51| Six identités

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Min Chonay

Je rentre du bureau, épuisé. Les recherches sur Eumae n'apportent rien, mon monde semble s'écrouler un peu plus chaque seconde. Je me dois cependant de garder la tête haute et aider ma famille dans cette terrible passe. La famille... les traits fins de mon neveu se dessinent dans ma mémoire. Jimin, est-ce que tout se passe bien dans l'enquête pour toi ? Un soupir déchirant franchit mes lèvres. Il a été blessé par mes mots cruels et pourtant, il a décidé de me pardonner. Ce surnom « tonton » en était une belle preuve. Nous souffrons tous de la perte d'Eumae mais j'ai été aveuglé par mes propres sentiments, sans être capable de me mettre à la place des autres. Ce n'est pas digne d'un chef de clan. A cette pensée, le regret m'assiège. Il erre dans mon esprit, comme un vieil ermite perdu entre les montagnes regrettées. Il faut que je sois plus fort que ça.

Je déverrouille la porte d'entrée et ne ressens aucune présence dans la maison. Namjoon a dû sortir prendre l'air pendant son jour de congé et Jimin est sûrement à l'APMM. Je rejoins directement le salon et m'affale dans le canapé. Mes paupières se ferment, la paume sèche de ma main passe sur mon visage, essaie de laver la tristesse qui s'y est gravée. Une vibration dans ma poche me fait rouvrir les yeux. Je retire mon portable du manteau et regarde le message de Yoongi. « Le proviseur a convoqué toute l'équipe du festival pour les féliciter de leur travail. Je rentrerai sans doute un peu plus tard que prévu ce soir. A tout' pa'. » Je hoche la tête à la fin de ma lecture comme s'il allait voir mon approbation et balance ensuite mon cellulaire sur la petite table de la salle à manger. Ma tête se cale sur la surface moelleuse du canapé, mon regard scrute le plafond blanc sans vraiment le regarder. C'est comme si mon esprit s'éteignait après toutes ces souffrances.

Je reste pendant quelques minutes dans cette position, ne voulant rien faire, ne pensant à rien, juste m'évader dans ces songes intriguants et obscures ; mais ma raison se rétablit dans un coin de ma tête et me force à bouger. Elle m'empêche de rester là, à attendre que la vie défile. Je me lève ainsi du sofa et me dirige à pas lents vers mon bureau. Je remarque directement quelque chose d'inhabituel dans la configuration de mon bureau, quelque chose qui n'était pas là quand je suis parti ce matin. Une enveloppe où mon nom est écrit en énorme dessus est placée bien en évidence sur le devant de mon bureau. Intrigué, je m'en empare et l'ouvre avec précaution. Mes mains se pétrifient en voyant son contenu. Le carnet d'enquête de Jimin. Mon regard n'arrive pas à se détacher de l'objet, la sensation du cuir détendu sous mes doigts paraît irréelle, pourtant, en ce moment, il se trouve bel et bien entre mes mains.

Jimin ne laisse jamais personne ouvrir son carnet, jamais. Il n'y a que lui qui ait pu le laisser là et il veut que je le lise. Je l'ouvre alors avec une lenteur inexplicable, mes doigts ridés font trembler le papier. Les dernières pages me délivrent son avancée sur l'enquête, un monde inconnu se dévoile sous mes yeux stupéfaits.

Certaines phrases sont soulignées -cela peut être des traits fins ou grossiers-, des mots se baladent dans la marge comme s'il n'avait aucun lien, d'autres sont rattachés à des phrases par des flèches entortillées. Ce carnet est un immense schéma. Je tourne les pages et crée certains liens au fur et à mesure de ma lecture. Seokjin était l'ancien professeur remplaçant qui révélait l'existence du « démon » chez les vampires, faisant lien avec la loi 47. Il connaissait l'existence du dossier 530 et voulait aussi le voler. Il appartenait également au clan Anje, cette famille était très proche du clan Kijamte mais il y a 10 ans, le clan Anje a été éliminé dans un incendie et le clan Kijamte a disparu. Ce que je ne comprends pas est ce mot, « réseau », qu'il met un peu partout. Serait-ce une organisation criminelle ?

Je repousse mes interrogations en arrivant enfin à la dernière page. Un bout de papier, glissé entre les feuilles, tombe alors du carnet et atterrit par terre. Je m'accroupis pour l'attraper et y lit une adresse. Qu'est-ce que ça peut bien être ? Mon attention se détourne bien vite de cette information en voyant du coin de l'œil une phrase écrite au stylo gras à la tout fin du cahier « JUNGKOOK A LE DOSSIER VOLÉ, RENDS-TOI CHEZ LUI IMMÉDIATEMENT. N'EN PARLE À PERSONNE. » Je fronce les sourcils et reste un instant perplexe.

Relation InterditeWhere stories live. Discover now