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CHAPITRE SEPT

« Emily nous trouve des chaises le long du mur. Elle aime venir ici à cause des garçons. »

* * *

J'appelle Ashley quelques jours plus tard. On a des rendez-vous téléphoniques dans le cadre du suivi. Elle est impressionnée que je sois encore en vie.

Je la rencarde : je dors mieux, je ne suis pas vraiment en manque et je participe aux séances du groupe de soutien du docteur Bernstein, bien que je déteste ça. Je retourne au lycée et quand je rentre de cours, je regarde la télé. Je sors avec Emily le week-end (cette nouvelle amuse beaucoup Ashley). Elle semble satisfaite de mes progrès mais insiste pour que j'aille en plus aux Alcooliques Anonymes.

Alors, le lendemain, je téléphone à Emily et on décide de s'aventurer ensemble à une réunion des AA pour les jeunes. Sa mère nous y conduit dan son Cadillac Escalade. L'assemblée a lieu dans le sous-sol d'une vieille église en pierre. Tout le monde n'est pas à proprement parler "jeune" là-dedans, mais il y a quand même une majorité d'adolescents. Ils forment un public turbulent. J'aperçois pleins de tatouages, de coiffures excentriques et de piercings.

Emily nous trouve des chaises le long du mur. Elle aime venir ici à cause des garçons. Les deux qui sont assis devant nous n'arrêtent pas de faire rouler leurs skate-boards sous leurs chaises dans un sens puis dans l'autre. Moi, je leur trouve des têtes de criminels endurcis, mais Emily en a l'eau à la bouche. Elle a opté pour un look sexy, ce soir. Elle a enfilé un jean moulin, appliqué son fond de teint à la truelle et à souligné son regard de khôl noir épais qui fait ressortir ses traits bouffis.

Franchement, elle a une sale mine. Moi aussi, mais la différence, c'est que je suis assez lucide pour porter des vêtements amples et éviter d'attirer l'attention.

On reste tranquilles pendant le début du rituel des Alcooliques Anonymes. Je m'en souviens, c'était pareil en cure. Ça devient vite ennuyeux et bientôt, Emily ne tient plus en place. Si bien qu'à la moitié de la séance, on sort sur la pointe des pieds pour qu'elle puisse fumer une cigarette.

Debout dans le froid, sous les réverbères des parkings, Emily souffle de minces filets de fumée dans le ciel.

— Si je ne me fais pas un mec rapidement, je vais devenir folle, me confie-t-elle.

Je hoche la tête.

— Ça t'arrive de ressentir la même chose, ou c'est moi qui suis dingue ? M'interroge-t-elle.

— Je ne sais pas trop, avouais-je en haussant les épaules.

Je contemple le ciel en silence tandis qu'elle écrase son mégot sur le bitume sale.

Addiction | réécriture [TERMINÉE]Where stories live. Discover now