5.

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Assise sur un rocher face à la mer, j'observe les vagues qui se déchaînent. Elles viennent mourir avec fracas contre les rochers, laissant l'écume comme seule trace de leur passage. Cette sorte de mousse qui ondule quelques minutes sur l'eau avant de disparaître. Le soleil passe faiblement entre les nombreux nuages. De couleur gris foncé, noirs, ils menacent de déverser sur nous des litres d'eau.

Le vent, fait voler mes cheveux autour de mon visage. Sans quitter la mer et le ballet mouvementé des vagues des yeux, je resserre mon gilet en laine autour de mes épaules. Il fait de plus en plus froid à mesure que les jours passent. D'ailleurs, cela fait quelques jours que la radio locale a annoncé l'arrivée d'une tempête qui nous touchera dans les prochaines heures. Celle-ci risque de faire beaucoup de dégâts dans la région.

Cela fait deux mois que le tournage a commencé. Au début, je faisais souvent la navette avec Londres. L'Écosse a été choisi pour sa ressemblance avec les paysages de mon roman. Il y a une semaine, par soucis d'écologie, j'ai décidé de limiter mes trajets, et, de venir passer quelques jours ici. C'est plus facile à faire avec une enfant qui n'est pas encore scolarisée et, un métier qui peut s'exercer partout.

— Je savais que tu serais ici.

Je commence à connaître cette voix. Il n'ajoute rien et vient s'asseoir à mes côtés sur ce rocher un peu inconfortable. Les yeux toujours vers l'horizon, je sens son regard se poser sur moi.

Du coin de l'œil, je le vois lever la main gauche et l'approcher de mon visage. Il hésite, secoue la tête et repose sa main à côté de lui, sur le rocher.

— Eleanore te réclame, murmure-t-il en observant à son tour la magnifique vue qui s'offre à nous.

— Elle vous aime tous, je réponds en quittant les vagues des yeux.

Je tourne la tête vers lui et observe ce visage que je connais presque par cœur à présent.

Sa légère barbe de quelques jours qui le vieillit de quelques années.

Ses cheveux mi-longs noirs.

Les ridules autour de ses yeux qu'il nie avoir.

La petite cicatrice sur son nez.

Ses yeux d'un bleu profond et intense qui rencontrent les miens et pétillent lorsqu'il me sourit.


— Tu sais, commence-t-il doucement.

Mais, très vite, ses yeux bleus deviennent orageux.

— Son père n'est qu'un idiot ! Idiot d'être parti lorsque tu étais enceinte. Maintenant, c'est lui qui perd et n'a pas la chance de connaître cette enfant incroyable. Moi...

Il se stoppe, fronce les sourcils et, me regarde. Son regard s'adoucit puis il ajoute, d'une voix plus douce, presque timide :

— Je ne t'aurais jamais abandonné.

Je rougis. Ma gorge se serre. Nerveusement, je triture la manche en laine de mon gilet. Je suis mal à l'aise. Tom ne connaît pas toute la vérité.

Il ne sait pas que, je n'ai pas donné la possibilité au père d'Eleanore d'apprendre son existence avant et après sa naissance. Il ignore que le père d'Eleanore, est aussi acteur.

Bien sûr, je regrette de mentir mais, je ne me voyais pas lui dire ça si peu de temps après notre rencontre. Je ne le connaissais pas suffisamment pour me confier à lui sur cette situation particulière.

Cela aurait pu donner quelque chose du genre : « Tu sais Tom, le père d'Eleanore est un acteur très connu avec qui, j'ai couché juste une fois ». Et de rajouter en voyant sa tête : « non, non, je ne suis pas folle ».

Célébrité et ConséquencesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant