Chapitre 21-1

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[ Non réécrit; non corrigé]

Comment as-tu fait ?

Sa question résonna à travers toute la pièce, ricocha contre les murs et se réitéra un millier de fois dans ma boîte crânienne. Ma gorge n'avait jamais été aussi sèche, comme si toute ma salive s'était envolée, et je serrais si fort les poings que je sentais mes ongles pénétrer ma chair tendre. Les méninges tournant à plein régime, je tentais de trouver une explication logique à lui apporter, mais je demeurais encore sous le choc de ce qui s'était produit. Je venais de pénétrer dans la tête du chef des Papillons de minuit ; les échos des murmures résonnaient encore dans mes tympans et ma peau me paraissait toujours agressée par l'océan dans lequel j'avais été plongée. Je ne comprenais plus rien devant ces circonstances des plus déconcertantes, et le regard insistant que m'envoyait le Démoniaque ne m'aidait pas. Sans oublier les mots, échangés avec l'enfant du souvenir, qui me laissaient confuse. Était-ce vraiment Nadian ? Ce garçon lui ressemblait tellement ; il était la version enfantine du Sanglant avec les mêmes yeux, les mêmes cheveux et les cicatrices qui s'étendaient sur son corps. D'ailleurs, comment les avaient-ils acquises ? Et surtout, de qui parlait-il en disant « Sa Majesté » ? Toutes ces interrogations me troublèrent et me donnèrent un affreux mal au crâne. Un goût étrange envahit ma langue ; je déglutis douloureusement.

Dettlaf me toisait de ses yeux aux pupilles dilatées. Souffle court et mains tremblantes, il contracta sa mâchoire tandis que son pied droit tapait nerveusement la surface du sol. Vraisemblablement, il attendait une que je dise quelque chose, mais je ne pouvais rien lui fournir. Je ne savais pas comment je m'y étais retrouvée.

Mes iris se détachèrent des siennes et je fixai un point invisible sur le sol.

— Dayanara, déclara-t-il.

Sa voix gutturale et caverneuse me fit soubresauter. Je relevai aussitôt mes yeux et le dévisageai. Je ne saurais dire s'il était perdu ou énervé, mais son regard était devenu aussi froid que de la glace. Je me mordis l'intérieur de la joue et inspirai. D'un côté, je comprenais son attitude. J'étais entrée dans son espace personnel et avais vu certaines choses qu'il pouvait considérer comme confidentielles. Néanmoins, comment pouvait-il penser que je possédais une explication à ce qui s'était passé ? J'étais humaine, et qui disait humaine disait absence de pouvoirs. De nous deux, c'était lui qui appartenait à une espèce surnaturelle, lui qui possédait des capacités hors du commun. Peut-être, simplement, n'avait-il pas su contrôler sa magie et qu'il m'avait envoyée, sans le vouloir, dans sa tête. Cette explication était la seule plausible. Oui, la seule. Et je voulais qu'il en prenne conscience.

Dettlaf grinça des dents face à mon manque de réaction et serra les poings. Il ne semblait plus être le même homme ; sa personnalité, d'ordinaire calme et douce, avait été remplacée par une autre beaucoup plus instable, presqu'agressive. L'idée que j'ai pénétré sa mémoire de mon propre chef semblait l'aveugler et je craignais que la situation ne dérape.

Avant qu'il ne puisse ajouter un mot, je me relevai rapidement et saisi ma canne. Mon geste lui fit froncer les sourcils et il croisa les bras sur son torse.

— Je ne sais pas. Ok ? Posez-vous vous-même la question ! C'est vous qui maîtriser la magie, pas moi ! retorquai-je d'un ton violent.

Je m'éloignai le plus vite et me réfugiai à l'autre bout de la pièce. Un malaise me consumait de l'intérieur, tel un feu de bois ravageant une forêt. Depuis que j'étais entrée dans cette maison, trop d'évènements étranges m'étaient arrivés. Et là, c'était le summum. Je posai ma main tremblante sur ma poitrine et pris une nouvelle gorgée d'air. Mon cœur battait à tout allure et ma peau me picotait. J'avais le cerveau en compote et j'étais trop fatiguée pour supporter l'attitude de Dettlaf.

Papillons de minuitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant