Chapitre 12

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Je sentis un bras se poser autour de mes épaules et reconnus la voix de Mo qui s'adressait au barman. Vue de la tête de ce dernier, Sneazz n'avait pas dû être tendre avec lui. Je n'avais pas écouté leur échange, trop occupée à gérer la crise d'angoisse que je sentais arriver. Le barman repartit s'occuper d'autres clients. Quand je reconnectai avec la réalité, Mo me fixait avec inquiétude.

《 Mia ? M'appela le rappeur.

Je ne répondis pas, trop concentrée sur la gestion de ma crise.

《 Mia ça va ?

- Euh oui ça va, rien de grave. 》

Je m'efforçais d'agir le plus naturellement possible.

《 Viens, on retourne avec les autres. M'invita-t-il.

Je hochais la tête le suivis.

Je pris mon verre et nous partîmes rejoindre les autres dans le carré. Nous retrouvâmes mon frère qui parlait avec Ken. Gaby leva les yeux vers moi et je le vis commencer à paniquer. Mo expliqua toute l'histoire aux deux garçons. Le barman avait surement dû lui raconter. Gaby s'approcha de moi sans pour autant me toucher.

《 Tu veux qu'on rentre ?

- Non c'est bon. Tu as l'air de bien t'amuser, reste. Je vais rentrer, je suis fatiguée.

- Je ne te laisserai pas rentrer toute seule dans cet état-là. Je rentre aussi.

- Non. Reste. Fais-moi plaisir petit cœur.

- Tu t'en va déjà Princesse ? Me demanda Ken.

- Oui. Merci pour cette soirée. Le remerciais-je.

- Je te ramène ? Proposa-t-il.

- Non c'est bon, restez. Ne vous en faites pas, je sais me défendre.

- C'est mort, je ne laisse pas ma Princesse toute seule dans le métro à cette heure-ci. Ne t'en fais pas Gaby, je m'en occupe. Continue de t'amuser.

- S'il te plaît Gaby, profite. Insistais-je.

Je lui fis mes yeux doux auxquels il ne pouvait pas résister.

《 Bon d'accord mais tu fais attention à toi. Céda-t-il.

Il tourna la tête vers Ken.

《 Veilles sur elle s'il te plaît. 》

Ils se serrèrent la main comme pour sceller un pacte. Je pouffais. Je fis le tour des gars pour leur souhaiter une bonne nuit.

Ken me passa ma veste et me prit la main pour sortir de la boite. Arrivés dehors, nous prîmes la direction de chez moi toujours main dans la main. Nous marchâmes tous les deux sous les étoiles dans les rues de Paris. Tout paraissait si calme.

J'étais tellement bien avec lui que j'en oubliais même notre objectif. Je n'avais plus vraiment envie de rentrer. Ça ne faisait que quelques semaines qu'il était entré dans ma vie mais je me sentais si bien en sa présence.

Je repris conscience du monde qui m'entourait une fois arrivée devant mon immeuble. Depuis combien de temps étions-nous arrivés ? Ken me regardait, ne voulant sûrement pas me déranger dans mes pensées. Nos regards se croisèrent et je sentis des frissons dans ma colonne vertébrale. Je pris conscience que la chaleur de sa main contrastait avec la froideur de la mienne.

Je ne pouvais détacher mon regard du sien. Il y avait quelque chose de spécial dans son regard mais je ne réussis pas à déterminer ce que c'était, ils m'hypnotisaient. Nous étions là, à nous regarder dans le silence. Le temps semblait s'être arrêté. Aucun de nous n'avait l'air de vouloir rompre le contact.

Un autre frisson me parcourut.

《 Tu as froid ? S'inquiéta Ken.

Un peu. Avouais-je.

Tu devrais rentrer avant de tomber malade.

- Tu montes ?

- Je ne veux pas te déranger.

- Tu ne me déranges pas, allez viens. 》

Je resserrai ma main autour de la sienne et le tirai jusqu'à mon appartement. Nous entrâmes, je lui fis un café et m'éclipsai pour aller me changer. J'enfilai un jogging noir et un t-shirt large blanc. Je pestais en me rendant compte que mes collants étaient effilés de mon genoux à ma hanche.

Je m'attachai les cheveux en un chignon flou et ressorti de ma chambre avec ma robe à la main en direction de la salle de bain pour la détacher. J'appelai Ken pour qu'il me rejoigne. Il arriva avec son café et s'assit sur la baignoire. Nous discutâmes de tout et de rien pendant que je m'attelais à détacher ma robe.

Le sujet dévia sur la boxe et je me mis à repenser à la raison de mon arrêt. Je me figeai et les larmes me montèrent aux yeux. Je croisais le regard de Ken dans le reflet du miroir alors que j'essayais de ravaler mes larmes. Mes mains se mirent à trembler et je lâchai ma robe dans l'eau.

Ken se leva et vint m'enlacer alors que je me retournai vers lui. Je capitulai et pleurais dans ses bras pendant ce qui me parut être une éternité. Ken me caressait le dos en attendant patiemment que je me calme.

Je pris une grande inspiration et décidais de tout lui avouer. Je relevai la tête vers lui et commençai à tout lui raconter à propos de Thomas et de la boxe. Mes larmes reprirent de plus belle. Il m'écouta patiemment jusqu'à la fin. Plus j'avançais dans mon histoire, plus sa mâchoire se contractait. Il ne disait rien mais je pouvais voir de la haine dans son regard. J'aurais même juré avoir vu une flamme dans ses yeux. Je compris donc d'où venait son nom d'artiste : Nekfeu.

《 Le verre, tout à l'heure, il m'a rappelé Thomas. Il balançait souvent des choses dans tous les sens quand il était énervé. Il a déjà éclaté un verre devant moi lors d'une de ses crises de colère. Sanglotais-je.

Calme-toi. Chuchota-t-il dans mon oreille. Je suis là maintenant et jamais je ne laisserai quelqu'un te faire du mal. 》

Je me remis à pleurer dans ses bras. Je m'excusai de lui avoir raconté tout ça et le repoussai légèrement pour reprendre mon détachage. Il me lança un regard d'incompréhension mêlé à de la pitié.

《 Ne me regarde pas comme ça, s'il te plait. Lui demandais-je. Je ne veux pas de ta pitié, ce n'est pas ça qui va effacer ce qu'il a fait. 》

Son regard changea soudainement. Ken s'approcha de moi, ses yeux plantés dans les miens. J'eus l'impression de fondre face à la petite étincelle qui brillait dans ses prunelles. Je baissai les yeux, intimidée et vis ses lèvres. J'eus soudainement envie de l'embrasser. Nous devions nous poser la même question à cet instant précis : lequel de nous deux allait craquer en premier ?

Nous revînmes à la réalité à l'entente de la sonnerie de son téléphone. Il fit une moue déçue. Ken décrocha et changea de pièce alors que je tentais de reprendre mes esprits. Que ce serait-il passé si son téléphone n'avait pas sonné ?

Ken revint et m'expliqua qu'il devait aller chercher les gars car c'était lui qui avait les clés de la voiture et qu'ils étaient dans un sale état, autrement dit bourrés. Je le raccompagnai et il m'embrassa sur le front avant de partir en me souhaitant une bonne nuit.

Je refermai la porte et m'y adossai. J'étais encore sonnée par ce duel de regard. Je partis dormir sans attendre le retour Gaby, j'avais besoin de faire le point. Je n'arrivais pas à mettre des mots sur ce que je ressentais. C'était tellement étrange lorsque Ken était près de moi.

Je finis par m'endormir en pensant à toute cette histoire qui avait démarré une dizaine de jours plus tôt. 

Jeux d'ombresWhere stories live. Discover now