Chapitre 23-2

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— Respires, me dit-il. Relâche la pression et laisses l'air pénétrer tes voies respiratoires.

Je n'avais même pas réalisé que ma respiration était rapide et irrégulière, ni que je tremblais de tous mes membres. Chacune de mes inspirations était laborieuse et je me sentais oppressée, faisant assurément une bonne vieille crise d'angoisse. Malter tentait de m'apaiser et me donnait des ordres à suivre. Ecoutant ses conseils, je débutai un exercice respiratoire. Je me concentrai sur la voix rassurante du médecin, les poings agrippant ma tunique sale, et fixai le point fixe qu'était son visage. Je tentai de faire le vide dans mon esprit, de ne penser a rien d'autre qu'à mes aspirations. Peu à peu, je m'apaisai et adoptai un souffle plus régulier. Les veines sur ma peau disparurent et les flots de larmes qui ravageaient mon visage s'arrêtèrent. La fraicheur sur mes épaules disparue ; mon corps se réchauffait petit à petit.

J'expirai une dernière fois et avalai ma salive. Je me sentais toujours étrange, vidée de toute énergie et surtout malade, mais mes émotions s'étaient stabilisées et à ce moment, c'était tout ce qui comptait. Et je le devais au médecin. Je le remerciai de plusieurs hochements têtes et il me répondit par un petit sourire.

Malter repartit vers Neha, qui était resté en arrière en me dévisageant, et pris Pilar dans ses bras. Il se leva doucement et nous regarda.

— Neha, te souviens-tu de mon bureau ? (La jeune Pacifique acquiesça). Alors allez-y. Je dois vérifier l'état des autres patients et notamment celui de Pilar. Je tenterai ensuite de joindre les autres pour qu'ils viennent, puis je vous rejoindrai. Neha, consulte-la et relève toutes les blessures qu'elle pourrait avoir.

Neha hocha la tête alors que Malter évitait les débris et sortait d'un pas pressé de la pièce. Elle reporta son regard sur moi et nous nous fixâmes pendant de longues minutes. Le silence envahit la pièce ; aucune de nous deux n'entamait un geste. Ses yeux me montrèrent qu'elle hésitait à m'approcher, probablement de peur que lui fasse du mal. Ce qui était tout à fait légitime. Cette pagaille que... j'avais provoquée m'avait effrayée, moi-même. Alors pourquoi n'aurait-elle pas eu ce droit ? Je soupirai et cherchai ma canne des yeux. Il valait mieux que je me débrouille toute seule. Je ne voulais plus blesser personne ; je ne voulais surtout pas effrayer l'une des personnes qui m'avait tant aidée ces derniers temps. J'enlevai les quelques décombres qui parsemaient mon habit et me mis à quatre pattes. Mon corps entier était endolori et je ressentais la douleur jusqu'au plus profond de mon être. De nombreuses blessures ravageaient mes bras, du sang coulait de mes cheveux et de mon nez. Je serrai la mâchoire et attendit que la douleur passe ; car elle finissait toujours par passer, ce n'était qu'une question de temps. Lorsqu'elle devint plus supportable, j'avançai du mieux que je pouvais, soulevant sans un mot les débris sur le sol.

— Oublie-la, déclara Neha, debout. Je vais t'aider à marcher.

Je la regardai, déroutée. J'avais pensé qu'elle ne voulait plus m'approcher, que je l'effrayais. Mais elle se tenait devant moi, déterminée et ne laissant plus transparaître une seule de ses émotions. J'ouvris la bouche, prête à lui parler, mais poussai un long soupire. Un mal enflamma soudainement ma poitrine, et descendis le long de mon abdomen. Je posai ma main sur mon ventre et grinçai des dents. La douleur s'accentua, se propageant dans tous mon corps, et semblait tout dévaster sur son chemin. Pourquoi ? La douleur aurait dû passer ; elle était passée. Dorénavant, j'avais juste envie de me rouler au sol et d'hurler. Neha se rapprocha de moi à la vitesse de la lumière et jura en me tâtant de partout. Je ne percevais pas ce qu'elle voyait, mes yeux étant comme recouverts d'un voile de brume, mais je vis la panique la gagner. Une enveloppe de coton semblait m'entourer et ma conscience se mit à disparaître.

Je balbutiai des mots incompréhensibles alors que la Pacifique m'aidait à me relever. Accueillant tout mon poids sur ses frêles épaules, Neha me traîna hors de la pièce. La Pacifique respirait vite et se battait pour que je ne m'écroule pas. Elle s'arrêta de nombreuses fois pour me replacer correctement, me suppliant même de faire un effort. Ce n'était pas que je ne voulais pas, je ne pouvais juste plus. J'étais, fatiguée.

Papillons de minuitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant