OS72 Leçon

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Séraphin ouvrit les yeux et se retrouva dans le noir complet. Peut-être importe où il regardait, tout n'était que noir. Mais à vrai dire, il ne sentait pas plongé dans le noir. Il voyait du noir tout autour de lui. Du vide. Il voyait le vide et pourtant, ne s'en affola pas. C'était confortable, toute cette obscurité. Rassurant. Comme une immense couverture de chaleur et de protection qui s'enroulait autour de lui, agissant comme un bouclier face à la réalité. Il s'y sentait bien.

Il se mit à marcher. Il ne savait pas vraiment où il allait, il marchait simplement. Il n'y avait rien, pourtant, il savait dans quelle direction il avançait. Il n'aurait su expliquer pourquoi, ni comment. Il avançait.

Il ne sentait pas le temps passé, mais avait conscience du temps qui passait. Il n'avait aucune idée d'où il pouvait bien se trouver mais les lieux étaient familiers. Il n'y avait aucune odeur, aucun son, seulement celui de sa respiration et de ses pas, et pourtant, il décelait tout autour du lui, des couleurs au noir. L'obscurité se paraît d'arabesques qu'il imaginait et de motifs qu'il dessinait avec son esprit. Il ne savait pas vraiment si c'était normal, mais il n'avait pas vraiment peur. Il était serein.

Il avançait encore. Il ne savait pas vraiment pendant combien de temps il avança. Cette notion lui semblait lointaine et la réponse à l'interrogation, très futile. Pourquoi avoir besoin d'une unité de temps quand celui-ci même semblait inexistant ?

Puis, finalement, il se stoppa. Il ne savait pas pourquoi. Il s'était arrêté. Et avait fixé le noir devant lui, les sourcils froncés. Rien ne changeait, tout était encore plongé dans ce noir profond et envoutant, mais il lui sembla discerner une lueur. Une vraie lueur, pas quelque chose que son esprit aurait inventée. Intrigué, il observa le point avec plus d'attention. Il y avait bien une lueur. Faible, fragile et tremblotante, mais bien présente. Il s'approcha et pris la flammèche dans ses paumes. La lueur s'était changée en flammes, toutes petites langues de feu qui lui léchaient la peau sans le brûler. La chaleur était même agréable.

Pris de compassion pour ce petit feu qui peinait à rester vaillant, il souffla dessus. Les flammes grandirent, s'intensifièrent, flambèrent, avec des reflets chauds qui semblèrent le remercier. Il souffla dessus de nouveau. Le feu prit encore du volume. Séraphin éloigna les paumes de son visage, tendit les bras devant lui, et souffla une dernière fois. Les flammes s'envolèrent, comme une poignée de poussière et Séraphin crut qu'elles allaient se dissiper. Cependant, elles se rassemblèrent quelques instants en une même point, avant d'exploser silencieusement et gracieusement en tous sens. Deux silhouettes prirent la place du feu chaud et Séraphin écarquilla les yeux. Des visages familiers apparurent, des expressions, des sourires et des étoiles dans les yeux. Il les reconnut facilement, mais ne réagit pas immédiatement. Soudain, le noir semblait avoir reculé, comme pour laisser la place aux deux nouveaux venus. Il les voyait parfaitement, mais aucune lumière n'était apparue. La lumière semblait émaner d'eux, et en même temps venir de l'extérieur pour les éclairer.

Puis, Harold sourit, Krokmou écarta quelque peu les ailes avec enthousiasme et Séraphin n'hésita pas plus longtemps. Il courut, serra dans ses bras son héros Viking. Il avait de nouveau envie de pleurer. Quand tout lui semblait fini, voilà qu'il apparaissait à nouveau. Harold rit, lui rendit son étreinte et Krokmou roucoula gaiement et battant des ailes. Il lécha les cheveux de Séraphin et celui-ci étouffa un sanglot, avant de caresser le dragon qui ronronna de plaisir.

Finalement, Séraphin recula d'un pas et s'essuya les yeux avec sa manche. Harold posa une main sur son épaule, l'autre reposant sur le côté de la tête de son compagnon à écailles. Ainsi, le duo semblait noble et inébranlable.

-Ce n'est pas parce que l'histoire est terminée qu'elle doit prendre fin, dit Harold.

Séraphin ne sut quoi répondre. Harold sourit de nouveau, avant de grimper sur Krokmou, qui le fixa un bref instant. Finalement, le duo se retourna et s'envola avec grâce, agilité et puissance, emportant la lumière avec eux.

•••

Séraphin se réveilla calmement. Il réalisa facilement que tout cela n'avait été qu'un rêve, mais sourit tout de même. Durant ses aventures, Harold Haddock lui avait enseigné à lui, et à d'autres, des valeurs. Loyauté, honnêteté, courage, persévérance. Lui avait montré la puissance de l'amitié, de l'amour, d'un groupe soudé et solide. Lui avait fait découvrir le ciel, la sensation de voler. Lui avait offert un refuge où il pouvait se cacher et partager. Et surtout, Harold Haddock lui avait appris la plus belle et la plus importante des leçons de vie : rien ne se terminait vraiment jamais.

Where No One GoesDove le storie prendono vita. Scoprilo ora