ÉPILOGUE

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Notes :

- le texte en italique est en japonais.

- les définitions des mots marqués d'un astérisque (*) se trouvent dans la section commentaire correspondant au paragraphe.

Bonne lecture !


<既婚>


Luka

Shiiro et Luka étaient allongés côte à côte dans le futon noir cendre de la chambre du japonais. Ce dernier dormait profondément, la tête sur la hanche de Luka et son bras en travers ses cuisses. Luka se servait d'ailleurs de son bras comme support pour son ordinateur. Ils étaient arrivés de San Francisco la veille pour assister à l'inauguration du nouveau centre d'aide aux étudiants de Ine Ebinuma. Leurs tenues étaient d'ailleurs abandonnées sur le sol de la chambre. Si Shiiro ne souffrait pas du décalage horaire, ce n'était pas le cas de l'écrivain qui, bien que fatigué, ne parvenait pas à dormir. C'est pourquoi il avait fini par se saisir de son ordinateur pour poursuivre l'écriture de son nouveau livre. Autant mettre son temps à profit, il ne lui restait que peu de temps avant qu'il n'envoie sa première épreuve à Harvey. Shiiro bougeait contre lui, grognant dans son sommeil à cause de la luminosité de l'écran d'ordinateur. Luka ricanait. En presque quatre ans de cohabitation, un peu moins d'un an et demi depuis leur deuxième mariage, il avait découvert que Shiiro était ronchon. C'était mignon.

- « Pourquoi tu ne dors pas ? » Luka devinait la question plus qu'il ne l'avait entendu.

- « Jet lag.

- Tu fais quoi ?

- J'écris.

- Il faut que tu te reposes...

- Je ferais une sieste pendant que tu es en réunion. »

Le japonais grognait à ce rappel. C'était une chose qui avait également changé : Shiiro ne faisait plus passer son travail en priorité. C'était sympa mais d'un autre côté, il devait passer son temps à lui rappeler qu'il possédait des responsabilités. Il s'entendait mieux avec son beau-père, il n'avait pas particulièrement envie que ce dernier lui reproche à nouveau de détourner l'attention de son fils de son travail. Même s'il adorait le distraire dans les moments les moins opportuns.

- « Dors, s'il te plaît...

- J'ai presque fini mon chapitre, rendors-toi.

- Tu me le feras lire ?

- Peut-être. Si tu es sage.

- Je suis toujours sage.

- Dixit le mec qui a commencé à me chauffer en plein milieu de la fête d'inauguration de sa propre mère.

- Tu ne te plaignais pas trop de mon attention.

- Je ne m'en plaignais pas, je mettais en lumière ta dépravation. Je suis presque sûr que ton père a remarqué ton manège.

- Je n'en ai rien à foutre.

- Quel homme vulgaire vous êtes monsieur Ebinuma.

- Quel homme munificent vous êtes monsieur Takashi-Ebinuma. »

L'écrivain ricanait alors que ses yeux se posaient sur les deux alliances qu'il portait sur son annulaire gauche. Shiiro remarquait cela et prenait cette main dans la sienne pour la porter à sa bouche et embrasser les anneaux.

- « Où veux-tu aller cette année pour fêter notre mariage ?

- Où veux-tu m'emmener ?

- Sur la Lune.

- Arrête tes idioties.

- Je suis sérieux ! J'y travaille ! »

Luka rigolait à gorge déployé. Ils étaient seuls dans l'énorme demeure, il n'allait pas déranger qui que ce soit, hormis les animaux nocturnes dans le jardin. Luka posait son ordinateur près du futon et tournait son attention vers le japonais qui venait s'installer à son aise entre ses cuisses. Ils étaient encore nus de leurs ébats plus tôt dans la soirée, et malgré la moiteur de leurs corps, c'était réconfortant d'être ainsi. Shiiro s'allongeait sur son torse, ses cils caressant sa peau. Luka plongeait ses doigts dans ses cheveux et massait son cuir chevelu. Shiiro caressait ses côtes du bout des doigts.

- « Shiiro ?

- Hm ?

- Tu te souviens de notre premier baiser ?

- Évidemment. » Luka tournait le regard vers le jardin, ledit lieu de leur premier baiser. « Luka ?

- Est-ce que tu avais déjà des sentiments pour moi ce soir-là ?

- Oui.

- Depuis quand avais-tu des sentiments pour moi ? »

Shiiro restait silencieux un moment. Luka savait qu'il ne dormait pas car il sentait son souffle irrégulier sur sa peau, la caresse de ses cils quand il clignait des yeux et son doigt continuait de dessiner les idéogrammes japonais sur ses côtes. Il lui laissait le temps de lui répondre. Ou ne pas lui répondre d'ailleurs.

- « Je ne pourrais pas te dire quand exactement, ça n'est pas arrivé comme ça, d'un claquement de doigts mais... En fait, je crois que ça a commencé dès le restaurant.

- Le restaurant ?? Attends ! Tu es tombé amoureux de moi quand je t'ai insulté ?

- Je ne dirais pas que je t'aimais à ce moment-là, plus que mon admiration pour toi à commencer dès le moment où tu as insulté mon père. » Il rigolait, faisait secouer leurs corps. « Je t'ai toujours admiré pour ta force de caractère et ton imagination. Plus on se côtoyait, plus je découvrais un homme dont les qualités, tout autant que les défauts me plaisaient.

- C'est toi qui devrais écrire un livre, pas moi. » Shiiro rigolait de nouveau, son rire résonnait contre les côtes de Luka qui l'imitait.

- « Et toi ?

- Shiiro... »

L'écrivain n'était pas à l'aise avec le fait d'en parler car cela venait à repenser à la fois où il avait forcé le japonais à révéler ses sentiments. Encore maintenant, près de trois ans près cet incident, il se sentait misérable. Shiiro se redressait, Il prenait le visage de Luka dans ses mains et plongeait son regard dans le sien. Dans la semi-pénombre de la chambre, ils paraissaient encore plus sombre qu'à l'habitude. Shiiro embrassait délicatement ses lèvres.

- « Pour ce regard-là/J'ai jeté mon cœur/Dans tous les feux de l'enfer.*

- Je suis marié à un poète à ce que je vois.

- Ma muse m'inspire beaucoup.

- Flatteur. »

Luka repoussait le visage de Shiiro avec douceur. Le japonais roulait à son côté, emportant la couverture dans son mouvement. Il était dans une position lascive, le bas-ventre à demi découvert.

- « La vue t'inspire ?

- Il faudrait que je l'étudie mieux pour cela.

- Je suis tout à toi, Luka.

- Tes mots, pas les miens. »

Luka lui sautait dessus et ils firent encore une fois l'amour dans la position du nœud coulant. Les yeux dans les yeux, leurs souffles se mêlant, ils s'unir à la lueur de la Lune et sous la surveillance du mont Fuji. Bon dieu qu'il l'aimait. Shiiro s'endormait à nouveau, le dos contre son torse. Il avait son bras autour de lui et leurs mains étaient mêlées. La Lune frappait leurs alliances, attirant son regard. Il caressait les anneaux et souriait contre la nuque de son époux qui dormait de nouveau, exténué.

Il avait trouvé le nom de son prochain livre.

ALLIANCE (既婚)Where stories live. Discover now