trois

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CHAPITRE TROIS

« À un moment, je réalise presque un cercle complet et chancelant comme une vieille dame, avant de m'écraser contre la rambarde. »

* * *

   Pour obtenir les meilleurs résultats possible, je m'installe un bureau au sous-sol, loin du soleil, de la pelouse fraîchement tondue et des cris des petits voisins qui jouent au volley-ball dehors et se baignent dans leur piscine ouverte. Je travaille deux heures tous les soirs, quoi qu'il arrive. Mes parents me croient devenue folle.

   Un jour, après les devoirs, je tente de rappeler Martin. J'ai déjà essayé à deux reprises, mais il continue de m'ignorer. Cette fois, je téléphone sur le fixe de ses parents et je tombe sur sa mère. Je lui explique que je suis une amie du lycée.

   Martin est bien forcé de prendre l'appel. Il répond sur un ton agacé, comme si je le dérangeais. Je lui propose d'aller au centre commercial mater un film.

— Je croyais que tu n'aimais pas le cinéma.

   D'après ce que je lui ai dit. Et c'est totalement vrai.

— Si tu préfères, on peut se balader en voiture.

   Il pousse un gros soupir, histoire de me faire sentir à quel point cette perspective l'assume. Mais à mon avis, il n'a rien prévu de plus intéressant. En tout cas, il accepte de passer me prendre.

   Je l'attends dans le jardin. Bien qu'il arrive avec vingt minutes de retard, je ne proteste pas. Je suis contente de le voir. Je trouve sa compagnie relaxante, même si mon côté Madame Je-sais-tout finit toujours par ressortir en sa présence. Je dois me mordre les lèvres pour ne pas prononcer le mot « loser » en boucle.

   Après une promenade en voiture, on atterrit à la patinoire du centre commercial. Je suis un peu moins ridicule avec des patins aux pieds que la fois précédente. Je parviens maintenant à avancer de quelques mètres et à tourner. À un moment, je réalise presque un cercle complet et chancelant comme une vieille dame, avant de m'écraser contre la rambarde.

   Je m'apprête à entamer mon second tour de piste lorsque Martin reçoit un appel sur son portable. Il se dépêche de quitter la glace et se précipite vers un banc pour décrocher. Je me demande qui ça peut être. Je lui pose la question plus tard, pendant qu'il me ramène à la maison.

— Personne, ment-il.

— Ça m'étonnerait. Je ne t'ai jamais vu courir aussi vite.

— Elle s'appelle Grace.

— C'est une fille ?

— Oui. Et j'apprécierais que tu m'épargnes tes commentaires ironiques.

— Ok, ok. Tu l'as rencontrée où ?

— Je n'ai pas du tout envie d'en parler avec toi.

— Martin, je suis une fille moi aussi. J'aime bien discuter de ce genre de choses.

— Au cours d'un débat. Voilà. C'était au cours d'un débat.

— Oh là là ! Elle t'a cloué le bec et maintenant, tu es fou amoureux d'elle.

— Pour info, je n'ai jamais perdu le moindre débat en deux ans.

— Tu es si intelligent.

   Il secoue la tête et abaisse sa vitre en appuyant sur un bouton. Le vent rempli l'habitacle.

Addiction | réécriture [TERMINÉE]Where stories live. Discover now