𝟐𝟎❁

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- Apparaissent alors sur la scène publique des femmes qui protestent contre les violences sexuelles exercées par les marines. La génération suivante, celle de 1934, a systématisé le mouvement pour les droits civils et politiques des femmes et a créé la première organisation du pays : La Ligue Féminine d'Action Sociale. Cette première association féministe d'Haïti, remplie  de militante active à pour matrice une femme exceptionnelle : Yvonne Hakim Rimpel,  une journaliste, fondatrice du journal l'Escale et une féministe, membre de la Ligue. Mesdames et messieurs veuillez applaudir chaudement Yvonne Hakim Rimpel à qui, moi Yolande Fabre, secrétaire général au cabinet ministériel de la femme et fille du président de la République souhaite remettre une plaque d'honneur et mérite à cette pionnière exceptionnelle ! Déclara fièrement la deuxième des Fabre.

Un amas d'applaudissements jaillit entre les murs de l'hôtel Ibolele, où se déroulait une conférence régionale sur la femme d'Amérique latine et des Caraïbes, tandis que la magnifique Yvonne Hakim Rimpel se dirigeait vers l'estrade prête à recevoir l'élégance d'une plaque, hommage honorifique et reconnaissance en métal. Durant son discours, Yolande s'écarta doucement, tandis que des dizaines de photographes immobilisaient chaque pas que marquait cette égérie féminine dont le charisme rappelait la Première dame. Le discours d'Yvonne ne prit même pas encore fin qu'elle se soustrait aussitôt de l'événement en ordonnant à son assistante de prétexter l'excuse qu'il fallait. À quoi bon rester si, de toute évidence, elle n'était plus en vedette. D'un hochement de tête, elle fit comprendre à ses gardes du corps qu'il était temps de déguerpir.

Portant un tailleur en tweed Chanel de la collection automne-hiver 1959-1960, un sac Chanel 2.55, le tout complété de ses essentiels escarpins versatiles ; les mythiques souliers bicolores Chanel, elle s'engouffra dans sa luxueuse bagnole telle une bourgeoise bretonne dont la porte à été ouvert cinq minutes avant qu'elle n'y arrive. Elle ôta ses gants qu'elle jeta par la fenêtre dû aux nombres de mains qu'elle avait dû serrer lors de cette conférence.

- À mon cabinet. Ordonna-t-elle

- Lequel ? Celui du Palais ou du Ministère de la femme ? Demanda son chauffeur

- Au Ministère ! Répondit sèchement Yolande énervée d'une question si banale, surtout venant d'un homme.

Elle soupira encore et ajouta.

- Pourquoi revient-il à moi de répondre à ces questions saugrenues !

- Toutes mes excuses Dame Fabre.

Les roues du car bruirent et le véhicule s'éloigna aussitôt des terres de l'hôtel de Tamara Bossan. Les minutes s'épuisaient rapidement, elle avait encore trois autres rencontres importantes, dont l'une ne l'enchantait pas particulièrement.  Rencontrer des orphelins crasseux, devoir faire mine de manger avec eux et de les porter sur ses genoux en offrant un sourire d'humilité totalement fallacieux aux caméras donnait à Yolande des envies d'execrer. Elle frémit, si bien que ses traits défigurés par ce geste n'eurent pas le temps de s'évanouir au moment où son chauffeur vint l'ouvrir la porte. Elle posa élégamment ses Chanel au sol et s'aventura jusqu'à son office ; alors que tout les employés s'empressaient de se ranger correctement ; tel des élèves qui auraient entendu approcher les pas sévères de leur directrice. Déjà, les domestiques avaient surmonté son secrétaire d'un plateau de boissons chaudes au choix, de biscuits secs aux pépites de chocolats et de quelques grappes de raisins. Elle pénétra dans son cabinet dont la porte fut aussitôt refermée derrière elle.

La deuxième des Fabre se fit un plaisir de se stériliser les mains depuis ses lavabos privés et s'installa derrière son extravagant bureau pesant plus d'une tonne. Ses lèvres touchèrent à peine le buvant de sa tasse de porcelaine qu'elle fut interrompue par l'arrivée affolée de son assistante. N'avait-elle pas été suffisamment claire ? À ses heures de pause, elle avait horreur d'être perturbée ! Combien d'entre elles, faudra-t-elle renvoyer Sacrebleu !! Son regard envenimé de colère brûlait celui de son interlocutrice.

.𝐎𝐮𝐭𝐬𝐢𝐝𝐞𝐫.Where stories live. Discover now