Bouts de ficelle

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- Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

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- Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

J'en sais rien.

- Qu'est-ce qui t'a pris ?

Les mains dans les cheveux, je presse mon visage contre mes cuisses.

Quand elle a ouvert le grillage, le fauteuil s'est débloqué. Projetée en avant, je l'ai fauchée et on a basculé contre le gravier. Le fauteuil s'est effondré. Par un concours de circonstances, il a entravé le portail. Pas assez pour les empêcher d'entrer, mais suffisamment pour les ralentir. C'est ce que j'ai deviné ensuite. C'est ce qu'on m'a raconté. C'est ce qui m'a laissé le temps de me redresser.

J'avais le nez fourré dans ses cheveux. Elle sentait l'odeur d'ici, celle de dentifrice. J'entendais son cœur dans son cou. Sa gorge vibrait contre la mienne par accoues. Après, je me suis rendue compte qu'elle hurlait ; et à un moment donné, il a bien fallu regarder.

- Aide-moi !

Des coups de feu retentissent. Les lumières crépitent dans la nuit.

Au moins, maintenant, j'en ai, des étoiles.

La Créature tire sur mes jambes mais je n'ai rien senti. Ses bras sont squelettiques ; les os transparaissent par parcelles sous la peau dont des morceaux, longs comme des langues, s'agitent à chacun de ses mouvements. En rampant, elle s'écorche vif. Les tendons et les nerfs rompent dans des craquements secs. C'est le bruit ou bien l'odeur qui me rappelle Thanksgiving. 

Ma main agrippe sa nuque et je l'amène à moi. Ses doigts se tendent, ses ongles gémissent, mais c'est trop tard pour lui. Assise ou debout, je sais comment faire. Mes doigts tâtonnent par terre. Vite, une pierre ! Il se fait pressant, entreprenant. Sa mâchoire claque et toujours rien dans ma main. Je le repousse. Il m'agrippe. Je le frappe. Il m'écrase. Sa main caresse ma joue.

Beth lui écrase la cervelle.

Elle debout

Moi à terre

Du gravier est resté accroché à sa lèvre.

Deux autres arrivent. Beth frappe. Dans la nuit noire, je devine l'éclat d'un poignard. Beth frappe. Je tends la main pour récupérer ma chaussure mais elle me saisit par les épaules. Elle me traîne en arrière et j'en vois d'autres. Cinq, six, dix ! Et sous ma main, toujours rien. La terre a été retournée. Ils ont enlevé les pierres pour planter. Entre mes doigts filent de minuscules cailloux. J'en ai un, dans le creux de ma main : gros comme une dent.

La terre se niche sous mes ongles.

Et j'aimerais qu'on les enterre ceux qui l'on rendue si artificielle.

Cette fois, c'est une femme. Il lui manque les deux yeux. Ça arrive parfois, avec les corbeaux. Ils ont toujours plus à y perdre qu'à y gagner. Ils ont beau être rapides, ils évaluent très mal le niveau de décomposition de la chair. Leurs serres s'enfoncent et se figent. Ils finissent en dinde de Thanksgiving.

Anthologie de la finWhere stories live. Discover now