Jeudi 17 Octobre

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Maman a disparue. Comme elle le fait toujours. Elle ne pouvait pas être là. Pourtant je l'ai vue. Je sais qu'elle a été là rien qu'un instant. Je le sais. J'avais cette envie si forte qu'elle se retourne vers moi pour qu'elle me regarde, pour que je puisse mieux la voir. Mais rien. Pas un regard, pas un sourire. Elle s'est encore échappée avant que je ne l'atteigne. Tout est resté incrusté en moi, une nouvelle cicatrice.

Pourquoi me fait-elle ça ? Pourquoi fais-tu ça, Audrey Weasley ? Je suis ta fille. Tu m'aimes. Tu as le devoir de m'aimer et de me protéger par tous les moyens possibles. Mais est-ce que tu m'aimes ? Est-ce que tu m'aimes vraiment ?

Si c'est le cas, pourquoi n'as-tu pas simplement tourné la tête ? Pourquoi as-tu fait comme si tout allait bien alors que je souffrais ? Je t'appelais, je voulais que tu constates les dégâts que tu avais faits sur moi. Si tu m'aimes, pourquoi n'es-tu pas là ? Pourquoi es-tu partie pendant dix ans ? Et pourquoi ne reviens-tu pas ? Qu'est-ce que tu fais encore aux mains de tes ravisseurs, comment ça se fait qu'on ne t'ait jamais retrouvée ? Papa a essayé. Mais s'il t'aimait vraiment, pourquoi ne t'a-t-il jamais cherché au point de te trouver ?

Mais moi, Maman, je t'aime. J'aurais voulu faire de mon mieux pour te protéger, retrouver ta trace. Mais pourquoi, quand tu es si proche, ne t'intéresses-tu pas le moins du monde à moi ?

Et Lucy, tu ne penses pas qu'elle t'aime ? Tu es partie si vite, tu ne l'as pas vue grandir alors qu'elle est magnifique. Maman, je ne comprends pas.

Je ne comprends rien. Tu devrais avoir été retrouvée. Je veux avoir une réponse. Quelque chose pour continuer à m'accrocher, un petit espoir, je ne demande rien de plus. Je ne peux plus vivre dans l'incertitude. Je ne veux plus douter de ton existence, passée comme présente. C'est un chagrin insupportable.

Maman, regarde-moi. J'ai tout fait pour que tu sois fière de moi mais j'en ai marre. Il n'y a jamais rien. Pas un regard, pas un sourire. Je ne comprends pas, j'ai vraiment tout fait pour toi. Tu es ma motivation, tu me tires vers l'avant. Parce que je tiens à toi.

Mais pourquoi ne tiens-tu pas suffisamment à moi pour revenir ? Si tu tiens à moi, à nous, tu aurais pu le faire, déplacer des montagnes pour qu'on puisse t'atteindre. Tu n'aurais pas été enlevée si facilement. On était bien pourtant, non ? On avait une famille si heureuse, tous les quatre. Papa, toi, Lucy et moi. Et les autres. Mais nous, on était bien plus heureux d'être tous ensemble avec toi. Tu es introuvable, un trou s'est créé à ta place depuis trop longtemps.

Maman, s'il te plaît.

S'il te plaît.

Tu me manques terriblement. Bien plus que je ne laisse tout le monde le croire. Je n'ai personne pour me prévenir de ce que c'est que l'amour. Je n'ai personne pour me raconter sa propre expérience et que j'écouterai. Je manque de personne pour me serrer dans ses bras, être au chaud et me rassurer. Je n'ai que Papa. Et Papa, même si je l'aime du fond du cœur, ne vaudra jamais pour vous deux. Tu le sais très bien, Maman.

Envoie un signe, une lettre, un indice. Qu'on sache où chercher, où te trouver surtout. Parce que j'ai peur, j'ai très peur qu'on n'y arrive jamais. Qu'il soit à jamais trop tard ou que tu ne veuilles juste pas qu'on te retrouve.

Alors que je t'aime.

Je ferai n'importe quoi pour que personne ne t'oublie jamais mais ton image parfois s'estompe et ça m'effraie. Je veux avoir de toi un souvenir parfait, net, très précis. Pour pouvoir te reconnaître dans une foule, te chercher n'importe où. Parce que je ferai n'importe quoi pour te ramener. Même l'inimaginable et le pire. Tout, quoi qu'il m'en coûte.

« James, regarde, elle a bougé !

- Tu crois qu'elle est réveillée ?

- Je n'en sais rien. Ça fait quand même longtemps qu'elle est dans cet état. Pourtant, ce n'était qu'un accident de Potion ...

- J'ai l'impression qu'elle est train de dormir. Elle paraît même assez paisible.

- Non, Roxanne a raison, je l'ai vue bouger. Je crois qu'elle est en train d'émerger.

- Un peu de silence, les enfants, c'est un lieu de repos. Vous êtes beaucoup trop nombreux !

- Vous avez dit que la famille pouvait rester.

- Mais combien êtes-vous dans la famille ? Venez à tour de rôle, débrouillez-vous comme vous voulez mais vous ne pouvez pas tous rester.

- Mais si jamais Molly se ...

- C'est bon, viens Hugo, il faut qu'on y aille de toute façon. On reviendra.

- Attends, Rose, je viens avec vous ! J'ai un devoir de métamorphose à finir ...

- On se retrouve tout à l'heure. Prévenez-nous si elle se réveille !

- On fera passer le message, ne vous inquiétez pas.

- Hé, revenez ! Elle a ouvert un œil. »

Qu'est-ce que ... ? Je mets quelques instants à réaliser que je suis à l'infirmerie, et que toute ma famille est auprès de moi, me regardant avec des yeux inquiets et heureux de me voir éveillée. J'esquisse un sourire un peu tordu. La lumière m'éblouit un peu, j'ai toujours cette impression de coton et de bourdonnement dans les oreilles mais ce n'est rien comparé à cette étrange expérience que je viens de vivre. Mais la présence de ceux que j'aime le plus au monde me fait battre le cœur d'une nouvelle manière.

Lucy tient ma main de ses petits doigts doux et quand mon regard croise le sien, j'ai l'impression d'y reconnaître celui de Maman. Elle ne me lâche pas la main, comme pour me montrer qu'elle ne me laisserait jamais partir. Et je tourne doucement la tête jusqu'à apercevoir Roxanne, de l'autre côté, agenouillée près de mon lit, portant un air sincèrement désolé sur le visage. Je souris, toujours un peu assommée. Elle hoche la tête presque imperceptiblement. Elle sait qu'elle est idiote, je n'ai même pas besoin de le dire.

Soudain plus heureuse, je referme les yeux.

Molly II WeasleyWhere stories live. Discover now