5 - The winger

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Lors de ma première venue, celui qui m'avait servi de mentor - et qui était très vite devenu mon ami - m'avait prévenu que la première semaine était toujours la pire. Mais je n'avais pas compris car j'avais été quelque peu chanceux et tout s'était bien passé pour moi. Les gens n'avaient pas été trop cons, avaient évité de me faire de stupides blagues et m'avaient plutôt laissé tranquille, sans doute par pitié, après avoir appris que je venais de perdre mes parents. Dorénavant, tout était différent. Je comprenais enfin ce dont il voulait parler. La pemière semaine était bel et bien la pire, du moins j'espérais que les prochaines semaines n'allaient pas être plus mauvaises que celle-ci... Une semaine interminable, pénible, épuisante. Jeff toujours sur mon dos. Et personne à mes côtés.

Je m'étais pourtant déjà habitué au rythme du camp : réveil à 7h du matin, cours de 8h à 14h et le reste de l'après-midi consacré aux sports - que je n'avais pas pu pratiquer jusque là à cause de mon « mauvais état d'esprit ». Sergent Blondie avait cru me priver de quelque chose en me donnant cette punition mais il m'avait en fait, sans le savoir, délivrer d'une lourde tâche. Ça m'arrangeait car contrairement aux autres garçons, je n'étais pas très sportif. Ce n'était pas que je n'avais pas les capacités, ça je n'en savais rien, j'avais pas vraiment essayé mais seulement ça ne me plaisait pas. Je trouvais le sport assez bête, il ne faisait que ressortir notre fierté bestiale. Alors, ces sept derniers jours j'avais passé les trois heures sur les gradins, à regarder sans intérêt ceux qui se tuaient au base-ball, ceux qui donnaient tout dans leur match de rugby et enfin les plus nombreux dévoués au football - américain bien sûr. Il y avait aussi un plus petit groupe qui alternait entre course et musculation mais ça ne m'intéressait pas davantage.

Alors quand ce Lundi après-midi, nous étions arrivés sur la pelouse et que l'on m'avait demandé ce que je voulais faire, je ne sus pas que choisir. Toutefois j'avais sentis le regard du gros Ben peser sur moi et dans sa fameuse équipe de base-ball, j'avais reconnu les quelques mecs qui s'en étaient pris à moi, dans la cantine une semaine auparavant. J'avais donc compris qu'ils représentaient alors les petits chefs du camp - comme il y en avait toujours eu - ceux qui se croyaient tout permis, ceux qui faisaient régner leurs propres règles. En clair, ceux qu'on affronte ou ceux qu'on rejoint. Cette situation ne m'avait pas fait peur, au contraire : je m'étais déplacé vers Ben, leur montrant que je n'allais pas les fuir. Je ne les rejoignais pas non plus, malgré ce qu'ils pourraient penser, : j'affrontais.

Une heure était passée. On avait insisté pour que je tente de taper à la batte; c'était donc ce que j'avais fait sans réussir à atteindre aucune balle. J'avais ensuite été mis de côté pour la deuxième heure avec l'ordre « d'apprendre en regardant ».

- Attention ! s'écrièrent soudainement plusieurs voix.

Automatiquement, je tournai la tête en direction des cris et d'en l'air, je vis un objet ovale arriver à toute vitesse sur moi. Ce fut presque inné, je plaçai mes mains en coupe et réceptionnai aisément le ballon de rugby quand il arriva contre mon torse. Je le renvoyai au mec, à plusieurs mètres qui courait vers moi et qui était d'ailleurs le mystérieux métisse aux faux yeux verts. Il n'avait plus tenté de venir me parler depuis, se contentant de traîner avec ses amis. Et c'était compréhensible ; je n'étais pas la meilleure compagnie qu'il pouvait trouver ici. Quand il eût réceptionné son joujou, il me fixa avec un air étonné mais je n'y fis pas plus attention, me concentrant à nouveau sur les entraînements de base-ball en face.

- Attrape ! l'entendis-je me dire.

Je tournai à nouveau la tête vers lui. Il avait déjà relancé le ballon, celui-ci me fonçait à nouveau dessus avec une précision remarquable et une force impressionnante. Je me relevai et le récupérai en l'air tandis que le mec me rejoignait déjà. Il arriva essoufflé, tout transpirant, mais avec un énorme sourire qui en disait long.

His Cheerless WayWhere stories live. Discover now