Deuxième mère

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- Viens-là, mon bébé

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- Viens-là, mon bébé.


Je ne peux rien faire. C'est comme regarder au-travers d'une armure. Elle est trop lourde. Je tiens fort la main de Lucas. Je lui tiens fort les mains alors qu'on enterre nos amis.

Nous sommes partis et revenus. On a pas trouvé le corps d'O'Connell mais Mano n'avait pas bougé. D'une manière ou d'une autre, il nous attendait.

Vincenzo a creusé la tombe. J'ai jeté le cadavre à l'intérieur et on a recouvert de terre. D'Abbie, qu'est-ce qu'il reste ? Perçy est toujours dans ses vêtements sales, tâchés d'urine et du sang de sa mère. Je ne peux rien faire. En fixant la terre meule, je revois les flammes et j'aurais préféré qu'ils partent à ce moment-là ; qu'ils se consumment avec le passé.

Cette femme ; qui tient Perçy dans ses bras, je ne la connais pas. Elle lui parle mais il ne répond pas. Il n'a même pas pu lui dire "au revoir". C'est moi qui ait mis fin à leur dernière étreinte. Je regarde les tombes, bien après qu'ils soient tous partis, et c'est comme si je ne pouvais plus lâcher la main de Lucas. Je sens qu'il parle mais je ne peux rien faire. Je peux à peine respirer. On a emmené Perçy ; on l'a laissé avec cette femme, cette étrangère, cette deuxième mère dont les seins goûtent de lait.


- On doit sortir Chris de là.


Je ne peux pas, je peux pas. C'est au-dessus de moi.

Pour une fois, j'aimerais qu'il puisse assumer sans moi.


- Allons manger, d'abord, consent Lucas. Par ici...


Ils ont dit que la centrale n'a pas implosé mais beaucoup sont morts ; que des centaines de corps ont tué l'espoir dans l'oeuf. Une horde s'est formée. Ils ont commencé à dévorer les survivants. Les autres sont montés dans le camion, et ils sont partis avec rien d'autre qu'un sac à dos. A manger, il y a du fromage pourri et des baies ; plus la corne d'abondance que représente notre camionette.

C'est la fusée de détresse qui les a alertés. Ils compatissent pour nos pertes, mais ils exigent réparation. Vincenzo, il a toujours ses deux enfants. Danièle, elle a perdu son bébé, son nouveau-né, la pupille de ses yeux. Et tout ce lait gâché qui continue de couler...

Il faut quitter la zone avant que la centrale n'explose. Toute cette région sera à rayer de la carte. Puisqu'ils ont été privé de choix, c'est comme ça. Ils ont enfermé Chris dans un cabânon et ils le frappent à tour de rôle. J'ai demandé mon tour. Je mange sans m'en rendre compte. Lucas pleure, mais ce n'est pas du deuil, c'est de la peur ; de la terreur de se sentir aussi seul. C'est vrai que ses gens ont l'air désespéré, un peu au bord de la crise de nerf, mais je me dis : "de quoi est-ce que j'ai l'air ?"

Anthologie de la finWhere stories live. Discover now