Chapitre 18

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Après avoir marqué une courte pause, Ezequiel se remet en mouvement.

— Suis-moi.

Sa voix grave et froide me fait frissonner. Lui en tête, nous passons devant plusieurs cellules, attirant sur notre passage de nombreux regards. A l'angle du couloir, un gardien assis sur une chaise est en train de pianoter sur son téléphone. En nous voyant approcher, il relève le menton et mon cœur s'accélère. Pourvu qu'il ne me parle pas, car dans le cas contraire, la prochaine fois que j'entrerai dans une prison, ce sera par la grande porte.

Sans s'arrêter, mon guide lui dit :

— Yendo a la enfermería, me lleva de regreso a la celda.*

Le surveillant marmonne un vague "okay" avant de retourner à son écran. Je tente tant bien que mal de me calmer quand sans le voir venir Ezequiel s'arrête. Je le percute de plein fouet et grimace de douleur en reculant. Avec indifférence, il se tourne vers moi et pointe son index vers une cellule.

— Désolée... euh...

— Entre, me coupe-t-il.

Je me masse l'épaule en obtempérant et commence à reluquer les lieux tandis qu'il se rapproche de moi.

— Qu'est-ce que tu fous, ici, Laina ?

— J'avais besoin de te voir.

— Vraiment ? ricane-t-il. Explique-moi à quel moment, tu as eu la brillante idée de te faire passer pour ce que tu n'es pas ? Et n'oublies surtout pas le moment où tu te retrouves entre les mains de l'autre enfoiré.

Je prends mon temps pour lui faire face et en profite pour retrouver un tant soit peu d'assurance. Notre proximité me surprend, ce qui doit se lire sur mon visage car il recule d'un pas sans cesser de m'interroger du regard.

— Mon petit tête à tête avec Ramirez n'était pas prévu.

Un raclement de gorge me fait sursauter. Pathétiquement, je porte une main à ma poitrine pour tenter de me calmer alors que je découvre un vieil homme allongé sur le lit du bas. Les bras croisés derrière la tête, il étudie avec minutie les lattes du sommier au-dessus de lui.

Dans cette cellule, comme dans celle de toute à l'heure, la décoration est sommaire : un lit superposé, un petit bureau rempli de bouquins et de journaux, un sanitaire et une monotonie qui me met mal à l'aise.

— Qu'est-ce que tu me veux, encore ? exige-t-il de savoir.

Je reporte mon attention sur Ezequiel et avale avec difficulté ma salive.

— Te parler.

— Il me semblait avoir été clair la dernière fois : reste en dehors de cette histoire.

— Tu as un train de retard puisque j'ai déjà rencontré les Rios.

Les narines dilatées, il me toise en toute impunité.

— Répète un peu ça.

— Cette famille est louche mais le père est plutôt bavard.

— Ne t'approche plus jamais de lui.

— Pourquoi ?

Il ferme les paupières puis expire avant de m'autoriser de nouveau l'accès à ses pupilles.

— Tu vois, c'est ça ton problème. Tu me donnes des ordres et tu attends de moi que je les exécute sans plus de détails. Le hic, c'est que moins tu m'en dis, plus je me fais des films et donc je creuse. Monsieur Rios est hautain mais...

— Arrête de prononcer ce nom.

— Pourquoi ? Ça te donne de l'urticaire ?

Ses lèvres pleines s'ouvrent mais comme aucun son ne sort je continue sur ma lancée.

FrontièreWhere stories live. Discover now