37 PART 1 - Spurn

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Quand j'y pensai : passer ces deux précédents mois à soulever, déplacer, assembler des objets lourds avait été épuisant mais m'avait pourtant évité d'être enfermé au camp. Et j'avais tenu. Sans problème de comportement face à l'autorité du chef. Les débuts avaient été catastrophiques toutefois ce qui comptait c'était la fin. La fin annoncée par le coup de siffler quotidien, celle de mes travaux d'intérêts généraux. Ça signait aussi, et avant tout, un début : de ma nouvelle vie d'adolescent. On me redonnait la chance de retirer l'étiquette de délinquant qui me collait à la peau depuis deux – trop – longues années.

J'ÉTAIS LIBRE.

La liberté me libérait d'un poids auquel je m'étais habitué alors je me sentais à présent troublé. J'avais sans doute du mal à croire que cela pouvait terminer ainsi, sans encombre. Ce sentiment étrange était de la méfiance ; je restais sur mes gardes. Et ça devait se voir car Regan se moqua ouvertement de moi quand je le retrouvai à nos casiers. Pour lui, ce n'était malheureusement pas fini. Il devait encore effectuer deux mois de TIG, son été n'allait pas être génial. Mais, ça ne l'empêchait pas de se réjouir pour moi.

- Bah alors, le prince de Burket, tu déprimes de me quitter ?!

Je feignis une profonde tristesse qui le fit rire de plus belle alors que je rassemblais mon équipement de protection. Tout ça, c'était à rendre et j'en avais fini avec cet endroit.

- Cela dit, je vais bien m'emmerder avec ces toquards, grogna Regan en jetant un regard amer autour de lui. Tu veux pas refaire une petite connerie ?!

Chassant sa stupide idée d'un geste de la main, je m'éloignai. Le problème de Regan était qu'il jugeait le mérite des autres non pas par leurs bonnes actions mais par leurs mauvaises. Il méprisait nos compagnons de TIG car il estimait que la cause de leur punition (la plupart étant condamné pour acte de vandalisme) n'était pas assez « dure à cuire ». Je lui avais maintes fois rappelé que c'était notre présence qui était révoltante et non la leur. Nous ne méritions pas une telle chance, ce n'était qu'une faveur qui nous était accordée. Il s'en fichait pas mal de cette question de justice, plongé dans son monde où les plus tenaces, les plus menaçants, gagnaient. Sa règle était simple : il ne fallait pas se laisser marcher sur les pieds en commençant par marcher sur ceux des autres. Tandis que, de mon côté, je l'avais plutôt appliquée malgré moi et je souhaitais que ça change.

Je trouvai Thomas, le responsable du TIG, et lui rendis toutes mes affaires. Il chercha longuement dans sa pochette, ou cela me sembla long en raison de mon impatience. Il me tendit ensuite plusieurs papiers et sans me regarder, il m'informa :

- Voici les papiers qui confirment ton entière présence, tes heures effectuées ainsi que l'évaluation quémandée par ton juge. À faire signer par tes parents et à rendre à ton agent de probation.

Comme un foutu devoir d'école. Je souris tout de même en imaginant la fierté de Joan, Chris et M. Travis qui s'appliquaient tant dans ma vie. J'étais certain que mon psychologue serait également content. Ce n'était pas glorifiant d'avoir fait des TIG à mon jeune âge mais, avec mon tempérament, c'était un exploit de l'avoir fait jusqu'au bout. C'était une occasion de progresser sur laquelle je n'avais pas craché. Je l'avais saisie et j'en avais tiré profit. Moi, Leander le fouteur de merde. Alors, mes parents n'étaient peut-être pas là pour signer toutefois j'espérais qu'ils en étaient quand même témoins.

Je retournai prendre mes affaires, constatant que Regan était déjà sorti. Je m'empressai de changer de t-shirt, pris mon sac et sortis du bâtiment. Je le repérai aussitôt sur le parking, près de son père et de mon oncle. Ce dernier m'accueillit avec une immense joie.

His Cheerless WayWhere stories live. Discover now