Chapitre 2

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Sur le trajet nous avions parlé de tout et de rien. J'appris qu'il avait vingt-quatre ans, je lui répondis que j'en avais vingt-trois.

En arrivant dans le café, nous prîmes tous les deux un soda. Nous étions revenus à parler de la réaction de mon patron concernant la maquette de Ken.

《 Franchement je ne comprends pas pourquoi il t'a dit ça, c'était superbe.

- Tu sais, ce n'est pas la première fois que je me fais refouler. On finit par s'y faire mais c'est la première fois que je me fais autant critiquer. J'accepte la critique tant qu'elle est constructive, là c'était de la pure méchanceté.

- Tu as fait combien de labels avant celui-là ?

- En solo c'est le quatrième.

- En solo ? Ça veut dire que tu fais partie d'un groupe ?

- Trois en fait. 》

Je m'étouffai avec ma boisson.

《 Un collectif : l'Entourage, et deux groupes : le S-Crew et 1995.

- Ah ouais quand même ! Vous avez déjà été produits ?

- On a déjà sorti un album avec le S-Crew et deux EP ainsi qu'un album avec 1995. Compta-t-il. Dans quelques temps on va sortir le premier album de l'Entourage sauf qu'on est connu que par peu de gens pour l'instant, en fait que par les gens vraiment branchés rap français.

- Pourquoi ne pas signer dans le même label que tes groupes ?

- On a déjà eu des problèmes avec certains d'entre eux donc je préfère voir ce qui existe d'autre. 》

J'acquiesçais.

《 Je suis désolée de ne pas connaître mais ça doit être super. J'ai fait une partie de mes études aux États-Unis et en Italie alors le rap français je ne connais pas trop désolée. Expliquais-je.

- Ah ouais pas mal ! En parlant d'études, tu fais quoi dans la vie ? Enfin tu travailles à la maison de disque mais quel métier précisément ?

- Je ne suis que stagiaire pour l'instant. Il ne me reste plus que deux mois de stage pour avoir mon diplôme. J'aimerais devenir directrice artistique dans la musique si possible, mais jamais je ne ressemblerai à Monsieur Moreau, il me dégoûte. 》

Je grimaçais. Il rit.

《 C'est lui qui t'a fait ça ? Dit-il en pointant mon bustier.

- Oui.

- Mais il n'a pas le droit ! Il est là pour t'apprendre son métier, pas pour que tu lui ramène son café.

- Ça c'est de la théorie, je ne peux rien dire sinon il le retournera contre moi dans son rapport. Et crois-moi que cet homme a de l'influence. 》

Nous continuâmes à discuter encore un peu. Son téléphone sonna. Ken décrocha et s'éloigna quelques minutes. Il revint l'air désolé et m'annonça qu'il devait partir retrouver ses potes au studio. Il ajouta en se grattant la nuque qu'il n'avait pas dit à ses potes pour son rendez-vous avec Monsieur Moreau.

Nous nous dîmes aurevoir et alors que je commençais à m'éloigner, il m'interpella en me demandant si l'on se reverrait. Je lui répondis qu'il fallait laisser le destin faire les choses. Je vis sa moue surprise en dessous de sa casquette puis je repris ma route en direction de chez moi. De toute façon, s'il voulait me revoir, il savait déjà où je travaillais ainsi que mon prénom. Cela devrait suffire.

J'avais hâte de rentrer chez moi car ces échasses me faisaient mal aux pieds, ma jupe n'était pas confortable et mon bustier ainsi que mon blazer étaient quant à eux tâchés. Foutu patron.

Je fus soulagée de voir mon immeuble à quelques mètres après quinze bonnes minutes de marche en direction du VIIe arrondissement. Et oui, contrairement à ce que pouvait penser mon patron, j'avais les moyens de m'offrir un appartement plus que convenable en pleine capitale. Je n'aimais juste pas étaler mes moyens devant les autres. Je pourrais me permettre de ne pas travailler mais j'avais décidé de le faire dans un domaine qui me passionnait : la musique. Je voulais travailler avec des artistes et les aider à se faire connaitre.

Je tenais cette confortable situation de mes parents. Mon père était un lord anglais qui avait fait fortune dans l'immobilier à l'international. Ma mère était quant à elle française et avocate dans un cabinet très prestigieux. Mes frères et moi avions été élevés simplement. Nos parents n'étaient pas nés avec une cuillère en argent dans la bouche, enfin un peu pour mon père, mais ils avaient toujours gardé des valeurs de gens simples.

En parlant de frères, le plus âgé s'appelait Gabriel, il avait 18 ans et il rêvait de devenir boxeur professionnel puis coach sportif. Nous nous entraînions souvent ensemble avant que je ne parte étudier quelques mois l'étranger. Malgré nos 5 ans de différence, nous étions très complices. Il était en internat sport-études dans la meilleure école de Paris et il vivait chez moi le reste du temps. Il faudrait d'ailleurs que je pense à lui demander s'il connaissait les groupes de Ken.

Après Gaby j'avais encore un petit frère, Nathaniel. Il avait 8 ans et il vivait à Londres avec mes parents. Je ne le voyais pas beaucoup mais j'essayais d'aller voir quand j'en avais l'occasion. Mes frères représentaient tout pour moi, je les voyais encore comme des petites choses fragiles. Une habitude de grande sœur sûrement.

En arrivant chez moi, la première chose que je fis fut de partir me changer pour mettre une tenue plus confortable. J'en profitais pour me démaquiller et me mis à détacher mon bustier et mon blazer. Après une heure de galère, j'avais réussi à enlever le plus gros de la tâche. Je mangeais devant la télé puis je montais me coucher. 

Jeux d'ombresWhere stories live. Discover now