t-il en me lâchant. Pardon. Excuse-moi...
Je pleure tellement que c'en est devenu incontrôlable. James me ramène dans sa chambre espérant peut-être pouvoir me calmer. Alors qu'il m'installe sur son lit, il s'assoit par terre et regarde le sol. Je ne sais pas comment nous avons pu en arriver là, vraiment. Cela fait que quelques jours que je le connais et j'en suis déjà arrivée au stade de pleurer sur son lit. C'est rocambolesque tout ça.
⎯Qu'est-ce que tu veux, James ? dis-je en reniflant.
⎯Pardonnes-moi, Emylia.
J'essuie quelques larmes, m'approche et m'agenouille face à lui. Je lui lève la tête pour le forcer à me regarder et remarque qu'il a les yeux humides également. On se regarde pendant ce qui semble être une éternité jusqu'à ce qu'il brise le silence :
⎯Je suis désolé, Emy, ne pleures pas. Je ne voulais pas te faire mal ni t'effrayer.
Bizarrement, il a l'air moins saoul que tout à l'heure. Comme si cette dispute l'avait dessoûlé en un éclair. James essuie mes larmes à l'aide de ses pouces malgré ses blessures. Je frémis à ce contact.
⎯Je ne sais même pas pourquoi je suis venue.
⎯Je sais, je suis désolé.
Il me prend dans ses bras avant de m'aider à me lever. James nous guide jusqu'à son lit et je ne proteste pas lorsqu'il s'allonge mes côtés.
⎯James, je dois y aller...
⎯Non, ne pars pas, dit-il en me serrant un peu plus. S'il te plaît, Emylia.
⎯Tu ne veux pas que j'appelle Jessica ?
Cela m'a échappé.
⎯Ce n'est pas le moment. Tu sais pertinemment que je me fous d'elle tu es intelligente.
J'avais cru comprendre que ce n'était pas sa copine, mais j'imaginais qu'il avait un peu plus de considération à son égard.
⎯Je me fiche des gens depuis toujours, explique-t-il. L'alcool et les filles, c'est tout ce que j'ai. Quand tu as dormi avec moi hier soir, j'ai cru que tu étais comme toutes les autres. Je t'ai quand même prêté mes affaires, ce que je ne fais jamais, mais avec toi... Je ne sais pas. Je te faisais confiance. Mais je ne suis pas fait pour toi, Emy. Tu devrais rester loin de moi, vraiment.
⎯Plutôt ironique, non ? Je suis dans tes bras, là.
Il se détend et je l'entends rire. Ça me fait du bien.
⎯Emylia White, je ne me lasserai jamais de toi.
⎯Tu es bourré, tu ne sais pas ce que tu dis.
⎯Je te jure ! Jamais une fille ne m'avait regardé avec un regard comme le tien.
⎯Oui, et après tu as embrassé Jessica.
Cette situation me fait rire, il ne se souviendra de rien demain matin.
⎯Tu es très belle, tu as des cheveux bruns ondulés magnifiques. Et ta façon de me parler, en toute honnêteté, j'adore ça.
Je passe à califourchon sur lui.
⎯Monsieur Parklay, j'ai l'impression que l'alcool vous embrouille l'esprit.
⎯Pas du tout. Je sais très bien ce que je dis et à qui je le dis, mademoiselle White.
Par surprise, James me retourne et c'est lui qui se retrouve sur moi. Il m'écrase de tout son poids ce qui me fait rire. Il commence à me chatouiller et je ris de plus belle, me débattant vainement. Il a trop de force, sans doute grâce au rugby. Comment en sommes-nous arrivés là, au juste ? Dans ce lit, à rire et à se taquiner ?
James arrête son supplice et me regarde intensément, comme au centre commercial. Cela ne fait pas longtemps que l'on se connait, mais je vois bien que sous ses airs de gros dur se cache un cœur tendre. C'est quoi la suite ?
⎯Emy, je peux lire dans les pensées, tu sais ?
⎯Ah oui ? Et à quoi je pense ?
⎯Tu te demandes ce qu'on va faire maintenant. Je me trompe ?
Comment fait-il ça ?
⎯Peut-être bien.
⎯Alors regardes.
Il s'approche de moi et pose sa bouche sur la mienne. D'abord choquée, je finis par me laisser aller et apprécie ce baiser. J'ai comme l'impression que ce n'est pas un baiser quelconque. Nos bouches sont faites pour être ensemble, c'est une sensation inexplicable.
Outre l'odeur d'alcool qu'il a bu, je parviens à sentir son parfum, le même que sur son t-shirt. C'est enivrant et déstabilisant. Nous nous embrassons avec fougue sans jamais nous arrêter. Il suçote mon cou et je frissonne. Nous sommes tous les deux avides de nous toucher, de nous goûter, nos mains maladroites se baladant sur nos corps.
Lorsqu'il se dégage et qu'il me regarde, je sais que c'en est fini pour moi. James va me consumer comme je le consume en ce moment-même. Il se rallonge à mes côtés, me reprend dans ses bras et nous nous endormons ainsi.

When it all begin tome 1 (TERMINÉ)Where stories live. Discover now