A l'ombre des murs [Livaï x OC] | Wattys 2021 | Wattys 2022

30 ~ Grosse bêtise

Une semaine. Je me suis donné une semaine de réflexion avant de prendre une quelconque décision en ce qui concerne Reiner. A la fin de cette fameuse semaine, mon opinion n'a toujours pas changé. Je refuse d'arpenter les couloirs de ce bâtiment en sachant pertinemment qu'un de mes amis, bien qu'il soit un traitre, se fait torturer sous mes pieds.

Est-ce que je vais regretter ce que je m'apprête à faire ? Probablement. Est-ce que je vais en payer les conséquences auprès du bataillon ? Sans aucun doute. Avec un peu de chance, peut-être que personne ne me verra, mais j'en doute fortement.

Je jette un coup d'œil au soleil couchant et pousse un long soupir. Le moment fatidique approche, je vais devoir passer à l'action. Je me remets sur mes pieds et étire mes bras avant de quitter le toit du bâtiment, endroit où j'apprécie me rendre pour réfléchir. Je descends les escaliers en trottinant et sors du bâtiment pour me rendre aux écuries. Ensuite, je brosse et harnache un des chevaux, non sans difficulté à cause de mes bandages aux mains. Ces bandages me font pratiquement des moufles, et je galère à sangler ce foutu canasson.

– Tu as besoin d'aide ?

Je sursaute et me fige sur place lorsqu'un inconnu m'adresse la parole. Merde ! Moi qui pensais être seule... Je me tourne finalement vers un soldat aux cheveux châtains que je ne connais pas et lui adresse un sourire chaleureux.

– Oui je veux bien. Avec ça, ce n'est pas évident, me plains-je en désignant mes mains.

Le soldat me lance à son tour un sourire, dévoilant ses dents blanches parfaitement alignées, et s'attèle gentiment au harnachement de cette saleté de canasson.

– Que t'est-il arrivé ? demande-t-il en désignant mon visage une fois qu'il a fini de sangler.

– Je me suis frottée d'un peu trop près au titan colossal, soupiré-je.

Je serre les poings en repensant à ça et grince des dents lorsqu'un éclair de douleur traverse mes mains. Je vais faire la peau à cet enfoiré de Bertolt dès qu'il aura le malheur de recroiser ma route. Un sourire mesquin prend place sur mes lèvres en m'imaginant serrer mes mains autour de son cou, ou encore le transpercer de ma lame. Je sursaute lorsque le soldat m'adresse à nouveau la parole :

– Où est-ce que tu comptes aller si tard ?

– J'aime bien me promener seule le soir, ça me permet de me poser et de réfléchir. Je comptais grignoter rapidement un petit truc avant de partir.

Il hoche la tête et s'affaire ensuite à brider mon cheval. Je le remercie chaleureusement et attends qu'il s'éloigne avant de sortir des écuries avec la bête. Je laisse le cheval caché à l'arrière du bâtiment, en croisant les doigts pour que personne ne tombe dessus.

Je me dirige ensuite vers les cuisines et récupère un plateau repas en toute discrétion. Je prends la direction des cachots et sens mon pouls s'accélérer à mesure que j'avance. Je suis en train de faire une énorme connerie, je le sais pertinemment, pourtant mes pieds me mènent mécaniquement vers les geôles sans que je puisse les arrêter. Mes mains commencent à trembler et je raffermis ma prise sur le plateau.

Durant cette semaine de réflexion, je me suis glissée plusieurs fois jusqu'au couloir des cachots pour analyser la situation. A cette heure-ci, il n'y a qu'un seul garde qui surveille la cellule de Reiner, je devrais pouvoir le neutraliser sans trop de problème. J'espère cependant que le caporal Livaï ou le major Erwin ne sont pas en pleine séance d'interrogatoire ou de torture, sinon je suis fichue.

Mes pieds buttent au sommet du fameux escalier menant aux sous-sols, hésitants. Mes mains font trembler le plateau si fort que le verre d'eau déborde par moment, et mon cœur cogne si fort dans ma poitrine que j'ai l'impression qu'il va s'en échapper. J'inspire profondément pour me donner du courage et tenter de me calmer avant de poser un pied sur la première marche. Je m'engouffre silencieusement dans le long escalier de pierre et reprends un peu d'assurance. De toute façon, il est trop tard pour reculer.