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Je m'attendais à ce qu'elle revienne après qu'elle ait rendue le téléphone à l'homme, mais elle reste à ses côtés. Elle ne dit rien. L'homme lui parlait et elle ne disait rien. D'un coup, elle a un mouvement de recul.

"Ne me touche pas. Jamais. S'il te plaît."
"Tes hommes vont rester seuls avec moi ?"

Merde. J'avais oublié ce détail. Je m'approche alors d'elle puis je la prends par la main.

- Madame est prise. Dis-je à l'homme.

L'homme s'excuse alors, puis retourne à ses occupations. Je prends Syra et m'éloigne de la foule un peu. Elle semble soulagée.

- Cet homme t'a fait peur ? Lui demandais-je.

- Il n'a rien fait... Dit-elle faiblement. Il m'a juste proposé un café et je... j'ai eu peur... je me sens tellement... tellement gênée...

Je maudis intérieurement l'homme qui l'a mise dans cet état. Enfin "homme" est un grand mot. Qu'a-t-il pu bien faire pour la traumatiser autant ? Serait-ce à cause des coups de son père ?

- J'essaie... j'essaie vraiment de ne plus avoir peur, dit-elle les larmes aux yeux. Mais je n'y arrive pas. C'est plus fort que moi.

Des larmes s'échappent de ses yeux et roulent sur ses joues. Je me mets face à elle et m'apprête à poser mes mains sur ses joues, je m'arrête à mi-chemin même si elle ne réagit pas.

- Je peux ? Lui demandais-je.

Elle me regarde dans les yeux, comme si je lui ai demandé quelque chose d'étrange. Mais son expression change et se fait remplacer par de la gratitude. Elle finit par hocher la tête, alors je pose mes mains sur ses joues et sèche ses larmes.

- Tu vas y arriver, Syra. Un jour, tu iras mieux. J'en suis certain, lui dis-je doucement. Tu es une femme forte, et tu arriveras à surpasser toutes tes peur. Et si tu m'y autorise, je t'aiderais.

- Tu le penses réellement ? Dit-elle faiblement. Ça fait cinq ans... et je n'arrive pas à changer.

Encore ces cinq ans. Je me demande ce qui a bien pu arriver. Mais je ne lui demande pas. Elle m'en parlera quand elle voudra. Quand elle se sentira prête. Et ça ne semble pas être une mince affaire...

- Je le penses réellement. Lui affirmais-je. Si tu n'arrives pas à guérir de toi-même, d'autres t'aideront à guérir. Tes amis, tes parents, ta petite sœur, peut-être l'homme avec qui tu finiras ta vie et tes futurs enfants.

Elle me regarde tristement, comme si elle disait qu'elle n'avait rien de tout ça. Que cette petite rose est née seule dans ce cruel monde. Mais elle se reprend très rapidement. Elle recule, reprend ses esprits et me regarde comme d'habitude.

- Désolé, j'ai plombé l'ambiance. Dit-elle.

- Non, ne t'inquiète pas. La nuit n'est pas encore fini. La rassurais-je. Allons nous amuser.

Elle fait un petit sourire. Profitons de ces quelques heures, avant que l'on retourne chez moi, et que l'on redevienne froid l'un envers l'autre. Avant qu'elle ne me déteste encore, et que je reste indifferent face à elle.

- Allons manger quelque chose. Lui dis-je.

Elle hoche la tête alors puis on commence à s'avancer.

- Par contre, pas... Commence-t-elle.

- Pas le marchand de glace, je sais. La coupais-je.

Elle semble surprise, avant de détourner son regard. Je m'en rappelle depuis la dernière fois avec Kaysan. Cette femme est remplie de souffrance, pleine de mystère.

- Deux barbes à papa, dis-je au marchand.

Il hoche la tête, prend deux bâtons et commence à nous préparer notre barbe à papa. Syra le regardait faire, stupéfaite. Je me demande vraiment quel genre d'enfance elle a eu. Ce qu'elle découvre maintenant, nous, on l'a découvert plus petit...

- Et voilà. Dit l'homme en souriant et en nous tendant la barbe à papa.

Je les prends puis paye, avant de tendre à Syra la sienne. Elle la mange comme le ferait un enfant qui goûte pour la première fois. Et je ne peux m'empêcher de sourire. C'est mignon.

- Qu'est-ce que tu veux faire ensuite ? Lui demandais-je.

- Et si on faisait la grande roue ? Me propose-t-elle.

Je hoche la tête puis l'emmène devant la grande roue, je paye notre place avant de monter dans notre cabine. On s'assoit, et petit à petit, on monte. Pendant que Syra admirait le paysage, je prends mon téléphone et envoie un message au propriétaire de l'attraction pour qu'il l'arrête lorsque nous sommes tout en haut. Et c'est ce qu'il fait.

- Qu'est-ce qu'il se passe ? S'inquiète Syra.

- Je ne sais pas. Lui mentais-je. On va devoir attendre.

Elle soupire puis hoche la tête, elle se reconcentre alors sur la magnifique vue de Moscou. C'est tellement dangereux. Je commets une grande erreur. Je ne devrais pas agir ainsi avec elle. Elle travaille pour moi. Elle est mon employée. Je ne devrais pas.

Mais elle semble si seule dans ce monde, si éloignée de tous, elle a besoin de quelqu'un. Elle a besoin d'un ami. L'homme n'est pas né pour rester seul. Et aussi enfantin que cela puisse paraître, je veux être cet ami. Son ami.

- Tout est si beau. Chuchote-t-elle en souriant.

Je la regarde longuement et souris en même temps qu'elle. Son sourire est tellement contagieux. Maintenant que je suis certain qu'elle n'est pas envoyée par le gouvernement égyptien, je me sens plus à l'aise avec elle. Mais en faisant tout pour prouver ce fait, je n'ai fais que la dégoûter encore plus de moi.

Je dis vouloir être son ami, mais comment serait-ce possible si elle me déteste et ne me fait pas confiance ? Je vais devoir travailler encore plus sur mon comportement avec elle. Peut-être l'inviter à sortir quelques fois, en masquant mes intentions par des entraînements. Comme ce soir.

Ce n'était pas prévu, cette leçon avec le vol de téléphone. Je voulais sortir, et je ne voulais pas la laisser avec mes frères et Kaysan, alors j'ai saisis l'occasion de ses entraînements pour pouvoir passer du temps avec elle.

Elle sera qu'une amie. Rien de plus qu'une amie...

La Rose d'un CriminelWhere stories live. Discover now