Chapitre XXXV : Le Récit du Lion

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Le garde blessé demeura inconscient pendant deux jours entiers. Au matin du troisième jour, on m'informa qu'il avait reprit connaissance et qu'il attendait mes soins.

Chargée de bandages propres et de désinfectant, je me dirigeai vers la chambre du garde avec plus d'enthousiasme que nécessaire. J'avais en réalité assez hâte devoir à quoi il ressemblait et comment il avait été blessé. Les médecins n'avaient pas voulu lâcher le moindre mot à ce sujet.

Le silence était absolu dans la chambre. Le blessé reposait sous les draps immaculés, parfaitement immobile, si on faisait abstraction de sa poitrine qui se soulevait à chaque inspiration. De toutes évidences, il dormait.

Je m'approchai du lit en prenant garde à faire le moins de bruit possible. Je déposai mon matériel sur la table de chevet et pris un moment pour observer le blessé.

Ces traits étaient fins. Son visage, son nez, ses sourcils, tout était d'une finesse déconcertante. Une telle finesse que je restai perplexe jusqu'à ce que je réalise que le garde était en réalité une garde. Ses cheveux courts lui avaient simplement donné une allure un peu moins féminine au premier abord. En plus de cela, elle avait l'air très jeune, sans doute pas plus âgée que moi.

"Tu comptes me regarder comme ça longtemps ?"

Je sursautai. La garde ouvrit deux yeux d'un vert surprenant. Je m'étais laissée avoir : elle ne dormait pas.

"Je..., balbutia-je sous l'effet de la stupéfaction. Je suis désolée, je croyais que vous dormiez...

-Je t'en prie, épargne-moi le vouvoiement. Je suis sûre que je suis pas plus vieille que toi."

Elle semblait s'être bien remise. Sa voix était assurée, mais néanmoins assez peu chaleureuse. Il ne manquait pas grand chose pour qu'elle bascule dans le dédain. Cependant, toute garde qu'elle était, à ce moment j'étais en position de force.

"Je m'appelle Violette", annonça-t-elle en me tendant une main fine.

Je la serrai amicalement. Les callosités à l'intérieur de ses paumes témoignaient d'un entraînement rigoureux et des heures de patrouille, arme aux poings.

"Héloïse, répondis-je. Enchantée."

Elle eut un demi-sourire et répéta en silence mon nom plusieurs fois. Je lui annonçai que je venais changer ses bandages. Elle repoussa ses draps et se laissa faire docilement. Je songeai qu'en d'autres circonstances, elle aurait probablement d'abord résisté.

Je défis les bandes qui lui couvraient les bras, le ventre, le dos, le haut de la hanche et le genou. Les médecins avaient recousu des plaies dont la taille et la profondeur variaient par endroit. A première vue, il s'agissait d'entailles, rien à voir avec des blessures dues à des zombies, donc. Mais quel genre de personne avait pu être assez stupide pour s'en prendre à un membre de la Garde en patrouille ?

"Qui t'a fait ça ? questionnai-je, réellement intriguée.

-Je n'en ai pas la moindre idée, confessa la garde. Ils étaient plusieurs, et ils m'ont sauté dessus trop vite. Ils m'ont assommée avant que je puisse voir leurs visages.

-Plusieurs personnes t'ont attaqué en plein milieu de la colonie, en plein jour ?

-Je n'étais pas en plein milieu de la colonie, réfuta Violette. Je patrouillais devant les murs."

Devant les murs ? Le mystère s'épaississait. A part la Garde, seuls l'Extérieur et quelques personnes des Ressources étaient admises hors de la colonie. Et encore, tous étaient toujours accompagnés d'au moins un garde, par sécurité.

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