Chapitre 19 : Phoenix

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     Je suis réveillé par les premières lueurs du jour. J'ouvre péniblement les yeux et découvre la source de toute cette lumière. La tente est restée entrouverte pendant la nuit, laissant entrer la fraîcheur et l'humidité.

     À ma droite, Benji dort toujours. Ses bras sont enlacés autour de mon buste et sa bouche est à demi fermée. Je balaye les mèches qui lui barrent les yeux. L'une d'elles rebondit sur sa tempe, me faisant sourire. Dérangé par mon geste, il resserre son étreinte et enfouit son visage dans mon cou. Je glisse une main le long de son dos, lissant son tee-shirt, et atteins son cul étriqué dans son boxer. Ce même boxer dans lequel je l'ai touché hier soir.

     Je grogne de sommeil et de satisfaction en effleurant la chute de ses reins. Puis quand j'en ai marre d'être le seul réveillé, à moitié écrasé sous son poids, je lui agrippe fermement une fesse. Benji remue contre moi et lâche un son plaintif. Comme il n'est pas facile à sortir du lit, je renforce ma prise sur sa chair. J'y enfonce mes ongles et lui dis à l'oreille :

     — Tu feras gaffe, un ours en a après ton cul.

     Son rire étouffé bourdonne dans mon cou. Subissant une autre attaque, Benji me pince le flanc.

     — Un ours m'en aurait déjà arraché un bout, marmonne-t-il contre ma peau.

     — Ou alors il joue avec sa nourriture. (Je penche la tête et lui mords l'épaule à travers son tee-shirt) Je ne suis pas assez souple pour atteindre ta lune.

     Benji me suit dans ma connerie et on se bidonne paresseusement. Quand il se redresse enfin, ses cheveux sont aussi frisés que la laine d'une brebis. Il passe une main dedans et peine à la ressortir. Je les lui plaque en arrière et écrase ma bouche sur sa joue.

     — Il est quelle heure ? me demande-t-il alors que je fouille mon sac.

     — Tôt. (Je sors des fringues en refoulant un frisson) Et il pèle !

     Je résiste bien au froid, mais j'ai mes limites, comme tout le monde. Étant trop grand pour tenir debout dans la tente, je me rallonge pour m'habiller. Après avoir enfilé un pull, je me tortille tel un asticot pour me glisser dans mon pantalon. Benji s'est enroulé dans le duvet, seule sa tête en sort, lui donnant l'air d'une larve de libellule.

     — Habille-toi, je vais faire du café, je le préviens avant de sortir.

     L'eau bout depuis cinq bonnes minutes quand je suis enfin rejoint par Benji. Changé et couvert de son manteau, il s'assoit en face de moi à même le sol. Il rabat la capuche de son sweat sur sa tignasse emmêlée et accepte une tasse de café soluble. Ce dernier est plutôt crade, mais il nous réchauffe.

     On mange en silence en observant la nature qui se réveille en même temps que nous. Les oiseaux se mettent à chanter dans la forêt aux mille couleurs, les feuilles d'érable bruissent dans le vent, les branches grincent, le courant de la rivière résonne dans la vallée...

     Après avoir repris des forces, j'éteins le feu de camp pour aller sur la berge. Retirer mes fringues me demande du courage. Je grelotte tout en m'avançant à poil sur les galets. Quand je mets les pieds dans l'eau, sa température glaciale m'attaque les jambes et me contracte les fesses.

     — Bordel de merde, elle est gelée !

     Sachant que je dois y aller d'un coup, je plonge tout entier et émerge en m'ébrouant. Un éventail de gouttelettes fusent tout autour de moi. Sur la berge, Benji rechigne à suivre mon exemple. Il examine la rivière avec distance avant d'aller s'asseoir sur un gros rocher. À l'abri du vent, il m'observe me laver.

ROCKBURY - Le poids de nos secretsWhere stories live. Discover now