Paladins

Chapitre 10

Le lendemain, Keith avait de nouveau disparu. Lance ne parla pas aux autres de la veille et Veronica fit de même. Hunk, Pidge, Shiro, Allura, Coran et Romelle s'inquiétaient, mais il se refusait à leur révéler qu'il avait vu Keith. Il aurait l'impression de trahir un secret, comme si un accord tacite de ne pas parler de cette nuit avait été passé. Noir restait dans le hangar avec Jaune, deux grosses peluches colorées, tandis que chacun essayait de s'acquitter de ses tâches sans penser à la possibilité que Keith avait peut-être des problèmes.

Lance aussi tenta de ne pas y penser et, n'ayant pas eu l'occasion de s'entraîner réellement depuis la mission, décida de se rendre aux stands de tirs. Il y passa la matinée, concentré sur ses cibles. Il essaya plusieurs des différentes armes disponibles, se décidant finalement sur un pistolet plus ou moins semblable à son bayard. Il continua uniquement avec celui-là, grimpant rapidement dans les différents niveaux de difficulté. Plus cela allait, plus les cibles étaient petites et bougeaient vites. À vrai dire, il gravit la moitié des niveaux avant de rencontrer de réelles difficultés à toucher les cibles. D'autres personnes qu'il ne connaissait pas vinrent s'entraîner elles-aussi, mais la plupart ne restait qu'une heure ou deux, repartant sans un mot, ou bien discutant entre elles. Elles ne s'approchaient pas de lui. Lance ne savait pas si cela était lié au lion rouge qui était couché sur le sol contre le mur à côté de lui, ou bien à ce qu'il s'était passé hier. Les nouvelles voyageaient vite dans ce genre d'établissement et très vite, tous ceux qui n'avaient pas été là pour assister à la scène étaient au courant de ce qui s'était passé et de ce qui s'était dit. Lance avait du mal à ne pas s'inquiéter. Parfois, il entendait des bribes de conversation lorsque les personnes discutaient, entre les bruyants coups de feu. On parlait de vivres, de jeux vidéos, de films. On plaisantait, on discutait distraitement de tout et de rien, simplement pour passer le temps. Mais plus souvent qu'il ne l'aurait fallu, Lance captait les mots « Galras », « ennemis », « Paladin Noir ». Il ne parvenait pas vraiment à reconstituer les conversations et les avis des gens, n'entendant que des mots de temps en temps, mais la fréquence à laquelle il les entendait l'effrayait. Est-ce que tout le monde était d'accord avec Griffin ? Est-ce que tout le monde était réellement convaincu que tous les Galras étaient mauvais ? Il se souvenait d'une époque où lui-aussi pensait cela, mais cela lui semblait tellement loin, comme si toute une vie s'était écoulée depuis. Et il avait obtenu la preuve maintes et maintes fois que tous les Galras n'étaient pas au service de l'Empire, que tous n'étaient pas mauvais. À vrai dire, il était convaincu que la plupart des subordonnés, les soldats, les ouvriers, n'obéissaient que par peur des représailles. Ces gens-là devaient avoir des familles, des enfants, à protéger. Lance se demandait s'il existait quelque part des villages galras, où les enfants couraient dans les rues et s'amusaient, comme il avait pu le voir sur d'autres planètes, avec d'autres peuples. Cela semblait logique. Tous les Galras ne pouvaient pas travailler dans les vaisseaux de guerre, pas vrai ? Mais jamais les Paladins n'avaient rencontré pareils endroits.

Plus le temps passait, plus Lance redoutait l'arrivée de la Lame de Marmora. Il imaginait que ses amis devaient ressentir la même chose. Il ne doutait pas que la Rébellion serait accueillie avec chaleur, surtout si Matthew Holt, membre de l'expédition Kerberos, en faisait partie. Mais il n'en était plus aussi sûr quant à la Lame. Ses membres étaient des alliés précieux depuis longtemps, Keith faisait même partie de la Lame de Marmora. Mais les Terriens n'avaient pas vécu les mêmes expériences qu'eux avec les Galras et bien que Lance comprenne une certaine hostilité, il ne pouvait pas s'empêcher de penser à ce qu'avait dit James. Il avait traité Keith de monstre. Ou du moins, avait voulu, avant qu'Allura ne l'interrompe. Il l'avait traité comme un animal, comme un ennemi, et l'avait accusé de tous les méfaits que les Galras avaient commis ici. C'était comme s'il avait oublié comment Keith avait risqué sa vie, comme eux tous, pour les protéger. Comment il avait fait face au danger comme les autres, comment il s'était battu contre son propre peuple pour assurer la sécurité de tout le monde, James y compris.