La fille de Severus

Chapitre 36

Dumbledore murmura quelques mots à Poppy, probablement pour la tranquilliser, et sourit à Severus. Avant qu'il ne sorte de l'infirmerie, Severus soupira et posa la question qui lui brûlait les lèvres.

— Comment saviez-vous ?

Sa voix lui sembla bien trop rauque et il humecta ses lèvres sèches de sa langue.

Dumbledore leva un sourcil perplexe en se retournant vers lui, un demi-sourire persistant sur ses lèvres.

— Savoir quoi, mon garçon ?

Severus déglutit, avant de secouer la tête. Puis il murmura, sa voix se brisant malgré lui.

— Que c'était moi qui... qui gardait des... moldus en vie.

Dumbledore agita la main d'un air amusé.

— Je pourrais vous demander qui d'autre aurait pu faire ce genre de choses, bien sûr. Mais, vous étiez élève il y a peu Severus, et je n'ai pas oublié votre signature magique. Je sais à quel point vous êtes doué pour créer des sortilèges après tout.

Severus baissa la tête, un peu perdu. Puis, il se reprit et marmonna, câlinant distraitement Hope.

— Bien évidemment. Je pensais avoir... effacé mes traces.

Dumbledore gloussa, un peu trop joyeux au goût du jeune homme.

— Vous l'avez fait mon garçon. Vous avez créé un sort de toute beauté, pour protéger tous ces innocents. C'est juste que je vous connais trop bien pour me laisser... distraire.

Severus croisa le regard de Hope, confiant et joyeux, et il se détendit légèrement. Sans quitter sa fille des yeux, il dit enfin, s'assurant d'être audible.

— Merci.

Dumbledore garda le silence quelques secondes. Puis, il murmura avec sincérité.

— Je pensais sincèrement ce que j'ai dit à votre sujet, Severus. Vous avez fait preuve de courage, vous avez pris de terribles risques pour... mettre fin à cette folie. Vous méritez d'être heureux, mon garçon. Je craignais que... que votre cœur soit fermé, mais cette petite est un don du ciel...

Severus ignora les mots de Dumbledore, bien que ses paroles soient un baume pour les meurtrissures de son cœur. Il se sentait totalement perdu, pris entre son amour pour Hope et la tristesse d'avoir perdu Lily.

Il hocha juste maladroitement la tête, avant de soupirer.

— Que s'est-il vraiment passé alors ?

Dumbledore se voûta légèrement et se passa la main sur les yeux, l'air soudain fatigué. Il prit place face à Severus.

— Les Potter ont été trahis. Je ne sais pas exactement comment, mais leur adresse, qui était sous Fidelitas, a été révélée à Voldemort. Il s'y est rendu en personne et il a tué James... Puis Lily. Elle... Votre amie a donné sa vie pour protéger son fils.

Severus l'interrompit, la gorge nouée, d'une voix morne.

— Elle n'était plus mon amie, directeur.

Dumbledore soupira et se pencha en avant pour poser sa main sur le bras de Severus.

— Elle l'était encore, vous n'avez juste pas eu le temps de vous réconcilier. J'avais pris la liberté d'informer Lily de ce que vous accomplissiez pour nous et elle était fière de vous, Severus.

Une larme roula sur la joue pâle de Severus aux mots de Dumbledore, mais il se força à enfermer tous les sentiments qui bataillaient en lui. Il ne pouvait pas imaginer ce qui aurait pu se passer si Lily était toujours en vie ou il deviendrait fou de douleur.

Dumbledore sembla le comprendre puisqu'il soupira.

— Quand vous serez prêt à en parler, mon garçon, je serais là pour vous. Sachez que le fils de Lily a survécu à l'Avada et qu'il semblerait qu'il ait... détruit le corps de Voldemort.

Severus cligna des yeux.

— Je ne comprends pas.

— L'enfant de la prophétie a fait face à Voldemort. Il a reçu l'Avada et il a survécu. Voldemort a été réduit à néant, probablement parce que le jeune Harry était protégé par l'amour de sa mère. Ce garçon... va grandir avec un bien lourd fardeau sur les épaules.

Severus refusa de poser des questions au sujet de l'enfant. Il ne voulait rien savoir de ce garçon qui appartenait pour moitié à Potter. Il demanda seulement, incrédule.

— C'est terminé alors ?

Dumbledore resta silencieux un long moment. Finalement, il laissa échapper un soupir résigné.

— Pas tout à fait, j'en ai peur. Je n'ai pas tous les éléments en main, mais je pense qu'il a juste été... repoussé. Nous aurons un jour à faire face de nouveau à Voldemort. Lorsque ce sera le cas, le fils de Lily sera en grand danger.

Severus leva les yeux vers Dumbledore et il le fixa longuement, ses yeux noirs vides de toute expression. Il aurait probablement dû être en colère de la tentative flagrante de manipulation, mais il était juste fatigué. Il soupira et secoua la tête.

— Vous pourriez juste me le demander plutôt que de me pousser à... promettre l'impossible. Vous savez que je vous dois beaucoup, alors... ne faites pas comme si vous n'y pensiez pas.

Dumbledore rosit et baissa la tête, comme un petit garçon pris en faute. Il laissa échapper un petit rire contrit et il finit par avouer, mal à l'aise.

— Je suis désolé, mon garçon. Je ne voulais pas... vous blesser. Et vous avez raison, bien sûr. La vérité est que je ne vois personne d'autre que vous pour veiller sur le jeune Harry lorsqu'il arrivera à Poudlard. J'imaginais juste que... si vous aviez décidé de vous-même de le protéger en mémoire de Lily...

Severus leva un sourcil incrédule.

— Que la culpabilité me pousserait à aller jusqu'à donner ma vie peut-être ?

Dumbledore sembla horrifié et il secoua la tête.

— Merlin, non ! Mon garçon... je n'irais pas souhaiter que vous soyez blessé ! L'amour de Lily, son sacrifice a protégé ce petit garçon, d'une façon réellement miraculeuse. Je sais à quel point vous l'aimiez et je pensais que si vous... protégiez le garçon au nom de cet amour, il aurait... quelque chose en plus. La magie de l'amour est puissante, Severus, elle est puissante et inconnue.

Severus baissa la tête vers Hope, qui somnolait contre lui, pleinement rassurée d'être dans ses bras. Il se souvint du jour où il l'avait trouvée, si petite blottie dans les bras de sa mère morte. Cette moldue avait-elle sacrifié sa vie pour sauver son bébé ?

L'idée que la magie ait pu intervenir dans le destin de Hope, le conduire, lui, Mangemort, près de cette enfant orpheline, lui fit tourner la tête et il repoussa toutes ces idées dans son esprit, aussi profondément que possible.

Il haussa les épaules et marmonna, d'une voix rocailleuse.

— Je le ferais. Je protégerai l'enfant de Lily.