11 - Reach out

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Pensif, je me contentai de suivre le troupeau de mon aile jusqu'au préau. Les mots de Isaiah ne quittaient mon esprit et plus j'y pensais, plus son idée me paraissait réfléchie. Tout n'était pas clair dans cette histoire. Pourquoi enfermeraient-ils des jeunes dans un endroit mystérieux ? Comment faisaient-ils pour ne pas inquiéter les parents à qui l'on devait donner de constantes nouvelles ? Il y avait tant de questions auxquelles répondre ; j'étais certain que personne ne me donnerait les réponses mais je n'étais pas capable de les trouver tout seul non plus. Aucun des jeunes qui se trouvait ici ne le pouvait car c'était une situation qui nous dépassait. 

- Price, viens voir ici ! appela une voix d'adulte derrière moi. 

Price était le nom de famille d'Isaiah, alors je me retournai aussitôt. La voix avait sèche, ce qu'il y avait de plus inquiétant lorsque ça venait d'un coordinateur. Je vis mon ami approcher près des deux adultes qui géraient son aile, avec une expression légèrement craintive. Et s'il se faisait punir pour m'avoir parler ? Et s'ils avaient compris qu'il soupçonnait quelque chose ?

Ma curiosité était au maximum malheureusement je dus la mettre de côté car ce fût à mon tour d'être rappelé à l'ordre. Quand je me tournai à nouveau vers mon groupe, je remarquai que tous les jeunes avaient déjà regagné leur chambre ; il n'y avait plus que Hunter qui me regardait avec incompréhension. Je secouai alors la tête puis partis dans ma chambre comme tous les autres. Quand notre punition allait-elle finir ? Les coordinateurs n'avaient fait que récolter ce que le Sergent Blondie avait semé, la rébellion qu'il y avait eu une semaine plus tôt était justifiée. Mais évidemment ici, les règles étaient inversées : les adolescents étaient en tort tandis que les adultes avaient toujours raison. La règle primordiale était de se la fermer - chose pas si difficile pour ma part. 

Je me laissai tomber sur mon lit, m'inquiétant d'abord pour mon ami et puis me remettant à cogiter sur son hypothèse. Les effets de la drogue étaient ils de se réveiller avec l'impression d'avoir été assommé, avoir une nausée terrible, la perte d'équilibre et l'estomac retourné. A l'instar d'un lendemain de soirée un peu trop alcoolisée. Ça m'était arrivé deux fois... Si la première fois ne pouvait être causée que par Julien, la deuxième fois par contre restait sans véritable coupable. Ça pouvait être tous les coordinateurs qui avaient accès à cette sorte de drogue et qui s'en servaient à leur guise dès qu'ils ne voulaient pas prendre la peine de se préoccuper d'un adolescent trop déchaîné. 

Je me redressai d'un mouvement vif et retirai mon t-shirt afin d'examiner la moindre parcelle de ma peau. Si on m'avait drogué, il devait au moins une trace, ne serait-ce qu'une rougeur. Et effectivement je la trouvai sous mon biceps : un simple hématome à peine perceptible, mais elle était bien là. Tout cela était bien vrai...

Mais je comprenais encore moins, pourquoi M. Perrin m'avait parlé de l'aile Z s'ils ne voulaient pas que l'on en connaisse l'existence ? Ou peut-être cette aile et le lieu dont Isaiah m'avait parlé n'étaient pas le même, en réalité ?

Il n'y avait qu'un seul moyen de le savoir ; un moyen qui rejoignait mon objectif premier : entrer dans l'aile Z. Un problème que je n'avais pas envisagé jusque là s'imposait alors... Comment entrer dans cette aile et en sortir, sans que l'on me drogue pour effacer ma mémoire ? Car il n'y avait aucune utilité à y aller si en revenant, je ne me souvenais plus de rien. 


*** 


La porte de ma chambre s'ouvrit subitement, cognant contre le mur dans un énorme fracas. Je me relevai aussitôt car j'avais appris, à force, qu'une telle entrée n'était jamais une visite aimable. Et mon interlocuteur le confirma : Sergent Blondie. En le voyant armé de son sourire stupide, les bras croisés sur son torse, je me levai alors pour lui faire face. Il avait beau être beaucoup plus grand et musclé que moi, il pouvait crier comme il le voulait avec sa voix de stentor, il ne m'impressionnait pas. Sans doute était-ce ce détail chez moi qui l'énervait tant. Il régnait sur tout et tout le monde ici par la terreur mais surtout pas sur moi. Je ne disais pas être invincible, il m'était déjà arrivé de redouter quelqu'un - même des personnes plus jeunes que moi - mais pas de ce genre de connards. Mis à part ses muscles, il n'avait aucune force ; ça ne faisait que de le rendre inoffensif à mes yeux.

His Cheerless WayWhere stories live. Discover now