Chapitre 8 - 1 : Doutes (Edward)

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L'obscurité. Une obscurité pesante, poisseuse. Je sentais des mains qui s'accrochaient à moi, des noms, des rires effrayants. Ces voix alentour, je les reconnaissais, et un frisson galopa le long de ma colonne vertébrale. J'étais derrière la Porte. Comment étais-je arrivé là ?

Je me débattis, noyé dans la foule insaisissable des ombres moqueuses, et avançai vers la lumière. Plus je m'approchais de la lueur, plus ces rires cristallins et diaboliques à la fois résonnaient dans ma tête. Quelque chose n'allait pas. J'avais fait une erreur. Il y avait un problème. Il fallait que je m'enfuie, que je retrouve la réalité. Je ne pouvais pas rester là. 

Je commençais à distinguer la Porte, un espoir. La poigne de ces petites mains noires me retenait, mais je parvenais à avancer à contre-courant, luttant contre la tempête des lieux. Le pire, ce n'était pas la douleur. Non, le pire, c'était la peur. Cette terreur, profonde et irrationnelle, ce chaos dans ma tête, ce puits sans fond, quand on sentait cette vérité absolue : impossible de ressortir d'ici indemne.

Ma main effleura la porte, et je me sentis encore plus bousculé.

— Lâchez-moi ! Laissez-moi partir ! hurlai-je, cédant à la panique.

Les mains me tirèrent en arrière, mais je me raccrochai à la poignée. Je sentis ma jambe se déliter, disparaître, et hurlai. Pas encore, pas ça ! J'étais palpé, tiré, déchiré. Je sentis les mains se glisser sous mes vêtements, serrer mes seins, comprimer mes côtes, s'enfoncer dans mon ventre, déchirer ma peau, s'insinuer entre mes cuisses, me pénétrer, me pétrir, me déchiqueter de l'intérieur, me détruire. La douleur était insoutenable.

Je tentai de hurler, mais les mains s'accrochèrent à ma mâchoire, plongèrent dans ma gorge en se nouant à mon cou pour m'étrangler inexorablement, m'enfonçant dans la mort. Mon front plissé, mes paupières pressées sur mes yeux imprimaient dans mon crâne l'image d'Ian Landry, du terroriste qui avait tenté de m'étrangler, mettant des visages sur cette torture inconnue. Dans mes oreilles sifflantes résonnaient les claquements des coups de feu. La mort. La mort me poursuivrait toujours. La douleur me déchira en deux, et je tombai à genoux.

Le front contre la Porte, je sentis que tout m'avait lâché, laissant mon corps entier choir au pied de mon seul espoir de m'échapper, anormalement libéré. Je me retrouvai pantelant, irradiant de douleur, couvert de sueur et de larmes. Des spasmes me parcoururent, et, au bout de deux ou trois fois, je ne pus m'empêcher de vomir. Quand je rouvris les yeux, je vis sur le sol des pierres rouges. Des pierres philosophales incomplètes. Des vies humaines que j'avais recrachées.

— Non... non, murmurai-je. Pas ça.

— Ne t'inquiète pas, souffla une voix familière, tu ne risques rien.

Je me tournai. La Vérité, juste là, avait volé mon ancienne apparence, et en voyant Edward Elric, tresse au vent, sourire moqueur, j'eus le sentiment d'avoir complètement cessé d'être cette personne.

— Ce n'est pas grave... Tu n'es plus tout à fait humain, tu sais ? fit la Vérité, me fixant d'un œil froid à travers ces yeux qui étaient autrefois les miens, souriant sans joie, sans âme.

— Je suis... humain, répondis-je d'une voix entrecoupée, cherchant à me persuader plus qu'à le convaincre. Je SUIS HUMAIN !

— Allons, ça fait longtemps que tu ne sais plus ce que tu es. Regarde-toi, regarde tes mains rouges, tes mains de tueur, et tu verras !

Les pierres philosophales avaient perlé sur ma peau, taches de sang de ceux qui étaient morts par ma main ou dans ma chair. Je les décollai du sol avec un cri, et tentai de les frotter pour en chasser le sang, qui semblait ne jamais vouloir disparaître.

Alors, dans ma paume gauche, je vis un signe noir.

Le serpent ailé qui se mordait la queue. L'Ouroboros.

J'étais un Homonculus.

Je hurlai à pleins poumons, tellement fort que je me sentis me dissoudre. 

Bras de fer, gant de velours - Quatrième partie : En coulissesWhere stories live. Discover now