Chapitre 85 : La marche à la guerre

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Aélis

- Ceux de mon époux.

Comme je m'y attendais, ce fut un véritable capharnaüm. Les nobles se levèrent tous vivement de leurs sièges, pointant des doigts accusateurs vers moi. Tout comme le roi qui m'invectivait de tous les noms, me sommant de nommer le nom de cet homme. Seul mon père ne bougea pas, ni même Robert. Ce qui était étonnant le concernant. N'avait-il pas proposé de m'épouser ? Apparemment, le fait que j'en ai épousé un autre ne semblait nullement le gêner. Ou alors pensait-il que c'était lui que je nommais ainsi en vue de notre éventuel mariage ?

- Votre époux, ma cousine ? Qui est cet homme ? Dois-je vous rappeler que vous êtes en deuil ?

- En deuil d'un homme qui a essayé de m'occire plusieurs fois ? Non, je ne le suis pas. Je célèbre sa mort au contraire.

Un murmure offusqué s'échappa des lèvres de l'archevêque.

- Qui est cet homme ? répéta le roi.

- Màni Erikson.

- Un normand ? Vous avez épousé un homme sans âme, un païen ?

Les exclamations reprirent. Je jetai un regard vers ma louve et lui fis signe de hurler. Elle s'exécuta et un long hurlement résonna sous les voûtes de pierre, ramenant le silence dans les rangs. Le comte de Paris n'avait toujours pas bougé, les mains posées sur ses genoux croisés.

- J'ai épousé l'homme que j'aimais. Et oui, c'est un normand.

- C'est inadmissible ! s'écria le roi. Vous êtes ma cousine ! Vous avez besoin de mon autorisation pour épouser un homme !

- Avez-vous donné votre autorisation pour que j'épouse Drogo ? Non. Avez-vous fait quoi que ce soit quand vous avez appris qu'il voulait me faire tuer ? Non plus. Vous m'avez toujours ignorée alors ne prétendez pas avoir un droit de regard sur ma vie.

- Ce mariage sera annulé !

- Vous oseriez défaire ce qui a été scellé devant Dieu, Notre Seigneur Tout Puissant ? Aucun homme, pas même un roi, ne peut s'opposer à la parole divine !

- Sire, ce ne sont probablement que des mensonges ! s'exclama Haganon. Elle ne peut ...

- Nous nous sommes mariés dans une chapelle consacrée, en présence d'un prêtre et devant témoins. Notre mariage est valide.

Mon père se leva alors de son siège sous mon regard insistant. À son tour d'entrer en scène.

- Je peux l'attester sur mon honneur, Majesté, car j'étais présent à ce mariage. Les vœux ont été échangés et les époux liés devant Dieu. La mère d'Aélis, Dame Hildegarde, pourra elle-même corroborer mon histoire.

Le roi regarda mon père sans comprendre, estomaqué.

- Comment avez-vous pu laisser faire cela ?

- Dame Aélis est mon invitée depuis des mois et j'oserais même dire que je la considère comme ma fille.

Personne ne devait savoir pour notre lien de parenté sinon je n'aurais plus aucune légitimité pour réclamer le Maine, étant une bâtarde. Pourtant, les mots de mon père m'allèrent droit au cœur.

- Je pensais que cela vous plairait, Majesté. Après tout, nous sommes tous frères désormais. Grâce à votre concours, nous avons rétabli la paix. Qu'une franque épouse un normand scelle une alliance encore plus durable. Une alliance qui prouvera que vous êtes un grand roi tolérant et juste.

Mon père savait manier les mots avec habileté apparemment. Il savait flatter le roi pour que celui-ci accepte plus facilement et, au vu du regard brillant de mon cousin, son plan fonctionnait à merveille.

L'oiseau sans ailes (Tome 1)Where stories live. Discover now