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CHAPITRE SEPT

« Je t'aime, Nathan. Et je t'aimerais toujours. »

* * *

Nathan m'invite à une réunion des AA, le samedi. Il va recevoir sa médaille des soixante jours et il veut que je sois présente pour fêter l'évènement avec lui. Je parcours les quatre-vingt dix bornes qui séparent West Linn de Centralia et je suis ses indications.

La réunion a lieu dans une modeste église en bois, avec un parking boueux plein de nids-de-poule. Je me gare et je me dirige vers le parvis en évitant les flaques. Il n'y a qu'une petite vingtaine de personne à l'intérieur, assises sur des chaises pliantes, en majorité d'âge mûr : agriculteurs, femmes au foyer, travailleurs de la scierie locale. Ils servent du café dans une de ces grosse cafetière en argent.

Je prends place sur une chaise en métal. Je remarque aussitôt que Nathan est très apprécié. Dans toues les conversations, il n'est question que de sa médaille. Tout le monde le félicite pour sa réussite. Il est leur mascotte, leur chouchou. Il appartient à leur communauté. Il est leur prince, maintenant.

Nathan est gêné d'être au centre de l'attention. Mais d'un autre côté, ça ne lui déplaît pas. Au contraire. Et je sens qu'il aime ces gens en retour, à sa manière, avec simplicité. Je le lis dans ses yeux.

Après la séance, le groupe l'emmène dîner dans le seul restaurant chinois de Centralia. Je m'incruste et je suis le mouvement. Nathan marche à mes côtés, me présente aux autres, me garde près de lui.

Au resto, on lui porte un toast avec nos verres d'eau ou de Coca. Nathan se lève et remercie la cantonade. C'est une chouette soirée, même si je ne connais personne, je passe un bon moment.

Plus tard, une fois les autres partis, on se promène dans le centre-ville silencieux de Centralia. Puis on retourne au parking de l'église où j'ai laissé ma voiture. C'est étrange d'être de nouveau seule avec lui. Pour être franche, je me sens jalouse des gens d'ici — moi aussi, j'aimerai avoir Nathan dans ma vie.

— Merci d'être venue, me dit-il lorsque nous atteignons la voiture.

Les yeux baissés sur mes clés, je lui réponds :

— De rien, ça m'a fait plaisir. Je suis contente que tu ailles bien.

— Tu sais, j'hésite à revenir à Portland.

Je le regarde avec étonnement.

— Je ne vais pas passer ma vie dans un sous-sol, ajoute-t-il en souriant.

Je lui rends son sourire. Il me dévisage avec cette expression bien à lui. Ses yeux brûlent. Il a envie de moi.

Émue, j'avale ma salive et, l'air de rien, je lui demande :

— Qu'est-ce que tu ferais à Portland ?

— Je ne sais pas. Je me trouverais un boulot.

— Ce serait sympa de t'avoir pas loin...

Je tends la main et je tire sur la poche de son manteau.

— Oui, ce serait sympa, murmure-t-il en se rapprochant.

Je ne peux pas me retenir. On se jette l'un sur l'autre. On échange des baisers en s'arrachant nos vêtements et en haletant. Je respire son odeur à pleins poumons. Mon cerveau commence à tournoyer, ma conscience glisse dans un abîme merveilleux.

On finit à l'intérieur de la GMC de ma mère. Nathan est fou de désir. Moi aussi. Ma raison me dit que nous allons nous arrêter, mais mon coeur sait bien que non. C'était inévitable.

Je suis sur lui et je l'écrase de tout mon poids. Je saisis ses cheveux par poignées, les plis de son t-shirt. Je caresse son visage. Le temps s'était interrompu et puis, soudain, c'est terminé. Je cligne des yeux. Je m'écarte de lui et on reste immobiles un moment, épuisés et à moitié nus dans l'habitacle froid.

Ensuite, on se rhabille lentement, et on se tient blottis l'un contre l'autre. Nathan brise le profond silence.

— On n'aurait peut-être pas dû.

Son ton sérieux me reprend. Je lui murmure dans l'obscurité.

— Ne dis pas ça.

— Mais ce n'est pas bien.

— Ce n'est pas idéal... mais de là à penser que c'est « mal »...

Je lui prends la main, je l'embrasse, je la pose sur ma joue.

— Je t'aime, Nathan. Et je t'aimerais toujours.

— Je t'aime aussi, Kaylee. Tu ne peux pas savoir à quel point.

Addiction | réécriture [TERMINÉE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant