Chapitre 1 - 5 : En suspens (Winry)

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Il pleuvait beaucoup moins, mais le froid restait bien présent, et mon manteau n'avait pas complètement fini de sécher, me donnant quand même hâte d'arriver chez les Curtis. Planquée sous mon parapluie, tandis qu'Al reboutonnait son manteau et revissait sa casquette à côté de moi, je vis du coin de l'œil les militaires rabattre leur col de manteau en maugréant. Il allait falloir s'habituer à ce temps comme nous nous étions habitués à leur présence... à contrecœur.

— Tu ne veux pas venir sous le parapluie ? Il y a moins de vent, donc il sera plus utile qu'à l'aller.

— Ne t'inquiète pas, j'ai ma casquette, et puis j'ai l'habitude, je passe mes journées dehors, fit-il avec un sourire rassurant, avant de voir l'expression incertaine de mon visage et se ranger à côté de moi avec l'air aussi sérieux que si j'étais sur le point de pleurer.

Peut-être que j'avais l'air sur le point de pleurer, en fait. L'attente, l'incertitude, les militaires, et ce temps morose qui n'aidait en rien, tout cela ne laissait pas beaucoup d'espoir. Nous nous mîmes à marcher en silence, devinant que les militaires nous emboîtaient le pas.

— Bon, ça ne va pas, hein ? murmura-t-il.

— Et toi, ça va, peut-être ? répliquai-je, un peu acide.

Il eut un sourire triste, et je regrettai aussitôt d'avoir répondu de manière aussi désagréable. Nous continuâmes à marcher à pas lents sur les pavés glissants, hésitant à rompre le silence troublé par les gouttes qui frappaient la toile de mon parapluie.

— Tu devrais aller à Rush Valley pour t'engager comme apprentie.

Il avait dit ça d'une voix calme, mais l'entendre énoncer comme une évidence cette idée que je n'osais pas formuler trop clairement me fit rougir d'embarras. À croire qu'il pouvait lire dans mes pensées.

— Tu crois ? croassai-je, échouant à garder un ton neutre.

— Je crois cet homme. Et je crois ce sourire jusqu'aux oreilles quand tu étais là-bas.

— Mais... si... si je partais...

— Je t'accompagnerai, répondit Al avec une mine résolue.

— Mais... tes jobs ? bredouillai-je.

— Franchement, je trouverai sûrement quoi faire à Rush Valley, répondit-il en s'étirant. Ce n'est pas comme si je cherchais quelque chose de spécifique, et puis, ils trouveront bien à me remplacer ici, j'en suis sûr ! Si un gamin comme moi peut le faire, c'est à la portée de n'importe qui.

Je coulai un petit coup d'œil vers lui, songeant que ce n'était pas parce qu'il avait l'apparence d'un gamin de dix ans qu'il n'avait pas des compétences hors du commun. Mais bon, je devais avouer que si je devais partir pour Rush Valley, je préférais ne pas être seule. Et, quitte à être avec quelqu'un, autant que ce soit une personne qui me connaisse bien et me comprenne. Cette idée était donc très réconfortante, et ne pas devoir chercher comment aborder le sujet était un gros soulagement pour moi. Malgré tout, il restait une question en suspens, qui, plus que les autres, me préoccupait.

— Tu es sûr d'être prêt à partir ? Si... s'il revient...

— Il ne reviendra pas.

Net comme une coupure au cutter. Sans colère, sans tristesse apparente. Sa phrase me fit pourtant un coup au cœur. Sans doute parce qu'il avait dit ce que je n'avais pas envie de croire depuis des jours.

— Mais, qu'est-ce qu'on en sait ?

— Ça fait vingt jours qu'il est parti, et on n'a eu aucune nouvelle à part cette carte. Il ne compte pas nous contacter pour le moment, et s'il veut le faire plus tard, il trouvera bien une solution. Sig Curtis aura notre adresse, les militaires aussi, ce n'est pas comme si nous allions être difficiles à trouver.

Bras de fer, gant de velours - Quatrième partie : En coulissesWhere stories live. Discover now