L'oiseau sans ailes (Tome 1)

Chapitre 12 : "Le sang sacré renaîtra"

Lothaire

Lothaire avançait d'un pas lent, tenant son cheval par les rênes. Cela faisait plusieurs jours qu'il était à la recherche d'Aélis mais toujours sans résultat. Rien, pas un indice. Rien du tout. Mais si rien ne prouvait qu'elle était morte, rien ne prouvait aussi qu'elle était vivante ... 

Après les informations du Père Godric qui lui avait assuré qu'Aélis ne s'était pas rendue au monastère de Saint-Julien, le jeune homme avait décidé de suivre la rivière. Judith avait dit qu'Aélis était tombée dans la rivière ... Elle n'avait pas précisé où et c'était bien l'indice manquant à Lothaire. Pourtant, il avait entrepris ce long périple, s'arrêtant dans tous les villages, monastères ou abbayes bordant la rivière. Mais tous lui avaient donné la même réponse. Personne n'avait vu ou aperçu aucune étrangère. Rien du tout. Et plus Lothaire avançait, plus il doutait de retrouver Aélis ... Elle semblait avoir tout bonnement disparu ... Comment était-ce possible ? Non. Il ne devait pas perdre espoir. Il allait la retrouver. Il le fallait.

Son cheval s'ébroua, ramenant Lothaire au présent. Il continua à avancer, sans grande conviction. Il était maintenant au bord d'un grand précipice et il ne savait pourquoi mais cet endroit l'interpellait. Si Aélis était tombée ... C'était peut-être ici ... Malheureusement pour lui, la pluie et les feuilles d'automne avaient recouvert toutes traces de passage. Lothaire poussa un long soupir de dépit. Que faire maintenant ? Il se faisait des idées. Pourtant, il n'abandonnerait pas. Jamais. Même si elle n'était plus, il devait au moins lui offrir une sépulture.

Soudain, son œil fut attiré par un reflet métallique. Le brun posa une main devant ses yeux, surpris. Il noua les rênes de son cheval autour d'un arbre et s'approcha au bord du précipice. La rivière grondait en contre-bas. Lothaire s'agenouilla dans l'herbe et récupéra l'objet en fer qui renvoyait la lumière du soleil. Il n'osait y croire ... C'était le poignard d'Aélis ... Celui qu'elle avait pris avant de fuir le Mans ... Alors c'était ici qu'elle était tombée ... 

Lothaire s'approcha au bord du précipice, jetant un bref regard vers le vide. Il ne voyait aucune trace de la chute de son amie mais comment le pourrait-il ? La violence de l'eau avait tout emporté. Il frémit en imaginant Aélis tomber ... Grand Dieu ... Comment aurait-elle pu survivre à une telle chute ? Ses mains se mirent à trembler autour du pommeau du poignard. Mais ce poignard était son seul espoir.

Il ne devait pas s'attarder. Les bois n'étaient pas sûrs en ce moment et Lothaire n'avait aucune envie de se retrouver nez-à-nez avec les hommes du Nord qui n'avaient toujours pas quitté la région. Certains villageois disaient même qu'ils avaient commencé à ravager et piller quelques villages alentours, sans doute pour se nourrir. Et comme Drogo refusait de les payer ... Leur seul espoir résidait dans ce messager envoyé par Judith au roi de Francie. Si le roi les aidait, ils avaient une chance. Ou Drogo devrait attaquer de front. Mais Drogo non plus n'avais jamais été un grand combattant. Il était trop lâche. Jamais il n'avait levé son épée.

Lothaire secoua la tête. Ce n'était pas le moment de penser aux hommes du Nord. Il revint rapidement vers sa monture et grimpa en selle. Si Aélis était tombée ici, le courant l'avait donc emportée vers le sud ... Lothaire fouilla dans sa mémoire. Il y avait quelques villages mais aussi une abbaye ... Sainte-Catherine si sa mémoire ne lui faisait pas défaut. C'était par là qu'il allait commencer. Car Aélis était vivante. L'inverse était tout bonnement impossible. Et son devoir était de la retrouver.

Il donna un coup de talon à sa monture et continua son chemin, le cœur ragaillardi d'espoir.

*                *               *

Aélis

Je nouai mes mains autour de la chaîne qui enserrait ma cheville. Que craignaient-ils ? Que je ne décide subitement de m'échapper ? Je ne pouvais nier que j'y avais songé mais comment faire ? Il y avait des guerriers partout autour de moi ! Ce serait du suicide ... Et je n'étais pas si pressée de mourir après avoir échappé de peu à la mort.