Chapitre XXVII : En voiture

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"Il faut qu'on parte".

Trois paires d'yeux convergèrent vers moi. L'une, couleur noisette, était inquisitrice. La seconde, verte, était sceptique. La dernière, bleue, était stupéfaite.

"Tu vas pas t'y mettre", grommela Ludovic dont la tête reprit sa place dans ses mains.

Je devais admettre que parler de partir à cet instant relevait du crime. Mais dès lors, c'était une idée fixe. Quelque chose comme "Partir ou Mourir", une vraie devise.

"Héloïse, on était d'accord pour la maison, tenta Amandine.

-Oui, oui, je sais ! m'exclamai-je à toute vitesse. Mais ce que je veux dire, c'est qu'il faut qu'on parte de la ville !"

Silence et regards indignés suivirent mes paroles. Dans le jargon judiciaire, on appelait ça un délit de récidive. Des circonstances aggravantes, en somme.

"Je te demande pardon ?" fit Étienne en clignant des yeux.

Alors je répétais, mot pour mot, ce que je venais de dire. Je crus pendant une seconde que l'un d'entre eux allait me demander de le redire une troisième fois, quand Amandine me questionna :

"Est-ce que tu vas bien ?"

Je fronçai les sourcils. Ils ne me prenaient pas au sérieux. Il y avait de quoi, certes. Dix minutes auparavant, j'étais assise dans mon lit, à me demander ce que nous devions faire. C'était un retournement assez impromptu.

Je ne savais guère par où commencer pour leur faire comprendre que ce n'était pas qu'une idée farfelue.

"Écoutez, soupirai-je en passant une main dans mes cheveux pour dégager mon visage des mèches rebelles. Je ne sais pas vraiment combien de temps durera tout ce qu'on a... pris chez Graetz. Mais à un moment, on sera à court. Et on ne trouve plus rien en ville.

-On a déjà parlé de la question de la chasse, rappela Étienne. Ça avait pas soulevé les foules...

-Je ne vous parle pas de chasse, mais d'une autre ville où on pourra trouver des ressources.

-Comme ?

-Auxerre."

J'avais lâché ce nom avec tellement de facilité que cela ne semblait guère naturel. Au mieux, j'aurais l'air d'avoir réfléchi à mon projet, au pire j'éveillerai de cruels soupçons.

"Peut-être que là-bas, on trouvera d'autres survivants !

-Ouais, d'autres survivants qui voudront nous tuer, compléta Amandine d'un ton amer.

-Non, non ! Des survivants qui pourraient nous aider."

J'attrapai dans ma poche la clé USB et la brandis sous leurs yeux.

"Et qu'on pourrait aider aussi ! Il y a bien des centres médicaux, à Auxerre ! Un médecin, un scientifique... N'importe qui pourrait avoir besoin de savoir ce qui a déclenché cette épidémie !"

Étienne eut un geste d'abandon et se laissa tomber sur une chaise. Je ne savais pas vraiment s'il était convaincu ou simplement exaspéré par mon comportement.

"La dernière fois que tu es sortie de la ville, tu as failli te faire tuer par une bande de chasseurs", rappela Ludovic.

J'eus un claquement de langue sous l'effet de l'irritation.

"Des... Des gens, des zombies et toutes sortes d'autres trucs tenteront de nous tuer, peu importe où on va. Mais là, on ne peut pas rester..."

Je rangeai la clé qui ne semblait avoir été d'aucun secours. A la seconde où je relevai la tête, mon regard croisa les yeux verts d'Amandine et je pris peur quand elle ouvrit la bouche pour demander :

EPIDEMIA - IWhere stories live. Discover now