Papillons de minuit

Chapitre 24-2

— Visualiser mon Souffle ? J'eus un rire sans joie. Je ne sais même pas à quoi il ressemble.

— Le Souffle est différent chez chacun, commença Valentin. Sa couleur et sa forme varient. Celui de Noon, par exemple, se présente comme une rose alors que le mien est comme une tornade. Cela dépend de ta personne, de ta personnalité et de ton identité. Mais aussi de... celui qui te l'a donné. Nous ne nous arrêterons pas sur sa forme et sa couleur, mais plutôt sur sa grosseur. Plus le Souffle est volumineux, plus son hôte est instable et sujet à des Crises. Nous supposons que tu es dans ce cas. Il faut donc tu trouves un moyen de le rétrécir.

Il le disait comme si c'était simple !

Je massai mes paupières, puis posai un regard très peu convaincu sur lui.

— Et comment dois-je m'y prendre pour le rétrécir ?

— A toi de trouver, nous ne pouvons pas t'aider sur ce plan, répondit Nadian.

Je hochai la tête et fermai les yeux lorsque Nadian me le recommanda. Il m'incita à me détendre tout en conservant une concentration maximale et Valentin m'ordonna de réguler ma respiration. Dans le silence qui  m'entourait, je mis en pratique chacune de leurs instructions. Pendant plusieurs secondes, puis, pendant plusieurs dizaine de minutes. Malgré les instants qui s'écoulaient, je ne voyais rien du tout. Tout demeurait noir et leur mutisme ne me rendait guère service. Peut-être que je me précipitais un peu trop. C'était juste que... le fait de ne rien voir qui me dérangeait. Etre dans le noir me dérangeait. J'ouvris un œil et découvris que les deux hommes me dévisageaient avec attention.

— As-tu vu quelque chose ?, s'enquit Valentin.

— Non, soupirai-je en secouant la tête.

Ils ne firent qu'acquiescer et me demandèrent d'essayer à nouveau. Ce n'était que le premier essai, répétaient-ils, et je ne devais pas me décourager. « Tout était encore possible ». Alors je réessayai, et je réessayai. Encore et encore. Plusieurs fois, je remis en pratique tous leurs conseils et focalisai mon esprit sur une seule et même idée : apercevoir mon Souffle. Le temps passa, les minutes défilèrent, mais je ne voyais toujours rien. Apparemment, Il n'était pas décider à se montrer. La sueur dégoulinait sur ma peau, dans mon dos et surtout entre mes seins, ma migraine avait doublé d'intensité et mon nez était irrité à cause de l'excès de poussière. Ma salive devenait amère et ma gorge, douloureuse. J'étais extenuée et pourtant, je n'arrivais pas à lâcher prise. Je voulais réussir, je le devais tout simplement. Certes, je me foutais une pression énorme ; mais cet entraînement était ma lumière d'espoir dans cet océan de ténèbres dans lequel j'étais plongée. Alors je recommençai, de nombreuses fois. A chaque échec, je regardais les deux Papillons en leur adressant un petit « non » de la tête. Ils m'avaient demandé si je voulais arrêter et bien sûr j'avais refusé. Ils n'avaient rien rétorqué. Plus tard, Valentin s'était remis à ses couteaux et Nadian s'était placé au fond de la pièce, adossé contre le mur, le regard braqué dans ma direction. Je ne le regardais pas et me concentrais sur mon objectif.

Apres un nouvel essai, qui avait été magnifiquement soldé par un échec, j'ouvris les yeux et relâchai l'air de poumon. Bon sang, cela faisait un mal de chien. J'avais l'impression que chaque particule de mon être vibrait de douleur et de fatigue. Physiquement, je n'en pouvais plus. Mon corps tout entier me suppliait d'arrêter. Mais mon inconscient, lui, me soufflai de poursuivre.

Nadian vint derrière moi et je l'entendis inspirer.

— Nous devrions arrêter pour aujourd'hui. Quatre heures sont déjà écoulées et je pense bien que tu es à bout.

— Je confirme, ajouta Valentin. Et je suis exténué.

Je pinçai les lèvres et fronçai mes sourcils. Déjà lui, il n'avait rien fait, alors qu'il se taise. Ensuite, oui, j'étais fatiguée, mais je voulais retenter encore. S'ils me laissaient ne serait-ce qu'une chance de plus. Je savais que je pouvais y arriver ; il suffisait juste d'avoir de... la volonté. J'en étais persuadée. Je relevai mes yeux vers le Démoniaque.