J'imagine alors une femme aux cheveux roux et au corps svelte, aux lèvres pleines, aux formes pulpeuses. J'imagine qu'elle a des seins en poires et des fesses en forme de pommes, un sourire couleur cerise, des yeux ronds comme deux prunes et une peau de pêche. Le genre de corps qu'on ne trouve plus mais que j'ai bien connu. Elle aurait une odeur iréelle aussi : savon à l'huile d'olive et lavande. Ça me fait saliver rien que d'y penser et parfois je m'arrête de parler pour l'imaginer un peu plus fort, un peu plus profondément. Elle serait habillée très chic avec un jean bleu délavé trouvé en friperie, des baskets en toile et un collier de perles. Elle aurait du maquillage sur les yeux, des billets de banque dans les poches et un chewing-gum dans la bouche.


Dans une autre vie, cette fille qui écoute et qui attend, ça aurait pu être tout un tas de gens.


Un jour où il faisait très sombre, elle m'a envoyé une balle. C'était une balle de tennis verte, mordillé par endroit qui, sorti de nul part, a roulé jusqu'au pied de mon lit. J'ai tendu la main et je l'avais tout contre ma paume. Je les reniflé et elle avait une odeur de terre. C'est comme ça que ça a commencé. C'est là que je me suis dit : « ma bonne fée, ça sent les emmerdes à plein nez».

Je lance la balle et elle rebondit. Elle revient chaque fois. Je la lance encore. Elle revient. Je la lance plus fort et elle revient encore. Je la lance et hop, elle passe par la porte, hop elle descend un étage, hop elle sort du système solaire, fait le tour de Jupiter et elle me revient. Entière, couverte de poussière. Elle en a vue du monde et des endroits. Peut-être même qu'elle a remontée le temps ? Elle a serré la main de Rooselvelt, celle de Kennedy, elle a touché le sommet del'Everest et s'est enfoui dans la lave étincellante du Vésuve.


- Tu l'as vraiment vu ?


C'est Tyreese.


- Le Vésuve, tu l'as vraiment vu ? il me demande.

- Non.

- Ah, j'ai cru. Tu le décris vraiment bien, il ajoute en me rapportant ma balle et elle tombe dans le creux de ma main.

- C'est parce que j'ai vu des images.

- Tu lisais beaucoup ?

- On peut dire ça...

- On a trouvé des livres dans ton sac mais on ne peut plus rien lire dedans, tu as écrit sur les pages. C'est pas très joli, il précise doucement.


J'ai la gorge sèche.


- C'est quoi ton livre préféré ?

- Il y en a trop.


Ceux qui sont dans mon sac, mes livres, ceux que j'ai écrit et que j'ai lu, ceux dont les pages vont s'effriter à force d'avoir été tournées et ceux dont les pages sont tâchées de ketchup et de moutarde. Ceux que j'ai perdu et ceux que je ne retrouverais jamais.


- Quel genre de livres est-ce que tu aimes, toi ? je demande à la place.

- J'aime bien les romans historiques.

- Moi aussi.

- Tiens, dit-il comme si il avait tout prévu et il me tend un gros livre à la couverture bleue. Je sais que tu préfères la poésie mais tout les reccueils qu'on a sont déjà empruntés par quelqu'un.

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