Chapitre 68 : De l'audace

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Màni

Encore une bonne chose de faite. Màni salua son frère et se laissa tomber sur le ponton en bois menant aux navires. Ils avaient passé la journée à retaper les navires et à s'assurer qu'ils étaient prêts à prendre la mer si cela s'avérait nécessaire. Et ils l'étaient. 

Màni étira les muscles de son dos et s'apprêta à rejoindre la chambre d'Aélis. Il ne rêvait que d'une chose : se reposer. Et savoir si Aélis allait bien. Depuis qu'elle avait été enlevée, il ne pouvait faire autrement que de la surveiller en permanence. Il savait que cela l'énervait sans doute mais il était trop inquiet pour elle. Il avait si peur. Si peur de la perdre une fois encore. Si cela devait se reproduire ... Il ne s'en remettrait pas. C'était son devoir de la protéger et il avait échoué déjà deux fois. Il n'y aurait pas de troisième. 

Rollon avait fait renforcer la garde autour de la cité et Màni s'assurait qu'Aélis ne soit jamais seule. Aujourd'hui, elle devait être avec Gyda. Il espérait que sa cheville aille mieux mais il avait remarqué que la jeune femme ne boitait plus et ne semblait pas particulièrement traumatisée par son enlèvement. Comme si elle s'était faite une raison ... Mais Màni ne voulait pas qu'elle se mette cette idée en tête. Aélis ne méritait pas de vivre toute sa vie dans la peur en craignant que sa demi-sœur n'envoie assassin sur assassin pour se débarrasser d'elle. Elle méritait d'être heureuse.

Songeur, il ne vit que trop tard Runa calquer son pas au sien. La normande avait tressé ses longs cheveux dans son dos en une natte serrée et elle affichait un grand sourire sur ses lèvres. Leur dernière conversation s'était plutôt mal terminée et Màni avait espéré que Runa se lasse. Apparemment, ce n'était pas le cas.

- Comment vas-tu ? lui demanda-t-elle, engageant la conversation. C'est à peine si l'on se voit ... Tu m'évites depuis le retour d'Aélis ...

Était-ce si surprenant de sa part ? Il savait parfaitement ce que Runa espérait de lui mais lui ne partageait pas ses sentiments. Prendre ses distances était la meilleure chose à faire. Pour Runa ainsi que pour Aélis. Il ne voulait pas lui faire de la peine alors qu'il n'y avait plus rien entre la châtain et lui.

- Je tenais à te remercier, lui dit-il néanmoins, mettant de côté sa crainte qu'elle ne développe de trop forts sentiments pour lui. Ton talent de pisteuse nous a été très utile. Sans toi, je ne suis pas certain que j'aurais réussi à la retrouver.

- Si je l'ai fait, c'est pour toi Màni.

Oui il s'en doutait bien ... Il ne répondit pas, avançant d'un pas rapide. Quand comprendrait-elle qu'eux d'eux s'était terminé ? Depuis bien longtemps déjà en ce qui le concerne.

- Mais pourquoi m'évites-tu ?

- Tu sais pourquoi ...

- J'ai préféré te confier mes sentiments à ton égard. Je ne peux pas les ignorer, Màni. Et je sais que toi non plus.

- Runa ... Je t'ai déjà dit que ...

- Je te vois, Màni, le coupa-t-elle. Et tu n'as pas l'air ... comblé. Tu sembles même frustré.

Frustré ? Il ne l'était en rien !

- Je ne le suis pas, démentit-il.

- J'imagine qu'elle est très prude ... Quoi de plus normal ? C'est une chrétienne. La pauvre ne doit pas savoir s'y prendre. Elle doit être incapable de satisfaire pleinement un homme. Surtout un homme tel que toi ...

Que sous-entendait-elle ? Màni n'aimait guère ses insinuations.

- Tu ne sais pas ce qui se passe entre nous.

L'oiseau sans ailes (Tome 1)Donde viven las historias. Descúbrelo ahora