Addiction | réécriture [TERMINÉE]

huit

CHAPITRE HUIT

« Je suis certain que tu n'as aucun copain qui ne se drogue pas. Voire que tu n'as plus de copain du tout. »

* * *

— Tu ferais mieux de te réveiller, murmure une voix.

Quelqu'un me tapote l'épaule et je relève la tête d'un mouvement sec. Je suis assise à une table, entourée de la bande de nuls du yearbook. Nathan est installé à côté de moi.

— Le prof est là ?

— Non, répond-il.

Ma vision s'éclaircit peu à peu.

— Alors pourquoi tu m'as réveillée ?

— Tu allais tomber de ta chaise.

— Figure-toi que j'ai un certain talent pour dormir sur les chaises, me vantais-je en souriant.

Nathan ne réagit pas. Il travaille sur un article fascinant portant sur l'équipe de natation des minimes.

— Pourquoi tu t'es mis à côté de moi ?

— C'était la seule place libre.

À la fin de l'heure, je me sauve sans tarder. Malheureusement, je ne marche pas assez vite pour semer Nathan qui me suit dans le hall. Il a perdu tout son aplomb. Il bafouille au lieu de parler avec sa voix habituelle.

— Au fait... Je... Euh...

— Tu quoi ?

— J'ai interrogé Jake à ton sujet.

— Je lui ai demandé où tu avais bien pu passer le dernier semestre. Il m'a dit que tu étais en cure de désintoxication.

— Exact.

J'accélère le pas.

— Il s'est foutu de moi, en plus. D'après lui, tout le monde est au courant sauf moi, et je suis un abruti.

— C'est marrant, je pensais la même chose.

— Puis, j'ai réfléchi, dit-il en courant pour rester à mon niveau. Et j'ai eu une illumination. J'ai compris pourquoi tu allais à la bibliothèque. Avant, tu traînais avec Jake, Raj et compagnie. Le problème, c'est qu'ils ont pour habitude de sortir fumer de l'herbe pendant la pause déjeuner. Du coup, tu vas à la bibliothèque faire des mots croisés et dormir afin de passer le temps.

— Bien joué, Sherlock !

— Après, j'en suis arrivé à la conclusion que tu devais t'ennuyer le week-end — et sans doute le reste du temps — et qu'on pourrait peut-être faire un truc ensemble.

Je continue d'avancer à grands pas sans répondre.

— Oh, rien d'extraordinaire. Mais si tu as besoin de t'aérer, de sortir, de faire de nouvelles connaissances... Tu vois...

— Tu te portes volontaire ?

— Oui. Pourquoi pas ? On pourrait aller au parc, au centre commercial... ? Je ne suis franchement pas débordé en ce moment.

— Ah bon ? Tiens donc ! Un garçon cool comme toi ne croule pas sous les rendez-vous ?

Il fronce les sourcils, mais ne se décourage pas.

— Je me suis dit que ça ne coûtait rien de proposer. C'est Jake qui m'a proposé la patinoire.

— La patinoire ? Répétais-je, surprise.

— Oui, paraît que les filles aiment ça.

— Oh, seigneur ! Ce que tu peux être ringard.

— Un ciné alors. Ou autre chose.

— Et ce ne serait pas un rencard ?

— Non. Ce serait juste... histoire de te filer un coup de main. De faire une bonne action. Je suis certain que tu n'as aucun copain qui ne se drogue pas. Voire que tu n'as plus de copain du tout.

— Alors tu t'offres comme ami de remplacement ? Une sorte de blaireau de compagnie ?

— Je ne suis pas un blaireau, rectifie-t-il, mais, en revanche, je peux consacrer un peu de mon temps à une personne en difficulté.

Je souris, riant intérieurement.

— Comme c'est gentil de ta part.

— Oui, c'est gentil de ma part. D'habitude, je ne suis pas comme ça, mais tu m'as l'air sympa alors... Si tu préfères, on pourrait s'asseoir quelque part et remplie des grilles de mots croisés ensemble ?

Je pivote brusquement sur mes talons et je pars en direction du parking.

— Ne le prends pas mal, mais je crois que c'est une très, très mauvaise idée.