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La vieille horloge sonne quatorze heures, mais j'ai l'impression que nous sommes déjà au crépuscule. Je grimace en jetant un regard sombre à la fenêtre du salon. La tempête ne se calme pas ! Que du contraire, elle prend de plus en plus d'ampleur à mesure que les heures passent. A la radio, on annonce les premiers dégâts. Je soupire. La tempête force tout le monde à rester inactif. Quelques-uns en profitent pour se reposer, d'autres pour travailler ou encore lire dans leur chambre.

Moi, je suis assise sur le canapé du grand salon. Un feu accueillant ronfle dans la cheminée. Les flammes se balancent au rythme du vent qui souffle dehors. Cela provoque d'étranges ombres sur les murs du salons, éclairés à la bougie. Pas par soucis d'esthétisme, l'hôtel n'a tout simplement plus d'électricité depuis midi.

Jane et Eleanore me tiennent compagnie. La première est assise en face de moi, elle porte une tenue d'intérieur en flanelle rose, ses cheveux sont attachés en une queue-de-cheval très haute. Les bracelets à ses poignets brillent à la lueur des bougies lorsqu'elle tourne les pages de son magazine people. Je ne comprends pas pourquoi elle lit ce genre de torchon rempli de fausses informations, mais, elle dit préférer connaître tout le mal qu'on dit d'elle

La seconde, est assise à ma droite. Elle porte un legging rose et une jupe à froufrou que nous avons trouvé dans une boutique lors d'une escapade avec Jane. Un joli t-shirt blanc complète le reste de sa tenue. Elle regarde un imagier sur les animaux. Elle est concentrée. Le petit pli entre ses deux sourcils en est la preuve.


Étonnement, malgré la situation, je me sens bien. Mon esprit vagabonde et, une scène de mon prochain roman se dessine devant mes yeux. J'attrape à ma gauche mon carnet de notes et y inscris tout ce qui me vient à l'esprit : L'orage semblable aux tirs d'artillerie, les bougies pour supporter la nuit et la mort qui rôde à chaque bombes larguée par l'ennemi.

— Regarde maman, une jolie zirafe.

Je cligne plusieurs fois des yeux. Lorsque je m'immerge dans l'imaginaire, il me faut quelques secondes pour revenir à l'instant présent. Eleanore en a l'habitude.

Lorsque je suis à nouveau dans la pièce avec elles, je baisse la tête vers son livre que je regarde. La girafe mange des feuilles d'arbres dans la savane africaine.

— En effet, c'est une jolie girafe, je murmure en souriant.

Elle me sourit à son tour, contente de partager ce moment avec moi. Elle acquiesce et continue sa lecture.

Lorsque je lève les yeux, je me rends compte que Jane m'observe en buvant son thé vert. Son magazine est posé à côté d'elle, sur l'accoudoir du fauteuil. Je ne la connais pas depuis longtemps, mais, suffisamment pour savoir que lorsqu'elle a ce regard-là, elle hésite à poser une question qui risque de mettre très mal à l'aise son interlocuteur. Elle a raté sa vocation de journaliste.

Qu'est-ce-qu'elle va me sortir ?

Elle ne cligne presque pas des yeux en me fixant. Je commence à être mal à l'aise par ce silence. Je me tortille sur le canapé.

Avec un petit sourire en coin, elle dépose sa tasse sur la table basse et s'assied au fond du fauteuil.

Je lui lance un regard interrogateur.

Qu'est-ce-qu'elle me veut ?

Peut-être pas journaliste ! Inspecteur de police. Faire avouer les coupables lui convient beaucoup mieux. Elle a déjà la technique. Je suis prête à avouer le meurtre de Kennedy même si je n'y suis pour rien !

Au bout de plusieurs minutes de silence, elle doit juger que je suis à point car elle lance :

— Tu penses quoi de notre Alexander ?

Célébrité et ConséquencesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant