67. I love your daughter Mr. Jonhson

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Manon

Il pousse la porte, laissant ainsi l’air frais de la nuit pénétrer la cuisine. Mon regard vagabonde jusqu’aux multitudes espèces de fleurs qui balancent au rythme de la brise nocturne. J’essaie de photographier ce paysage dans ma mémoire pour en faire bon usage plus tard. Le claquement du verre de mon père sur le marbre du plan de travail nuit à ma balade mentale. Son attention pesant sur nos mains jointes, nous pousse à nous séparer.  

― Vous savez ce que vous faites, j’espère.

Son ton est dur.

Je me mets à compter mes doigts vu qu’il ne semble pas attendre une réponse. Il met une éternité avant d’ajouter sa seconde phrase.

― Bien que vous ayez l’air de filer le parfait amour, je suis contraint d’interpréter votre silence pour un manque de certitude.

Il se retourne lentement vers Ayden.

― J’ai vu Manon souffrir durant huit semaines, un vrai désastre. Elle m’a sorti des sourires fabriqués, huit longues semaines à cause des conneries d’un gamin. Je ne pouvais rien faire d’autre que de la regarder sombrer. T’as aucune idée d’à quel point j’ai souffert. Je te laisse deviner qui est ce gamin.

Je te laisse deviner qui est ce gamin! Il est sérieux là?

Il lui parle avec un tel mépris sans élever la voix que j’aurais préféré qu’il nous gronde. Je n’aime pas ce que je ressens dans le timbre de sa voix. Quelque chose qui me fait croire que jamais mon père n’acceptera Ayden, en tout cas pas entièrement. Le pire est que j’ignore quoi ajouter pour rendre cela plus agréable à supporter.

― Je suis déso…

Il lève l’index pour qu’il se taise.

― Ne dis surtout pas que tu es désolé. C’est trop facile d’être désolé quand ça t’arrange Ayden. Laisse-moi terminer.

Merde !

J’ai envie de parler cependant je n’ai pas les bons mots. De peur d’envenimer la situation, je me mords la langue pour éviter à celle-ci de déblatérer n’importe quoi sans auscultation de mon système nerveux. Mon paternel tourne sa vue vers moi. Faites-moi disparaitre. Je mâchouille ma lèvre inférieure et baisse le regard.

― Manon est tout ce que j’ai. Elle n’est pas un jouet que tu peux démolir et remonter quand l’envie te prend. Sa plus grande faiblesse est son grand cœur. Elle ne t’en voudra jamais parce qu’elle t’aime trop. La preuve c’est qu’elle te reprend dans sa vie alors que tu l’as blessé au plus profond de son âme. Lorsqu’elle était venue te voir à l’hôpital, elle en est ressortie en larmes. Tu sais pourquoi? Parce que ton ami a jugé mieux de lui interdire de te voir. Imagine ce que j’ai appris ce jour-là?

Le tatoué, déchiré par les mots de mon paternel, baisse la tête de honte et de regret. Je ressens de la peine pour lui cependant mes dents saignent ma langue pour m’éviter d’intervenir dans cette conversation. Je m’appuie sur un pied, le regard voyageant entre les deux hommes.

Au bout d’un instant, j’attrape une étrange maladie de l’œil car je vois Ayden pudibond. Ces oreilles, son visage tournent rouge hélianthine. La lumière électrique me laisse entrevoir un filtre nuageux sur ses pupilles. Mon Dieu, c’est iconique. Ayden, atteint dans ses tripes, est sur le point de pleurer.

Les larmes chutent de ses paupières et se meurent sur le sol.

Ayden pleure.

Mon cœur se met à danser sous le rythme de la douleur. Ces deux gouttes de larmes me baignent dans la tristesse. Je souffre au moins autant que lui. Mais je suis apaisé par cette souffrance. Alors vous vous demandez certainement comment une personne peut être apaisée par la souffrance, sentiment plutôt réputé pour son côté destructeur? C’est parce qu’elle ravive l’âme d’Ayden; me révèle à quel point cet homme est humain. Quelque chose se reconstruit en moi augmentant ma force, mon espoir et mon désir de l’aimer encore plus.

Streets Of YouWhere stories live. Discover now